lundi 15 janvier 2007

Rédaction de résolutions ou résolution de rédaction ?

Les résolutions du Nouvel An* suivent généralement de près le passage du Père Noël ; exactement une semaine plus tard, normalement. En ce qui me concerne, même si je n’ai pas beaucoup écouté la télévision au cours des dernières semaines, j’ai bien entendu parler de la venue du Père Noël ; je ne l’ai pas vu personnellement et j’imagine qu’il n’a pas pu lire mon adresse en passant dans ma rue, mais je sais qu’il est passé. Ça ne m’a pas empêché de penser aux résolutions : avec quelques collègues de la blogosphère, nous avons pris celle de publier tous en même temps, ce lundi 15 janvier, à 6 heures à Montréal et midi, heure de Paris, (pour tenir compte des fuseaux horaires) un billet portant sur les résolutions. Je suis persuadé que, pour plusieurs d’entre nous, ce sera la première, sinon la seule, qui sera tenue en 2007.

Allez vérifier si mes collègues ont tenu cette résolution. Il s’agit, par ordre alphabétique d'Aurélie, de Bergere, de Bertrand, d'Ervalena, d'Hepao, d'Hervé, d'Isabelle, de Lady Iphigénia, de Laurent, d'Olivier et de René.

Le changement fait partie de notre quotidien. Pour vivre jour après jour, il faut s’adapter puisque, de toute façon, tout bouge autour de nous et si nous ne bougeons pas, nous perdons du terrain, si nous n’avançons pas, nous reculons. Les Grecs l’avaient affirmé quelques milliers d’années : tout bouge, rien ne reste pareil. En fait, ils ne s’entendaient pas tous sur la question. Héraclite d’Éphèse (535- 475 av.J.C.) disait que tout changeait toujours, que la vie était un changement perpétuel, comme un fleuve et qu’ « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », puisque ce n’est jamais la même eau qui coule au même endroit. Contemporain d’Héraclite, Parménide d’Élée prétendait plutôt que nos sens ne percevaient que les apparences et que c’étaient plutôt les apparences qui changeaient et non les choses elles-mêmes. Disciple de Parménide, Zénon d’Élée a exprimé sous forme de paradoxe ce changement perpétuel : s’il voulait attraper une tortue, Achille n’y parviendrait pas, enseignait-il, car la distance séparant Achille de la tortue étant divisible à l’infini, selon la pensée, il n’y arriverait jamais, même si l’espace le séparant de la tortue devenant de plus en plus court…

Et qu’en est-il de nos résolutions ? Si l’on prend une résolution, c’est que nous voulons amorcer un changement, en nous-même ou autour de nous. Un changement dans nos habitudes ou une évolution de notre milieu. Mais comme nous n’avons vraiment de contrôle que sur nous-même, il faudra bien que l’on commence par amorcer en soi les changements que nous voulons voir se produire afin de pouvoir, par la persuasion ou par l’exemple, amener les autres à nous suivre et à participer au mouvement voulu. Mais n’est-il pas illusoire, comme le prétendaient Parménide et Zénon, de vouloir changer quelque chose en nous et autour de nous, alors que, selon eux, nous n’aurions le pouvoir d’agir que sur leur apparence ?

Si pour Aristote tout changement doit avoir une cause, se pourrait-il que notre désir de changement en soit une raison suffisante ? Choses certaine si nous ne sommes pas la cause des changements qui s’opèrent autour de nous, il faut pouvoir compter sur la détermination et la motivation pour voir s’opérer des changements en nous, du moins ceux que nous avons choisis.

Mais pourquoi diable faut-il que cette volonté de changement nous prenne une fois l'an, vers le 31 décembre ou le premier janvier ? Est-ce l’esprit de Noël qui a pacifié les cœurs au point de nous faire espérer devenir meilleurs ? Serait-ce la lumière de l’équinoxe d’hiver qui se répand dans nos esprits et nous fait voir les quelques petites habitudes à changer pour que nous devenions presque parfaits ? Ou ne serait-ce pas plutôt l’abus des sucreries du temps des Fêtes qui nous aurait engourdi les neurones au point de nous faire oublier que si l’esprit est prompt, la chair est faible, surtout quand la chaire est bonne ?

Ne soyons pas cyniques et ne décourageons personne. La période des Fêtes nous permet généralement de mieux prendre conscience de nos valeurs profondes et de repenser aux choix que nous faisons. Le temps semble opportun pour songer à changer quelques habitudes, à en abandonner quelques mauvaises et à les remplacer par des bonnes. Et quand on sait que notre santé dépend largement de nos habitudes de vie et, d’abord, de nos valeurs et de notre attitude, il peut être pertinent, au moment de souhaiter aux êtres que l’on aime une bonne santé pour l’année qui vient, de songer à la sienne pour les années à venir.

S’il est vrai que la grande majorité des résolutions du Nouvel An sont oubliées avant la fin du mois de janvier, il reste toujours un grand nombre de personnes qui ont des chances réelles d’atteindre leurs objectifs. Quand on parle d’objectif à atteindre on doit tenir compte de critères à respecter : l’objectif doit être clairement défini ; il doit tenir compte des contraintes, matérielles et autres ; il doit viser un résultat précis et non des vœux pieux (« je veux un million dans mon compte de banque d’ici un an » est une formulation précise, alors que « je veux être riche » est un vœu pieux) ; il doit dépendre de celui qui le détermine (souhaiter gagner des millions en exploitant une bonne idée, par exemple, plutôt que de compter sur le hasard) ; et l’on doit se donner une échéance, sans quoi la motivation risque de se diluer. Et, en termes mathémathiques, la motivation M est égale au gain G sur le prix à payer P : M = G/P. Si le prix à payer est trop grand par rapport au gain désiré, la motivation ne vaut plus grand-chose.

Cela dit, je n’ai pas vraiment fait de liste de résolutions au Premier de l’an ; comme le montre la photo du haut, à part le titre, ma page est restée vierge. J’ai toutefois amorcé au cours des derniers mois une série de changements dans ma vie, que j’espère poursuivre toute l’année et, s’il le faut, l’année prochaine. Ce ne sont pas vraiment des résolutions, mais des habitudes à changer ; des mauvaises à perdre, de bonnes à adopter. Et ce n’est pas dans le stress de la période des Fêtes que j’ai décidé d’adopter ces meilleures habitudes, mais dans les semaines précédentes, néanmoins tout aussi stressantes…

Toute l’année, j’essaierai de susciter dans ma vie et dans celle de ceux que j’aime de grandes joies, tout en sachant apprécier au quotidien les petites joies, à l’image de ces petites lumières que je vois jour après jour, en allant chez mon marchand de journaux, comme sur la photo ci-dessous, et comme il y en a chez moi…

On peut agrandir les photos en cliquant dessus.

*Orthographe de « Nouvel An » :

« La règle générale d'écriture des noms de fêtes civiles ou religieuses, lorsque le nom comporte plusieurs mots, est de mettre une majuscule au nom spécifique, celui qui vient préciser la fête dont il s'agit, et une minuscule au nom générique (fête, jour, etc.).
« Étant donné que les synonymes Nouvel An et Premier de l'an ne comportent pas d'élément générique, l'ensemble est considéré comme l'élément spécifique, ce qui explique la présence des majuscules. Dans le cas de Nouvel An, le nom an s'écrit donc avec la majuscule, ainsi que l'adjectif nouvel parce qu'il est placé devant le nom. Dans le cas de Premier de l'an, premier est un nom et prend une majuscule, alors que son complément de l'an n'en prend pas. »

Dit le Grand dictionnaire terminologique de l'Office québécois de la langue française.

12 commentaires:

Brigetoun a dit…

la note finale me remplit d'humilité - comme le fait de prendre des résolutions dûment pesées, avec études des moyens etc... comme si on pensait vraiment les tenir.
Pour ma part je n'en prends pas à une date précise mais très souvent, généralement au moment de m'endormir, et je les abandonne non moins facilement.
mes amitiés à Zélon et Achile

Alcib a dit…

Il faut, je crois, faire la distinction entre les ojectifs que l'on veut vraiment atteindre et les résolutions que l'on formule pour se faire plaisir ;o)
Moi aussi, je pense en me couchant à ce qui serait bien si cela arrivait (et je le souhaite vraiment) ; mais en effet, je me rends compte à la lumière du jour que les attentes sont disproportionnées par rapport aux moyens que j'ai...
Achille me prie de vous faire ses amitiés et de saluer au passage Patrocle qu'il a vu chez vous.

Anonyme a dit…

Ah, les majuscules!
Depuis que j'ai commencé à étudier l'anglais, mais surtout l'allemand, c'est une catastrophe. Je ne sais plus où en mettre.
Dit-on, par exemple, premier ministre, Premier ministre ou Premier Ministre?

Alcib, P/président! ;-)

Anonyme a dit…

Ta résolution de travailler les attitudes me plaît et rejoint ma philosophie de vie. Merci de me le rappeler. C'est une résolution à la fois pratique et sans limite. Elle se rapproche beaucoup des pensées d'un grand maître grec qui vécu au V'siècle avant J.-C.

Dans "LES VERTS D'OR", Pythagore nous dit:
« Ne permets pas que le doux sommeil se glisse sous tes yeux, avant d'avoir examiné chacune des actions de la journée. En quoi ai-je fauté? Qu'ai-je fait?, Qu'ai-je omis de ce qu'il me fallait faire? (...) Si tu trouves que tu as commis des fautes, gourmande-toi; mais si tu as bien agi, réjouis-toi.»

Alcib, tu as un très beau programme pour l'année 2007 et n'oublie pas: on récolte souvent ce que l'on sème

Anonyme a dit…

Je pense que nous avons besoin de symboles et que le Nouvel An (je ne sais plus si je suis ok pour l'orthographe!) est une date facile à utiliser. Et, comme tu le soulignes si bien, l'ambiance des fêtes nous remet aussi dans de bons sentiments, nous rapproche des autres, etc.

J'ai déjà évoqué l'importance pour moi du rituel des résolutions. Je pense que le simple fait de vouloir changer, évoluer, nous garde vivants. C'est une façon positive d'envisager l'existence.

Tu te donnes de beaux objectifs et tu en parles de belle façon.

Beo a dit…

Mes résolutions quand j'en ai... m'arrivent toujours avec un décalage de quelques jours d'avec Nouvel An.

Je crois que c'est parce que ce sont des évidences qui sont moins visibles durant les festivités de fin d'année ;)

C'est bien de demeurer réalistes aussi :)

Anonyme a dit…

Finalement, ça prouve un peu ce que je pense : les résolutions, ça marche quand on est prêt à les prendre, et ça, ce n'est nécessairement le premier de l'an.

J'en parlais justement l'autre jour à Aristote, que j'ai croisé dans le métro... Hi hi hi !

Anonyme a dit…

Merci encore une fois, cher Alcib, pour les belles paroles que tu laisses sur ton blog pour nous lecteurs. Très belles résolutions, très belles citations des maitres de la philosophie, les Grecs anciens (ou Anciens? bof!). Et vu que tu aime Héraclite, à mon tour de te citer une de ses pensées que j'adore (aimée par T. S. Eliot aussi): "Il faut suivre ce qui est commun à tous,/Mais bien que le Logos [la raison] soit commun,/La plupart vivent comme avec une pensée en propre". Est-ce que ça pourrait valoir comme resolution? Je ne sais pas. Parfois je pense, comme Danaée l'a écrit, que prendre des résolutions est comme signer une assurance pour la vie, ça nous donne l'envie de poursuivre meme dans les jours les plus noirs. Quant à moi, j'ai fait une petite résolution pour ce debut d'année, c'est à dire finalement apprendre à conduire la voiture...le target est visé, la tache pas impossible. Au moins, j'éspère! A la prochaine

Anonyme a dit…

J'espère que tes résolutions feront de 2007 une année enrichissante pour toi et tes proches.

Anonyme a dit…

Je ne sais pas si je tiendrais mes résolutions mais je te souhaite une très heureuse année, je te souhaite l'envie, le courage et le désir pour aller au bout des tes envies!!!

Anonyme a dit…

Dis donc, tu es très prolifique Alcib ! Et indubitablement très savant, notamment sur la culture grecque. Tu as toute mon admiration, moi qui ne t'arrive même pas à la cheville ! Tes résolutions sont humbles et je devrais essayer d'avoir les mêmes, notamment celles de mieux apprécier les petites joies du quotidien. Et surtout ne pas avoir l'impression que ce retour en France ait été la plus grosse bétise de ma vie ! Plus qu'une résolution, c'est une bataille quotidienne !

Anonyme a dit…

ben moi je te souhaite le double (alors 7 et 7 14, je retiens 1, 6 et 6 12 plus 1, 13) soit 134 années de bonheur...