lundi 30 juillet 2007

Ingmar Bergman

Ingmar Bergman - 14 juillet 1918 - 30 juillet 2007

Les temps sont durs pour les géants, pour tous ces chênes qu'on abat (pour reprendre une expression de Victor Hugo déjà empruntée par André Malraux). Je ne peux m'empêcher de penser, à voir disparaître l'un après l'autre autant de nos grands, à la fameuse tempête qui a fait tant de ravages dans le parc de Versailles, jetant par terre tant de géants qui avaient vu passer Marie-Antoinette...

Ingmar Bergman est l'un de ces grands du cinéma, qui a été le modèle et le mentor de nombreux autres réalisateurs ; j'en connais personnellement quelques-uns qui sont en deuil, aujourd'hui. Tous les Suédois n'aimaient pas se reconnaître dans ses films, mais il a sans aucun doute été, avec ses robustes voitures, le meilleur ambassadeur que la Suède n'ait jamais eu.

Je n'aurai vu que quelques-uns de ses nombreux films, souvent même à la télévision. Ce n'est pas forcément un choix réfléchi, mais deux titres me reviennent spontanément en mémoire. Le premier, c'est Les Fraises sauvages, un film de 1957 qui raconte l'histoire d'un vieil homme qui revoit son passé au moment d'aller recevoir un prix pour sa carrière ; on en parle ici et encore ici.

L'autre titre qui me revient évidemment en mémoire, c'est Fanny et Alexandre, film merveilleux qui parle de l'enfance, des relations difficiles avec le père et de la magie. J'en avais parlé un peu le 31 décembre 2005.

dimanche 29 juillet 2007

Adieu, Michel Serrault

Michel Serrault - 24 janvier 1928 - 29 juillet 2007

J'ai appris par le blogue de Vincent à l'Ouest la disparition, ce dimanche, du grand Michel Serrault et, comme lui, j'en suis très triste. On voudrait que vivent toujours ceux que nous aimons, ceux qui ont su nous faire rire, nous faire rêver, nous émouvoir...

Je n'ai pu m'empêcher de choisir la même image de Michel Serrault que Vincent a choisie pour illustrer son billet : c'est étrange que, lorsqu'il s'agit de trouver sur Internet de belles images des grands acteurs, on ne trouve souvent que de maigrichonnes images alors que l'on trouve de nos hommes politiques que l'on ne peut voir sans haut-le-coeur de grandes images à en tapisser les murs...


On a donné le nom de Michel Serrault à cette rose que je trouve absolument magnifique.

Je ne rêve plus...

Quand je disais, le 15 juillet dernier,
que mon look avait besoin d'être rafraîchi...


«Je ne rêve plus, je ne fume plus... », dit la chanson de Serge Lama.

Je n'ai jamais vraiment fumé, sauf pour faire comme les autres avant de comprendre que je pouvais être libre et autonome sans forcément adopter les rites tribaux. J'ai longtemps rêvé cependant et... hier encore, j'avais vingt ans... (oh, pardon, je m'égare : la chanson française a trop compté dans ma vie pour que je l'oublie) ; hier encore, disais-je, je pouvais passer des heures à rêver...

Or, depuis quelques semaines, je n'ai plus le temps de rêver. Je ne sais trop si je dois m'en plaindre ou pas car si la rêverie permet de voyager à bon compte, il n'en reste souvent pas grand-chose et le temps que nous avons employé à rêver n'a pas été très productif. Je n'ai plus le temps de rêver car je suis occupé à planifier, à organiser et à produire. Tout cela, c'est très excitant, mais c'est aussi très exigeant.

En choisissant de devenir mon propre patron, je savais ce qui m'attendait et, comme dit une autre chanson, (même si je n'habite pas « seul avec maman, rue Sarasate »), « le travail ne me fait pas peur ». La production ne me cause pas trop de problèmes, normalement, car j'avais l'habitude, même en étant salarié, d'accepter à l'occasion des mandats que je pouvais exécuter de chez moi. Sauf qu'à partir du moment où j'ai voulu officialiser mon statut de travailleur indépendant, je me suis inscrit dans un processus rigoureux qui exige, pour bien structurer le projet et mettre en place toutes les conditions de réussite, que je consacre 40 heures par semaine à mon projet (planification, statut juridique, études de marché, plan de communication, prévisions financières pour les trois prochaines années, etc.). Tout cela est en soi très intéressant et je m'amuserais à le faire si... je n'avais pas déjà des clients qui attendent les résultats de mon travail. Eux aussi ont leurs échéanciers... Et les journées n'ont que 24 heures, et les semaines, sept jours !

Il y a des moments où j'ai envie de décrocher, de faire le travail buissonnier, d'aller faire du vélo ou des courses au lieu de faire ce que je dois faire (et je me suis permis déjà d'aller dépenser de l'argent au lieu de travailler à en gagner : mon comptable me gronderait). Le problème principal, c'est que l'aménagement de mon appartement n'est pas adéquat pour le rythme de travail que je dois fournir. J'essaie d'y rémédier, mais je manque de temps. Même si je décidais de déménager rapidement, il me faudrait tout de même consacrer à ce projet du temps que je n'ai pas...

Je ne rêve plus, je ne dors plus beaucoup, parce que j'ai trop de projets en tête ; la différence entre les rêves et les projets, c'est que ces derniers ont des chances se concrétiser. Je n'oublie cependant pas que ces projets d'aujourd'hui sont, en partie, des rêves d'hier.

Non, je ne suis pas vraiment malade, si ce n'est pas être malade que de pas avoir le temps de rêver...

Je suis malade
Je ne rêve plus je ne fume plus
Je n'ai même plus d'histoire
Je suis sale sans toi je suis laid sans toi
Je suis comme un orphelin dans un dortoir
Je n'ai plus envie de vivre ma vie
Ma vie cesse quand tu pars
Je n'ai plus de vie et même mon lit
Se transforme en quai de gare
Quand tu t'en vas
Je suis malade complètement malade
Comme quand ma mère sortait le soir
Et qu'elle me laissait seul avec mon désespoir
Je suis malade parfaitement malade
T'arrives on ne sait jamais quand
Tu repars on ne sait jamais où
Et ça va faire bientôt deux ans
Que tu t'en fous
Comme à un rocher comme à un péché
Je suis accroché à toi
Je suis fatigué je suis épuisé
De faire semblant d'être heureux quand ils sont là
Je bois toutes les nuits mais tous les whiskies
Pour moi ont le même goût
Et tous les bateaux portent ton drapeau
Je ne sais plus où aller tu es partout
Je suis malade complètement malade
Je verse mon sang dans ton corps
Et je suis comme un oiseau mort quand toi tu dors
Je suis malade parfaitement malade
Tu m'as privé de tous mes chants
Tu m'as vidé de tous mes mots
Pourtant moi j'avais du talent avant ta peau
Cet amour me tue et si ça continue
Je crèverai seul avec moi
Près de ma radio comme un gosse idiot
Écoutant ma propre voix qui chantera
Je suis malade complètement malade
Comme quand ma mère sortait le soir
Et qu'elle me laissait seul avec mon désespoir
Je suis malade c'est ça je suis malade
Tu m'as privé de tous mes chants
Tu m'as vidé de tous mes mots
Et j'ai le cœur complètement malade
Cerné de barricades t'entends je suis malade.

Paroles : Serge Lama
Musique (quand il y en a) : Alice Dona
Interprétée sur cette vidéo par Dalida et Serge Lama.

mardi 24 juillet 2007

Il y a 40 ans...

Le 24 juillet 1967, le général de Gaulle, du haut du balcon de l'hôtel de ville de Montréal, faisait un bref discours qui n'était pas prévu au programme officiel. Arrivant de Québec par le Chemin du Roy, le général venait de recontrer le maire de Montréal, Jean Drapeau, qui avait inauguré quelques semaines plus tôt l'exposition universelle Expo 67. Il devait saluer la foule qui l'attendait devant l'Hôtel de ville, mais il ne devait pas prendre la parole. Devant l'enthousiasme de la foule, il a voulu leur dire quelques mots ; le maire de Montréal, qui aimait garder le contrôle, lui a dit qu'il n'y avait pas de micro. De Gaulle apercevant un micro dans un coin a demandé qu'on le branchât et il a prononcé le bref discours que l'on peut lire ici et voir et entendre sur cette vidéo :



La foule était enthousiaste, le gouvernement canadien indigné, le maire de Montréal embarrassé et le premier ministre du Québec Daniel Johnson, que de Gaulle appelait « mon ami Johnson », devait rire dans sa barbe, lui qui, devant l'historique inertie du gouvernement canadien envers les revendications du Québec, avait fait de l'« Égalité ou indépendance » son programme politique.

Les adversaires politiques du général de Gaulle l'ont accusé d'avoir maladroitement improvisé et d'avoir provoqué la plus grave crise politique entre la France et le Canada. Au maire de Montréal qui, le lendemain de cette célèbre déclaration, lui reprochait poliment de remettre l'Histoire en cause entre les Canadiens de souche française et ceux de souche britannique, de Gaulle, répondit : « Ensemble, nous avons été au fond des choses et nous en recueillons, les uns et les autres, des leçons capitales. Et, quant au reste, tout ce qui grouille, grenouille et scribouille n'a pas de conséquences historiques dans ces grandes circonstances, pas plus qu'elle n'en eut jamais jamais dans d'autres. » Moins d'un an plus tard, Pierre Elliott Trudeau devint premier ministre du Canada, il était encore furieux contre de Gaulle qui avait, selon lui, offert aux souverainistes québécois une vitrine internationale à leurs revendications politiques ; il tenta de forcer la France à rentrer dans le rang et de reconnaître l'unité politique du Canada. De Gaulle déclara alors : « Nous n'avons aucune concession, ni même aucune amabilité, à faire à M. Trudeau, qui est l'adversaire de la chose française au Canada. »

Dans son livre de souvenirs politiques intitulé C'était de Gaulle, l'ancien ministre gaulliste Alain Peyrefitte (dans un autre genre de littérature, je trouve le cousin de celui-ci plus amusant à lire) révèle que la déclaration du général n'était pas du tout improvisée et qu'il avait sciemment décidé de donner un coup de mains aux Québécois, sur le chemin de leur libération. Au cours de la traversée de Brest à Québec (le Général avait choisi de venir par bateau, ce qui lui permettait d'arriver directement à Québec sans passer par Ottawa), sur le Colbert, de Gaulle aurait confié à son gendre : « Je compte frapper un grand coup. Ça bardera mais il le faut. C'est la dernière occasion de réparer la lâcheté de la France. »

Bien sûr, il n'appartenait pas au président français de déterminer l'avenir politique et constitutionnel du Québec, mais son « Vive le Québec libre ! » était une façon de dire aux Québécois « Je vous ai compris ! » et cela donnait au mouvement souverainiste québécois une formidable reconnaissance internationale.

Depuis, après les moments forts de la volonté d'indépendance, après le référendum volé de 1995, les Québécois semblent préférer leur piscine gonflable dans la cour à la souveraineté politique, le « confort et l'indifférence », comme le souligne si bien un film de Denis Arcand. Ils préfèrent, pour l'instant, constituer dans le Canada une minorité ethnique et culturelle qui a de moins en moins de poids démographique et politique plutôt que d'affirmer leur autonomie de peuple adulte dans un Québec souverain. Ils se contentent maintenant de se faire dire par le premier ministre canadien qu'ils sont un sympathique groupe culturel au Canada plutôt que de s'affirmer politiquement et de joindre les Nations Unies en tant que peuple souverain, libre d'assumer fièrement et pleinement son destin.

jeudi 19 juillet 2007

Panne majeure

L'image vient d'ici

Je suis désolé : je n'ai pas pu lire les blogues amis, répondre aux commentaires ni rédiger de nouveau billet. Tout le réseau de la région de Montréal de mon fournisseur Internet (l'un des plus importants, sinon le plus important au Québec) était en panne depuis mercredi après-midi jusqu'au début de la nuit.

Toute une soirée sans Internet, c'est un peu déroutant.

J'en ai profité pour travailler sur mon plan d'affaires.

dimanche 15 juillet 2007

Au delà des apparences...

L'idée, de Laurent, est plutôt séduisante : chaque mois, le même jour, à la même heure, un certain nombre de blogueurs écrivent sur un sujet commun qui a été déterminé un peu à l'avance. Les billets sont publiés simultanément, en principe, le 15 du mois, à 6 heures, heure de Montréal.

Ce mois-ci sur le sujet « T'as le look ? », je vous invite à aller lire le point de vue de : Laurent, Bertrand, Jean-Marc, Lady Iphigénia, Julien, Bergere, Christophe, Isabelle, Pho, Hibiscus, Fred, Joël et Bluelulie. Normalement, il y aurait eu aussi Olivier de Montréal, mais, après avoir perdu plus de sept kilos, il est parti en reprendre un ou deux dans sa famille, en France, avant d'aller se faire bronzer en Grèce.

Je serai en retard pour mettre en ligne mon propre billet : j'ai dû travailler sur autre chose, tard samedi soir et une partie de la nuit. Le billet sera donc en ligne aujourd'hui, dimanche, mais un peu plus tard. Allez lire les autres et ensuite vous reviendrez, sans trop vous presser, car j'aurai bien cinq ou six heures de retard... Je suis désolé pour les lecteurs du dimanche : le billet n'aura vraiment été en ligne qu'à la toute fin de ce dimanche...


S'il est un sujet de conversation que j'essaie d'éviter, aussi bien en personne que dans les échanges sur Internet, c'est celui de l'apparence physique, du style vestimentaire. Quand on a proposé ce sujet pour la rédac' du mois, je me suis dit que je passerais mon tour, d'autant plus facilement que je suis débordé de travail et que je ne voyais pas pourquoi je ferais un effort pour écrire un billet sur un sujet qui m'énerve. Au moment où j'ai reçu le courriel d'Olivier, me rappelant que la date de remise du devoir approchait, je m'apprêtais à lui répondre de ne pas ajouter mon pseudo à la liste des participants du mois quand je me suis dit : « Pourquoi pas, au fond ? Je dois bien avoir quelques idées ou quelques humeurs à ce sujet ! » Cet accès d'optimisme date de quelques jours déjà et, depuis, bien de l'eau a coulé sous le pont... Jacques-Cartier *Note 1.

Quand un sujet nous énerve, il y a trois attitudes possibles : 1) ne rien faire, 2) prendre la fuite ou, 3) combattre l'« agression ». Je me souviens d'un jour où, devant faire un choix de cours à l'université, j'hésitais ; la responsable du programme me suggéra, pour compléter mon choix, de m'inscrire à un cours de création littéraire. Je lui répondis que cela me faisait peur de devoir écrire en classe, de faire lire mes textes, etc. ; elle me répondit fermement : « Justement ! Si cela vous fait peur, prenez ce cours ! » J'ai évidemment suivi son conseil et ce fut pour moi l'une des meilleures décisions de ma vie ; non seulement j'ai eu beaucoup de plaisir durant cette session universitaire, mais le plaisir s'est longuement prolongé... D'ailleurs, quand elle me voyait tourner en rond, comme si j'avais momentanément oublié ma raison d'être, l'une de mes collègues, femme sans diplôme mais d'une sagesse incroyable et qui, ce qui ne gâchait rien, m'aimait beaucoup, me disait qu'elle ne m'avait jamais vu si heureux que lorsque j'écrivais (elle m'avait d'ailleurs prêté sa voiture sport, un été, pour que je puisse, pendant les vacances, partir vers le Bas-Saint-Laurent, au pays de Victor-Lévy Beaulieu, participer à des ateliers de création dans un cadre bucolique). C'est son anniversaire très bientôt et, puisque le souvenir de cette septuagénaire m'attendrit, je vais l'appeler et l'inviter au restaurant, tiens...

Ne rien faire, c'est dangereux : on retourne alors l'« agression » contre soi et l'on développe des maladies psychosomatiques (ulcères, psoriasis, etc.). Quant à la fuite, tout dépend de la manière de fuir : il est évident que la fuite dans l'alcool, la drogue, les somnifères, ça ne fait qu'engourdir le mal et contribue à faire perdre le sens du réel. Certains vont fuir dans le travail, les voyages, les changements de partenaires, etc. ; ce n'est encore qu'une façon d'embellir son malheur en agissant sur les symptômes sans en régler la cause. En 1976, déjà, le biologiste et philosophe Henri Laborit publiait L'éloge de la fuite, dans lequel il recommandait notamment la fuite artistique, la fuite dans la création : la rage, la colère, la frustration se transforment en tableau, en roman, en photo ou en cinéma. Le processus devient alors un formidable instrument de catharsis qui profitera même aux lecteurs et spectateurs de l'oeuvre ainsi créée. Pour ceux qui s'intéressent davantage au cinéma qu'à l'écrit, rappelons qu'Henri Laborit a travaillé étroitement avec Alain Resnais à l'écriture et à la réalisation du film Mon oncle d'Amérique, (1980) qui traite notamment du fonctionnement du cerveau humain ; je vous recommande la lecture de cet article.

C'est dans cet esprit que j'ai accepté de participer au sujet du mois : l'apparence physique, la tenue vestimentaire... Voilà bien un long détour pour en arriver là, direz-vous avec raison. C'est qu'en fait, je tourne autour du pot, sachant bien que je devrai y plonger, mais reportant toujours le supplice ou le plaisir. Vous me connaissez : je suis parfois de ceux qui parlent, parlent, parlent, jusqu'à ce qu'ils aient quelque chose à dire... Je pourrais bien, après avoir rédigé ce long préambule, tout effacer et ne garder que ce qui se rapporte directement au sujet. Mais il me semble que, dans ce blogue, je ne peux pas ignorer les obstacles que je dois surmonter, les démons que je dois combattre pour arriver à paraître serein. Sans trop savoir comment j'allais traiter le sujet, n'avais-je pas déjà indiqué, il y a quelques jours, par le titre de mon billet, mon intention d'aller « au dela des apparences »...

Ces apparences, dont on recommande généralement de se méfier, elles ne sont pas toujours aussi trompeuses qu'on voudrait le croire. Des études en psychologie ont clairement démontré que les premières impressions sont déterminantes pour l'avenir d'une relation entre deux personnes, que cette relation soit sociale, amoureuse ou professionnelle. Il suffit, par exemple, de se présenter dans une tenue vestimentaire négligée à un entretien de recrutement pour que la perception du recruteur soit déjà défavorable, avant même que le candidat ait ouvert la bouche. Cette première impression négative n'est pas insurmontable : le curriculum vitae, les compétences démontrées, l'assurance avec laquelle le candidat participera à l'entretien, sa façon de s'exprimer, sa personnalité, etc., pourront contribuer à renverser la première impression, mais il se pourrait qu'il subsiste un doute dans l'esprit du recruteur sur la capacité du candidat à s'adapter au code vestimentaire de l'entreprise. Ce n'est là qu'un exemple, qui peut se répéter des dizaines de fois dans une semaine... Je dois dire qu'il me semble avoir toujours été, dans la très grande majorité des cas si ce n'est toujours, favorisé par la première impression (je ne parle évidemment pas de ma vie amoureuse des trois ou quatre dernières années ; le commentaire s'applique à ma vie professionnelle et pratique et ne tient pas compte des relations affectives ; et je n'ai pourtant pas à me plaindre des nouvelles amitiés établies récemment).

Personnellement, j'ai presque toujours été très soucieux de mon apparence et de ma tenue vestimentaire car j'ai toujours été conscient de moi-même et du regard des autres sur moi. Fils de l'institutrice et premier de classe, j'ai toujours cru que je devais donner l'exemple, précisément parce que les regards étaient tournés vers moi. Et s'ils ne l'étaient pas spontanément, quelqu'un (une institutrice, un professeur, le curé du village) faisait en sorte qu'ils le soient. Contrairement à Jean-Paul Sartre qui raconte dans Les mots, qu'il n'a pas eu de surmoi puisqu'il a eu la chance de ne pas connaître son père, j'ai longtemps eu un surmoi très présent.

Adolescent, à la campagne, je voulais être au moins aussi bien habillé que mes camarades les plus élégants. Plus tard, à Montréal, j'étais très attentif à la façon dont s'habillaient les jeunes hommes autour de moi. Je n'étais cependant pas de ceux qui trouvaient du plaisir à faire le tour des boutiques de vêtements à la mode toutes les fins de semaine. Il me suffisait d'avoir quelques vêtements de bonne qualité, adaptés pour diverses circonstances, sans plus. À 20 ans, j'osais un peu de couleurs, mais pas trop ; toutefois, je crois bien avoir été parmi les premiers de ma génération, parmi les « classiques », à porter avec un complet des chemises roses et des cravates colorées.

Le jour de mon arrivée à Paris, toute la journée j'ai cherché une chambre avant d'en trouver une en fin d'après-midi, près du métro Ranelagh ; à tous les hôtels où je m'arrêtais, on me demandait si j'étais journaliste. Inconsciemment, je devais projeter cette image de journaliste-reporter, avec mon imperméable beige au col relevé (que j'ai fini par échanger contre un très beau manteau de Pierre Cardin, très élégant ; au retour à Montréal, quelques mois plus tard, j'ai fait fureur avec ce manteau).

Comme j'étais sorti de ma gangue ou de ma chrysalide lors de mon premier séjour à Paris, je me suis peu à peu défait de mon surmoi pour construire peu à peu le Moi idéal et l'idéal du Moi. Pour résumer sommairement ces trois étapes, disons que le Surmoi, en psychologie, c'est l'espèce d'idée inconsciente que l'on se fait de l'autorité parentale, de la censure qui tempère nos pulsions en nous suggérant ce qui est bien ou ce qui est mal, selon l'éducation que l'on a reçue. Le Moi idéal correspond au cinéma que l'on se fait, faisant vivre intérieurement les héros que l'on voudrait être, accomplissant les actions merveilleuses dignes de notre idéal. L'idéal du Moi, quant à lui, serait ce que je rêve d'être ; il tient davantage compte de ma réalité pour tenter de tirer le meilleur parti de cette réalité. Mon style vestimentaire s'est adapté à cette réalité. J'étais déçu de ne pas pouvoir continuer de vivre à Paris, de ne plus trouver autour de moi le milieu favorable qui me permettait de me découvrir, de me révéler, de m'affirmer pleinement, mais, en dépit du milieu répressif, castrateur, envers tout ce qui se distinguait de la masse, je tenais à m'affirmer tel que j'étais, tel que je m'étais enfin révélé dans un contexte qui m'avait permis de le faire. Je me sentais souvent, à Montréal, comme un arbre qui aurait, durant une brève période, développé une arborescence magnifique, complexe et riche et qui, retransplanté dans son milieu d'origine, devait chaque jour renoncer à sa complexité et à sa richesse en raison de la rigueur du climat. J'avais le sentiment de devoir, jour après jour, m'amputer de mes plus belles branches, de mes plus beaux feuillages, cortar por lo sano, dirait Maria Casarès, « trancher dans le vif ».

En terme de tenue vestimentaire, cela s'est traduit par l'adoption du costume ou du veston sport, avec chemise et cravate, même pour aller à l'université quand j'ai décidé de m'y inscrire après avoir renoncé à faire carrière dans la chanson et m'être rendu compte que je ne savais rien. Je ne saurais dire pourquoi au juste, mais en pensant à cette époque, le nom de Musset (alors que je préfère Baudelaire) me vient à l'esprit. C'est peut-être que, comme je l'écrivais plus tôt, j'avais rapporté de Paris un superbe manteau de Pierre Cardin, qui n'avait pas son pareil à Montréal, c'est certain, et que la ligne élégante de ce manteau ne pouvait qu'attirer sur moi les regards connaisseurs ou amateurs. Et c'est sans doute que je revois en pensée un jeune homme venu s'asseoir devant moi dans le bus, un soir de décembre où je rentrais de l'université, que ce jeune homme vêtu de noir et « qui me ressemblait comme un frère », tout en me rappelant le poète, me renvoyait une image du Moi idéal : il était beau, d'une élégante simplicité, l'air intelligent et fin... Il y a des moments où l'autre, devant soi, si désirable soit-il, cesse d'appartenir au sexe incarné, quel qu'il soit, pour nous élever à l'amour des beaux esprits, cher à Platon (dans le cas de ce jeune homme, je ne m'étais pas encore hissé au niveau de l'âme).

Durant des années, donc, j'ai adopté l'uniforme assez classique du veston-cravate. Les couleurs étaient toujours très sobres pour les costumes et les vestons : marine, gris foncé. La coupe était toujours ce qu'il y a de plus classique : j'achetais mes vêtements chez Holt Renfrew (pas dans le plus cher) ou dans les grands magasins du centre-ville, parce que je savais y trouver un vaste choix sans devoir passer d'une boutique à l'autre. Les costumes, les vestons, sombres, portaient la plupart du temps les marques de Saint-Laurent, Dior ; je mettais plus de fantaisie dans les chemises et les cravates. Pendant quelque temps, j'ai acheté aussi des vêtements chez Old River, avec des coupes et des couleurs que j'aimais ; je ne me souviens plus pourquoi j'ai cessé d'y aller.

Il n'y a pas très longtemps, quatre ans peut-être, que j'ai laissé tomber le veston et la cravate dans ma vie quotidienne. Il m'arrive encore d'en porter à l'occasion ; deux fois par année, peut-être. Ces trois dernières années, cependant, il y a eu un grand relâchement en matière d'habillement et en matière d'apparence, de manière générale. Les seuls éléments de ma garde-robe que je n'aie pas négligés sont les chaussures ; j'aime bien les porter jusqu'à ce que mon cordonnier me dise que je dois les jeter, mais j'achète toujours des chaussures de très bonne qualité, à la ligne simple, confortables et durables.

Le fait de passer de longues heures assis devant un écran d'ordinateur n'est pas très bon, ni pour les yeux, ni pour la forme, ni pour la ligne, ni pour la tenue vestimentaire, tant que la caméra n'est pas obligatoire. Il est donc urgent que je m'inscrive au gymnase et, si possible, que j'aménage dans un immeuble où il y aura une piscine que je pourrai utiliser tous les jours. Après un minimum de remise en forme (en forme de quoi ? vous entends-je demander intérieurement : je vous interdis de penser à Érik Satie et à ses morceaux en forme de fruits), je vais commencer les courses pour constituer une nouvelle garde-robe car, en ce moment, je n'ai vraiment plus rien à me mettre sur le dos.

Quant à la coiffure, il doit y avoir quatre ou cinq ans que mon coiffeur m'a suggéré de lui donner congé. Il m'a conseillé l'achat d'une tondeuse qui fait en cinq minutes ce qu'il prenait un peu plus de temps à faire. Et en deux utilisations, j'ai déjà amorti le coût de la tondeuse. L'ennui, c'est que ma tondeuse ne parle pas italien et qu'elle ne connaît pas les champignons et la façon de les cuisiner comme les connaît mon dernier coiffeur.

Devrais-je vraiment m'arrêter ici ?

*Note 1 : En effectuant une recherche d'image du pont Jacques-Cartier, je suis immédiatement tombé sur cette photo prise par un garçon dont j'ai fait la connaissance sur Internet il y a déjà plusieurs années, que j'ai rencontré à quelques reprises, que j'ai un peu perdu de vue depuis quelque temps (ah ! ces étudiants : ils ne cessent de bouger) mais à qui j'ai récemment envoyé quelques mots pour souligner son anniversaire. Frédéric, merci de cette image que j'ai empruntée sans ta permission. Et si tu as encore mon numéro de téléphone...

samedi 14 juillet 2007

Bonne Fête nationale...

... à tous les Français...

... y compris Philippe de Villiers...


... et tous les Vendéens.

mercredi 11 juillet 2007

Médecine express



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À mon agenda, aujourd'hui, une visite chez le médecin qui voulait s'assurer que mon taux de fer dans le sang était plus élevé que la dernière fois. Le rendez-vous était pris depuis quelques semaines déjà et je sens que, en dépit du stress actuel, j'ai repris des forces ; j'aurais annulé ce rendez-vous si j'y avais pensé plus tôt mais, puisqu'il était trop tard pour l'annuler, je suis allé au rendez-vous.

Malgré le temps incertain, le mercure qui doit indiquer 30 degrés (la température ressentie est plutôt de 40 degrés Celsius en raison du taux d'humidité de 94 % ; il y a des orages violents dans l'air), j'ai pris le vélo, toujours plus rapide et plus agréable que le métro.

J'avais rendez-vous à 13 heures ; je suis parti à midi 40 et, à midi 52, j'étais à la réception de la clinique. La réceptionniste habituelle devait être en vacances, à moins qu'elle ne commence sa journée plus tard ; celle-ci m'accueille par nom nom quand j'arrive et je vais directement m'asseoir en attendant qu'on m'appelle. Aujourd'hui, il y avait une nouvelle réceptionniste, qui ne semblait avoir inventé ni la vitesse ni le stress ; j'ai donc attendu sept minutes à l'accueil.

J'ai à peine eu le temps de m'asseoir et de prendre le magazine sur la chaise voisine que mon médecin m'appelait. Contrôles habituels : tension artérielle, rythme cardiaque. Diagnostic : la tension est élevée et cela se comprend ; il m'a trouvé un peu pâle et me recommande de prendre des comprimés de multivamines. Il était content que je sois venu à vélo car il trouve que je ne fais pas assez d'exercice. J'ai beau lui dire que mes neurones sont hyperactifs et que mes doigts courent sur le clavier, ça ne semble pas l'impressionner (il est tout de même ravi de me voir enthousiaste, des projets plein la tête). Je lui ai dit que j'irais au gymnase dès que je trouverais un peu de temps libre, d'ici dix jours, sans doute. Et, le plus tôt possible, j'aménagerai dans un immeuble où il y a une piscine ; je pourrai alors y aller tous les jours.

À treize heures quinze j'étais sur mon vélo, en route vers la maison. Je suis passé par des rues fermées à la circulation en raison de l'un des nombreux festivals d'été ; ce doit être le festival Juste pour rire qui se prépare ces jours-ci. Les touristes sont nombreux à Montréal en ce moment : rue Sherbrooke, à quelques mètres de distance, trois personnes sont venues vers moi, en voiture ou à vélo, pour me demander comment se rendre dans le Vieux-port de Montréal. Avant treize heures trente, j'étais rentré chez moi, heureux de retrouver mon appartement climatisé. Dans le couloir, avant d'ouvrir la porte pour entrer, il faisait plus chaud et plus humide que sous ma douche une heure plus tôt.

Maintenant que j'ai écrit ces lignes, je vais m'armer de courage et sortir encore dans l'air chaud et humide pour aller m'acheter du saumon fumé ou quelque chose de frais et agréable à manger (des sushis, peut-être).

p. s. : « Mon docteur, il est beau mais il a au doigt un anneau... », dit la chanson. Moi je sais, cependant, que l'élu de son coeur est un homme. Ceci n'est pas un jugement : chacun est libre d'aimer qui il veut ; qui suis-je, pour le condamner ?

lundi 9 juillet 2007

Prière de ne pas déranger

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Appréciez au passage la qualité de la langue de ce site, rédigé en « francias »


Je ne serai pas disponible avant vendredi prochain, au plus tôt.

Mon bureau d'été ne me sert même plus !

Les mandats à respecter, les rendez-vous, les réunions, les ateliers de formation auxquels je dois participer, mon projet d'entreprise que je dois poursuivre, avec un échéancier très précis à respecter, les situations urgentes qui surviennent (il y a des coups de pied au c... qui se perdent ! D'ici quelques semaines, quand j'aurai le temps de les mettre à exécution, je vais prendre un certain nombre de décisions afin de me libérer de certains engagements), alors que la plupart des gens se préparent à partir en vacances ce jeudi soir, tout cela fait que je doive, moi, être partout à la fois.

Les seuls éléments de mon emploi du temps sur lesquels il me reste un peu de contrôle sont : les heures de sommeil, déjà peu nombreuses, et le temps que je passe à lire les blogues (assez peu en ce moment) et à rédiger le mien. Je ne sais pas encore si je pourrai réduire mes heures de sommeil, mais je vais prendre congé de ce blogue jusqu'à vendredi, au moins, afin de me concentrer sur mon travail.

Merci de votre compréhension. À bientôt.

p. s. : pour revenir sur les gens qui confient des mandats et qui veulent néanmoins tout contrôler (ce n'est pas trop le cas pour moi en ce moment, heureusement), vous pouvez lire, si vous le l'avez pas déjà fait, l'histoire de la composition par Jean de La Fontaine de sa fable « La cigale et la fourmi ».

samedi 7 juillet 2007

Humeurs variées ou... monologue sans intérêt



Hier matin, je m'étais levé tôt car je devais rédiger un contrat pour un mandat que j'ai obtenu et pour lequel la représentante du client tient à ce que les conditions soient écrites et que nous puissions nous rencontrer pour signer ce contrat. Je voulais envoyer le contrat par courriel avant son arrivée au bureau ; ce fut fait. Si elle s'imagine que je vais lui rendre compte tous les jours du travail accompli, elle se trompe. Elle me rappelle l'un de mes amis qui, lorsqu'il a besoin de mes services pour écrire une lettre, par exemple, croit m'aider en restant derrière moi, regardant par-dessus mon épaule et m'arrêtant à chaque fois que je saute une virgule. Comme si Louis XIV avait vraiment été utile à Le Nôtre en lui signalant chaque brin d'herbe qu'il aurait pu oublier pendant qu'il concevait les jardins de Versailles. Certains anxieux ne voient que le brin d'herbe manquant pendant que l'on élabore des chefs-d'oeuvre...

Après cet envoi, je ne voulais pas entreprendre immédiatement de travail qui demande trop de concentration car j'attendais quelqu'un qui devait passer prendre des clés que j'avais accepté de remettre au nom de quelqu'un qui était absent. Je voyais le temps passer et je commençais à m'impatienter car la personne n'arrivait pas ; j'attendais en silence car je craignais de ne pas entendre le timbre de l'interphone si la musique jouait. Et quand il n'y a pas de musique, la perruche la réclame. Finalement, une après l'heure convenue, j'ai reçu un courriel de la jeune femme que j'attendais pour me dire qu'elle ne pourrait pas passer...

La veille, alors que j'étais absent, j'avais reçu un message de ma jeune conseillère financière ; il y aurait encore des délais avant que je puisse toucher l'argent que j'attends. Elle devait obtenir de moi d'autres signatures et, disait le message, elle avait laissé dans ma boîte aux lettres le formulaire qu'elle me demandait de signer et qu'elle viendrait elle-même chercher. Avant d'aller me coucher, je lui avais envoyé un courriel disant que j'avais signé le formulaire et que j'aurais le plaisir de le lui remettre en main propre. Je dois dire que, depuis quelques semaines, nous nous sommes parlé au téléphone à plusieurs reprises, mais je ne l'avais encore jamais rencontrée. Elle est passée plusieurs fois laisser des documents dans ma boîte aux lettres. Or, dans mon dernier courriel, je lui proposais de l'inviter au restaurant pour la remercier de tout ce qu'elle fait pour moi depuis des semaines sans que cela lui rapporte un sou. Elle m'a répondu qu'elle ne pouvait accepter mon invitation car elle devait assister à une conférence en début d'après-midi. Elle est toutefois venue chercher le formulaire signé et nous avons parlé durant près d'une heure, de mes projets, de voyages, de piscine, de l'Italie (sa mère est italienne), etc. Dans ma vie, je n'ai connu qu'un seul autre conseiller financier qui soit aussi disponible pour ses clients. Ça change du service impersonnel que l'on reçoit habituellement dans les banques.

Après avoir mangé (seul), je suis allé faire quelques courses. Me voyant arriver, la pharmacienne m'a simplement demandé si je voulais tel médicament, sans même me demander mon nom ou que j'aie à lui remettre quoi que ce soit ; deux minutes plus tard, mon ordonnance était prête. En passant à la caisse, je me suis rendu compte que mes médicaments ne me coûtaient pas un sou ; j'imagine que le laboratoire pharmaceutique avait fourni gratuitement un certain nombre de boîtes du médicament pour souligner le changement de couleur de l'emballage. Et cette pharmacienne, d'origine asiatique, se souvient de mon nom simplement parce qu'elle a déjà eu un patron qui portait le même nom que moi et qui était, semble-t-il, particulièrement désagréable.

Depuis quelques semaines, je sens une pression énorme sur mes épaules. Je devrais consacrer tout mon temps à l'élaboration de mon projet professionnel. Or, j'ai déjà des clients qui attendent et, avec tout ce que j'ai en tête en ce moment, j'ai du mal à travailler efficacement. J'ai toujours envie d'être ailleurs, de faire autre chose que ce que je dois faire. Je n'éprouve donc pas beaucoup de plaisir car, si je m'accorde une distraction, un plaisir dérobé, je me sens coupable de ne pas être en train de travailler. J'ai refusé des invitations à manger dans de bons restaurants parce que je sais que je ne serais pas détendu et agréable. Je sens que je suis en train de devenir un adulte, trop adulte, et je ne suis pas sûr d'en être heureux.



Et ce soir, je pense à un ami qui fête ses quarante ans dans un théâtre parisien ; j'aurais aimé être là, pas pour tout le monde qui doit y être, mais pour le plaisir de le voir, lui, entouré et heureux.

Pour me consoler ou pour noyer ma nostalgie dans le sirop musical, j'écoute en boucle depuis un bon moment, une bonne chanson country (que je n'ai pas trouvée sur Radioblog ni sur YouTube), interprétée par Loretta Lynn, Dolly Parton et (diminuez un peu le volume) Tammy Wynette.

Maison natale de Loretta Lynn


vendredi 6 juillet 2007

Bonnet d'âne

Droit d'aînesse, de Benoît A. Côté

Entendu sur France Musique :
  • Esaü aurait vendu son droît d'aînesse pour des saucisses aux lentilles (encore heureux qu'il n'ait pas vendu son ânesse en plus).
  • Jésus a réussi l'exploit de réveiller un lézard mort depuis trois jours.
  • Et c'est Jésus qui le premier a eu l'idée de mettre de l'alcool dans l'eau pour la rendre potable.
Ah, que deviendrons-nous sans ces écoliers pour nous rappeler ainsi des éléments essentiels de notre culture ?

jeudi 5 juillet 2007

In memorian - Régine Crespin

Quand je suis arrivé à Paris, à l'âge de vingt ans, j'étais, comme bien des garçons de mon âge, un jeune homme qui pouvait plaire (je m'en suis surtout rendu compte à Paris), mais peu dégourdi et sans culture aucune. J'avais lu deux ou trois livres, je dis bien deux ou trois, et ma connaissance de la musique classique se limitait à l'Ave Maria de Schubert et celui de Gounod, que mon professeur de chant m'avait fait découvrir en les chantant pour moi seul durant une pause au milieu d'une de mes leçons. J'ai cependant eu la chance de retrouver à Paris André D., artiste lyrique devenu principalement régisseur de théâtre, que j'avais rencontré à Montréal chez mon professeur de chant, et de faire immédiatement partie de son entourage parisien.

Or, André avait une amie d'enfance, dont il était très fier, qui avait réussi sa carrière et qui avait encore de très belles années devant elle. Cette amie, c'était Régine Crespin, qu'il appelait sa « Star », avec un grand « S » majuscule, dont il me parlait sans cesse, me faisant entendre ses disques quand j'allais le chercher en après-midi dans son appartement du boulevard Montparnasse. J'écoutais Régine Crespin, et plus je l'entendais plus j'aimais l'écouter.

Régine Crespin (Marseille, 23 février 1927 - Paris, 5 juillet 2007)

J'ai eu le bonheur d'aller l'entendre en concert, une seule fois. Elle y interprétait, si ma mémoire est bonne, des airs de concert de Berlioz ainsi que les Chants d'Auvergne, de Joseph Canteloube. J'étais sorti de ce concert tout à fait séduit par sa voix qui me semblait plus chaude sur scène que sur disque, par sa présence.

Voulant prolonger le plaisir de cette soirée de concert, je me souviens avoir alors cherché des disques sur lesquels je retrouverais ces mêmes airs, mais je n'en avais pas trouvé. Encore aujourd'hui, les disques de Régine Crespin sont rares chez les disquaires, il me semble. Je ne sais pourquoi, mais j'ai toujours eu le sentiment que la grande soprano française était moins appréciée à Paris qu'ailleurs dans le monde. De 1976 à 1992, je crois, elle a enseigné au Conservatoire de Paris. Elle avait fait ses adieux à la scène à l'Opéra de Paris, en 1989. Signe de sa réputation, on a créé en 1990 une rose nommée « Crespin ».

L'image vient d'ici.

Il m'arrivait souvent de penser à Régine Crespin, parce que l'émotion de ce concert est restée bien présente en moi, mais aussi en souvenir d'André D. qui me l'avait fait connaître. Je ne sais pas ce qu'est devenu André car, un jour, il y a plusieurs années, une lettre que je lui avais adressée, à Paris, m'est revenue avec la mention « inconnu à cette adresse » (ou quelque chose d'équivalent).

Je n'allume jamais la radio, le soir ; depuis plusieurs jours, je n'allume plus la télévision non plus. Mais ce soir, au moment où je suis allé à la cuisine pour préparer quelque chose à manger, je ne sais pourquoi j'ai spontanément allumé la radio. J'ai aimé ce que j'entendais, sans savoir ce que c'était. Puis l'animatrice a révélé qu'il s'agissait de Régine Crespin, décédée ce jeudi, à Paris, à l'âge de 80 ans. C'était selon moi l'une des plus belles voix du XXe siècle.

mercredi 4 juillet 2007

Voix masculines

Qui n'a jamais éprouvé de frisson, de bonheur ou d'horreur, en entendant une voix ? Qui n'a jamais été séduit par la voix grave d'un chanteur comme Leonard Cohen, par exemple ? Si vous n'avez jamais entendu cette voix grave, zen dans sa « mâlitude », il faut au moins une fois dans votre vie accorder ce plaisir à votre oreille. Mais attention ! ce n'est pas sans conséquence : cette voix s'infiltre dans votre âme et l'envoûtement croît avec l'usage.

Leonard Cohen poète, écrivain, auteur-compositeur-interprète

Dans son billet d'hier, Vincent de Nantes disait son affection pour une chanson de Leonard Cohen, Dance me to the end of love ; je vous invite à aller l'entendre chez Vincent à l'Ouest. Commencez par celle-là...

J'écoute ce chanteur depuis de nombreuses années déjà et le fait que Vincent nous offre hier cette chanson m'a fait la réécouter de nombreuses fois et m'a donné envie de vous en présenter quelques autres que j'aime beaucoup (et je ne prétends pas les connaître toutes). Ses chansons sont reprises depuis longtemps par d'autres interprètes, notamment par Rufus Wainwright, Madeleine Peyroux.

Leonard Cohen est une vedette internationale. Il a vécu en Europe, a habité l'île d'Hydra, île sans voiture, en Grèce, durant sept ans, avant que ces îles soient devenues vraiment à la mode. Il a eu des appartements à Paris, à New York, a vécu dans un monastère en Californie, en est ressorti, a vécu depuis à Los Angeles, mais il a toujours conservé à Montréal, où il est né (« Nous naissons, [...] provisoirement, quelque part... », écrivait Rilke), une maison dans le quartier portugais, pas très loin de chez moi, et il y vivrait en ce moment, semble-t-il. Je l'ai plusieurs fois croisé dans la rue, mais pas récemment.

Si l'on veut l'entendre parler de sa vocation d'écrivain, on pourra regarder cet enregistrement vidéo fait en Norvège ; l'entretien est en anglais, avec les sous-titres en norvégien, je suppose (Hervé pourra le confirmer). Au sujet de l'écrivain, il y dit notamment qu'on n'est pas écrivain à moins qu'on y travaille, que la notion de travail est essentielle car, dit-il, le travail, c'est le lieu où l'on place le respect de soi, où l'on peut affirmer sa personnalité, et c'est aussi un moyen de gagner sa vie ; ces trois éléments font l'écrivain. Il y interprète également sa chanson I am your man.

L'une de ses chansons fétiches, inspirée par l'ancienne femme du sculpteur québécois Armand Vaillancourt, est sans doute celle à laquelle on pense le plus spontanément si l'on évoque Leonard Cohen. Cette interprétation nous permet de voir et d'entendre l'interprète alors qu'il était plus jeune et qu'il n'avait pas encore la voix grave qui fait son charme ; voici Suzanne.

Parmi mes chansons préférées, il y a celle-ci, plus rythmée, Closing time.

Si j'aime les voix graves, viriles, comme celle de Leonard Cohen, je suis aussi séduit par les voix masculines qui sont plus légères, plus fragiles, qui révèlent davantage les dimensions féminines de la sensibilité, de la personnalité. Je parlais l'autre jour d'une voix comme celle d'Yves Simon, par exemple. Pour rester dans les chanteurs qui sont nés à Montréal, chanteurs anglophones, même s'ils chantent parfois en français, je reconnais être séduit par certaines chansons de Rufus Wainwright. Le garçon est tombé dans la musique dès son enfance puisque tous les membres de sa famille faisaient et font de la musique. Il a du talent, il a une personnalité, il est séduisant et le fait qu'il assume ouvertement son orientation sexuelle fait de lui une icône qui, pour une bonne partie de son public, ajoute à son charme. Selon sa biographie, Rufus serait, paraît-il, par sa lignée paternelle, un descendant direct de cet homme :

Pieter Stuyvesant, ca 1660

Si mon ancêtre ressemblait à ce portrait, je crois que j'aurais envie aussi de vivre pleinement ma jeunesse comme semble le faire Rufus Wainwright.

Je n'écouterais pas ses disques durant des heures, mais je le verrais en spectacle avec plaisir (ce qui ne m'est pas encore arrivé). Il y a cependant l'une de ses chansons qu'à certains moments j'écoute en boucle ; elle porte le titre de « Greek song », mais je ne sais pourquoi. Elle a pour moi, dans ses arrangements, des accents de musique chinoise qui me plaisent beaucoup (il m'arrivait souvent d'écouter dans le métro de Montréal quelqu'un qui jouait de la musique chinoise et cette chanson de Rufus Wainwright me la rappelle). Voici un enregistrement vidéo de Greek song.


En complément de programme, tout en restant dans les voix masculines, je vous invite à faire un saut chez Fibula qui nous présente de la musique tunisienne, que j'adore. C'est ici.

Ajout du 7 juillet 2007 : Je voulais mentionner, et je l'ai oublié, qu'une chanson de Rufus Wainwright accompagnait le générique du film Brokeback Mountain ; cela m'avait supris et touché quand j'ai reconnu la voix de Rufus à la fin de ce film. Et en même temps, j'avais été choqué de voir les spectateurs se lever et quitter la salle durant le générique. Quand un film me touche, je n'ai surtout pas envie de partir en courant ; au contraire, j'aurais envie de rester là et que le film ou la musique, ou quelque chose, continue... Voici cette chanson :


mardi 3 juillet 2007

Anniversaires

C'était, hier, 2 juillet, l'anniversaire de naissance de mon premier Grand Amour. Je l'ai appelé pour lui offrir mes voeux et nous avons parlé de nos projets respectifs.


C'était aussi l'anniversaire de la mort de Jean-Jacques Rousseau, décédé chez son admirateur et l'un de ses derniers amis, le marquis de Girardin, au château d'Erménonville, le 2 juillet 1778. Il fut inhumé le 4 juillet sur l'île des Peupliers, dans le parc d'Erménonville qui porte désormais son nom. Les cendres du philosophe-écrivain ont été exhumées et transférées au Panthéon le 7 octobre 1794. L'île des Peupliers ne contient plus qu'un cénotaphe à la mémoire de Jean-Jacques Rousseau.

« Renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme. »
Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social

« Jamais on ne corrompt le peuple, mais souvent on le trompe,
et c'est alors seulement qu'il paraît vouloir ce qui est mal. »
Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social



Le 3 juillet 1608, Samuel de Champlain débarque à Québec. Je n'étais pas là pour l'accueillir car mon ancêtre paternel, né dans la paroisse Saint-Ouen-sur-les-Fossés de Le Mans (Sarthe, Maine, France), n'est sans doute arrivé en Nouvelle-France qu'au milieu des années 1650, puisqu'il s'est marié à Sainte-Anne-de-la-Pérade en mai 1658.


« Le 3 juillet, Champlain accosta à la « pointe de Québec » et y fit ériger trois bâtiments principaux, d'une hauteur de deux étages, entourés d'un fossé de 4,6 mètres de large et d'une palissade de pieux. Cet emplacement allait devenir la ville de Québec », nous dit Wikipédia.


Cette carte dessinée par Samuel de Champlain en 1611 nous présente la Nouvelle-France de l'époque.


En 2008, la ville de Québec célébrera le 400e anniversaire de la création de la ville. Certains amis n'ont pas attendu ces célébrations pour y faire la fête et pour vérifier le bon fonctionnement de la démocratie. Ils n'y parlent pas de la tête de... granit de la mairesse actuelle, la truculente Andrée P. Boucher.

lundi 2 juillet 2007

Premiers émois... picturaux

Dans le coin de campagne où j'ai grandi, il n'y avait pas de musée et s'il y avait des artistes, ils devaient ignorer eux-mêmes s'ils avaient quelque prédisposition. J'ai su qu'il y avait une bibliothèque municipale, mais elle était fermée ; sans doute parce qu'on a voulu économiser le salaire d'une personne responsable ; peut-être aussi que l'on avait jugé trop modeste le nombre de lecteurs intéressés.

Je ne parlerai pas maintenant de mes lectures car je dois le faire bientôt dans un billet que je dois rédiger pour répondre aux invitations, lointaines déjà, de Fuligineuse et d'Olivier. Je veux toutefois parler de mon premier dictionnaire. Ma mère enseignait et, avant chaque rentrée des classes, elle commandait quelques manuels. Je ne sais comment j'avais pu la convaincre, mais j'avais réussi à obtenir, à huit ou neuf ans, un dictionnaire dont j'étais très fier, un vrai dictionnaire pour adultes, le Nouveau Larousse classique.

Lorsque j'avais une composition à faire, je me souviens que je feuilletais mon dictionnaire pour trouver des synonymes aux mots trop courants qui me venaient spontanément à l'esprit. Ou encore, j'en parcourais les pages, à la recherche de mots inconnus de moi qu'il me plairait d'insérer dans ma composition. Un jour, par exemple, le souvenir m'en est encore très présent à l'esprit, je devais avoir neuf ou dix ans, je cherchais un nom à donner aux fleurs qui devaient entrer dans ma composition ; au lieu de les désigner simplement par le mot « fleur », j'avais décidé, grâce à mon dictionnaire, que des iris pousseraient près de la rivière ou j'allais me baigner. Je ne savais pas encore que, quelques décennies plus tard, le gouvernement du Québec ferait de l'iris versicolore son emblème floral.

Ce dictionnaire qui m'était un formidable lieu de découverte et d'apprentissage des mots, il devait aussi me faire découvrir des images intéressantes, mais j'en ai pas de souvenir précis avant l'âge de 11 ans.

Giorgione, La tempête

Cette année-là, je quittai l'école du rang pour aller au collège du village où il n'y avait que des garçons. Quand un jour je sortis de mon sac mon fameux dictionnaire, je suscitai la curiosité d'un camarade, puis d'un autre. Je m'aperçus alors que la curiosité intellectuelle de mes camarades était soudain animée d'un élan nouveau, qui ne devait sans doute pas grand-chose au vent Paraclet.

Mon dictionnaire circulait entre les mains de mes camarades à la façon d'un magazine obscène dans une caserne militaire. L'un d'eux avait découvert le tableau de Giorgione où l'on voyait une femme nue donner le sein à son enfant. Dès lors, cette image se grava dans ma mémoire, intrigué que j'étais de l'intérêt de mes camarades pour la peinture italienne du XVIe siècle.

D'autres images attirèrent mon attention. Je n'ai pas de souvenir précis de l'ordre dans lequel mon intérêt se porta vers l'une ou l'autre des images que contenaient mon dictionnaire. Il faut dire qu'en général les images en étaient assez pudiques, comme ce portrait présumé de Madeleine de Bourgogne, présentée par sainte Madeleine.

Le Maître de Moulins, Sainte Madeleine

Les nus de Michel-Ange étaient encore assez rares dans cette édition et les diverses représentations de saint Sébastien percé de fèches n'étaient pas encore à la mode. Je me souviens toutefois de celui de Mantegna.

Andrea Mantegna, Saint Sébastien

Devenu adulte, bien des années plus tard, j'ai eu l'occasion de prendre la parole devant une centaine de personnes réunies dans le sous-sol de l'église d'une paroisse Saint-Sébastien. Avant d'entrer dans le vif du sujet de mon allocution, je m'étais autorisé, à la grande joie du curé, à rendre hommage au saint patron de la paroisse. La peinture joue parfois bien son rôle, celui d'émouvoir et de stimuler la curiosité et de favoriser le développement des idées, nobles ou pas...

Si vous avez quelques minutes encore et que cela vous amuse d'essayer d'identifier des peintres et leurs oeuvres, voici une vidéo qui présente des peintres italiens, de Giotto à Modigliani ; les images défilent parfois trop rapidement pour nous puissions identifier l'oeuvre exactement, mais on se rend compte que certains peintres ont plusieurs oeuvres qui se suivent ; on peut essayer de trouver le titre quand on a déjà identifié le peintre. Cest ici.

dimanche 1 juillet 2007

1er juillet - 1867-2007 : 140 ans d'imposture !


En 1867, les Canadiens-français que nous étions alors et qui occupions le Bas-Canada, avons négocié de bonne foi avec les habitants du Haut-Canada un partenariat politique et économique, donnant naissance à la confédération canadienne.

De bonne foi, les Canadiens-français que nous étions avons cru à la bonne foi de nos partenaires d'origine britannique. De bonne bonne foi, nous avions négocié d'égal à égal un partenriat où les deux parties seraient égales ; il s'agissait d'un partenariat entre deux États, entre deux nations.

La bonne foi n'a pas duré longtemps. Le Canada nouveau, fort de ses nouveaux pouvoirs, a mis en application les recommandations du rapport Durham, celles de noyer les Canadiens-français dans le nombre des Canadiens d'origine britannique. Dès lors, le Canada a favorisé l'immigration massive de personnes d'origine britannique. Il y a près d'un siècle et demi, c'était déjà par dizaines de milliers qu'ils arrivaient chaque année. De majoritaires qu'ils étaient chez eux, les Canadiens-français sont vite devenus minoritaires dans un pays de plus en plus britannique qui ne respectait même plus l'accord négocié et signé entre les deux nations fondatrices. De nation fondatrice, les Canadiens-français sont vite devenus un groupe minoritaire dont l'égalité n'était plus reconnue.

Depuis 1867, la négation de cette égalité et le refus de reconnaître la nation canadienne-française (on ne parlait pas encore de Québécois ; le citoyens du Québec ont commencé dans les années 1960 seulement à se désigner ainsi) se sont perpétués. 1867 a institutionnalisé le statut minoritaire des Canadiens-français d'un Canada britannique où tout se passe en anglais. Encore tout récemment, en 2007, le gouvernement canadien a exempté les hauts gradés de l'armée canadienne de l'obligation de comprendre le français, abolissant des décennies de luttes des francophones pour se faire reconnaître le droit d'exister au sein de l'armée et d'avoir accès aux promotions. Les hauts gradés n'ayant plus l'obligation de connaître le français, toutes les communications se feront donc en anglais ; c'est-à-dire que les francophones devront forcément travailler en anglais. Et la ministre canadienne responsable de la francophonie, une bonne québécoise représentant la région de Québec, ne trouve rien de mal à cette nouvelle politique ! She is so sweet ! Une potiche à un dollar (fabriquée à Taïwan) ferait aussi bien l'affaire et les Canadiens feraient l'économie d'une limousine.

Les Canadiens de souche britannique se sont donnés tous les postes clés, tous les leviers économiques et politiques, marginalisant les Canadiens-français comme s'ils étaient des réfugiés écoomiques ou politiques. De plus en plus, on (les) nous a traités comme une minorité culturelle comme les autres, ces minorités culturelles si chères au premier ministre canadien Pierre Elliott Trudeau (PET) qui, de 1968 à 1984, n'a pas trouvé assez d'occasions de faire comprendre aux Québécois qu'ils avaient autant de chance de s'épanouir dans le Canada que les Ukrainiens ou les Polonais de l'Ouest canadien. Il faisait simplement semblant d'oublier que les Canadiens-français, dont descendait son père, avaient été l'un des peuples fondateurs de ce pays et qu'ils méritaient un peu mieux que l'étiquette de minorité culturelle.

Dès 1871, le Canada abolissait le français langue d'enseignement au Nouveau-Brusnswick (au printemps 2007 encore, le propre fils de ce fameux PET, Justin, nouveau sauveur autoproclamé de l'unité canadienne, n'a rien trouvé de mieux à dire aux francophones du Nouveau-Brunswick qui ont péniblement reconquis au fil des ans une reconnaissance de leur langue, qu'il serait plus économique d'abandonner leur système d'éducation francophone).

En 1837, les représentants de Sa Majesté britannique pendent et fusillent des Patriotes au Québec. En 1885, on pend Louis Riel au Manitoba. En 1890, on abolit le français au Manitoba. En 1912, le Canada abolissait les services français en Ontario... La survie du français et des Canadiens-français eux-mêmes à l'intérieur de ce pays britannique ne se fait, encore et toujours en 2007, qu'au prix d'efforts de tous les instants.

En 1967, un général français a le courage et la générosité de briser les sacro-saintes règles de la diplomatie et, du haut du balcon de l'Hôtel de ville de Montréal où il ne devait même pas s'adresser à la foule massée devant, il lance spontanément ce que les Québécois veulent entendre, ce cri du coeur qui a indigné les représentants de Sa Majesté mais qui a donné déjà une légitimité à la lutte des Québécois pour la défense de leur langue et de leur culture et une certaine reconnaissance avant l'heure de leur pays... en retard sur son horaire. L'un des grands tribuns de la souveraineté du Québec, soldat mal aimé des institutions à cause de son caractère flamboyant capable d'électriser les foules, Pierre Bourgault, commente ainsi le cri du Général.

En 1970, le premier ministre canadien Pierre Elliott Trudeau, le fameux apôtre de la Justice et de la Liberté, suspendra toutes les libertés individuelles et enverra l'armée au Québec sous prétexte de combattre une insurrection armée, alors que tout au plus une dizaine de personnes causent quelques perturbations. Plusieurs centaines de personnes, artistes, écrivains, chanteurs, poètes, seront emprisonnées durant des semaines sans savoir de quoi on les accuse, simplement parce qu'on les soupçonne d'avoir des sympathies souverainistes (c'est alors la moitié du Québec qu'il aurait fallu emprisonner si les agents de Sa Majesté avaient un peu compris le Québec). Comme le disait si bien René Lévesque, le plus grand démocrate que le Québec ait connu : « La loi des mesures de guerre imposée au Québec en 1970, sans doute inspirée d'une grande panique de l'Establishment britannique à Toronto (principal appui au gouvernement canadien), est la pire humiliation qu'ait jamais imposée une démocratie à une population en temps de paix. »

Malgré tout, on en rit. On veut agir comme s'il s'agissait d'une rigolade organisée par des étudiants pour épater leurs amis. Quand les journalistes, tout de même un peu conscients que nous n'étions pas sous la dictature franquiste, demandaient au grand démocrate canadien Pierre Elliott Trudeau comment, en tant que premier ministre du Canada, il pouvait justifier l'abolition de toutes les libertés civiles et justifier la présence de l'armée canadienne à toutes les intersections et devant tous les immeubles à Montréal, celui-ci répondait de son ton habituel si méprisant dès qu'il s'agissait du Québec, que si nous n'avions rien à nous reprocher, nous ne risquions pas de nous faire faire mal par les soldats armés jusqu'aux dents. Belle moralité, chez ce grand homme !

Si vous voulez avoir un aperçu du ton sympathique de ce grand démocrate, flamboyant célibataire milionnaire qui aimait se donner en spectacle, voici un extrait des réponses qu'il donnait à quelques journalistes qui l'attendaient à l'entrée du parlement ; c'était en octobre 1970 (c'était sans doute le 17 octobre).

En 1982, afin de respecter un engagement envers le Québec de rapatrier et d'amender la Constitution canadienne que Sa Majesté conservait sous ses jupes à Londres, le même Pierre Elliott Trudeau modifie bel et bien la Constitution mais... sans l'accord du Québec. Voulant supposément rallier le Québec à une constitution modernisée, le Canada n'a rien trouvé de mieux que d'en exclure le Québec. On pourrait donc dire que, depuis 1982, le Québec ne fait plus partie du Canada, puisqu'il n'a jamais adhéré à la constitution qu'on a voulu lui entrer de force dans la gorge, de façon moins subtile, moins insidieuse, que celle de tous les hommes politiques anglophones avant lui. Le lièvre qu'il était avait un tempérament de coq ; plus Elliott que Trudeau, il lui suffisait de voir un Québécois devant lui pour se hisser sur ses ergots et, la crête rouge et le regard de feu, s'apprêter à lui sauter au visage ou, comme il l'a fait déjà, aux parties sensibles d'un être humain mâle. Son homme de main, qui a vagument tenté de marcher dans ses pas par la suite, le premier ministre Jean Teflon Chrétien, lui ressemblait en cela : il n'a rien trouvé de mieux, pour répondre intelligemment à un chômeur qui protestait contre les politiques de son gouvernement, que de le prendre à la gorge et de tenter de l'étrangler avant de le repousser violemment.

Lors du référendum de 1995 sur l'accession du Québec à la souveraineté, le Parti Libéral canadien de Pierre Elliott Trudeau et de Jean Chrétien, ce dernier ayant été l'homme de main du premier et lui a succédé au poste de premier ministre du Canada, ont illégalement et frauduleusement dépensé des dizaines de millions de dollars pour faire croire aux Québécois que le Canada les aimait. Alors qu'au Québec la loi sur les Consultations populaires réglemente très rigoureusement les dépenses électorales, le gouvernement du Canada a dépensé sans compter et a financé illégalement des organismes illégaux chargés de combattre l'option souverainiste. Le vice-président du comité du Non (à la souveraineté) était l'actuel premier ministre du Québec, Jean Charest, venu finir à l'Assemblée nationale du Québec sa besogne d'étouffement de toute identité et de toute fierté québécoise. L'enquête du Directeur général des élections du Québec sur les dépenses frauduleuses faites par le camp de Jean Charest et de Jean Chrétien, premier ministre canadien d'alors, s'est terminée en queue de poisson, comme toute tentative de véritable négociation avec le gouvernement du Canada et comme toute tentative d'obtenir des explications crédibles en cas d'abus trop flagrants de manipulation et de fraude, parce que ce gouvernement canadien refuse d'y participer, laissant entendre qu'il se situe au-dessus des lois adoptées par l'Assemblée nationale du Québec.

Plus je fouille l'histoire du Québec et de son mauvais mariage avec le Canada, plus je constate que, depuis 1867, le Québec se fait humilier, voler, bafouer, etc., par le gouvernement canadien, à très forte majorité anglophone, à l'image du Canada lui-même. Et l'on voudrait que, moi, Québécois, je célèbre la fête de cette imposture ? Non, merci. Je respecterai le Canada, pays anglais, quand il me respectera, et d'autant plus facilement quand il sera un un pays voisin.

Vive le Québec... libre, si possible !

Pour entendre l'un des meilleurs premiers ministres du Québec parler sommairement de ces questions, et de façon courtoise puisqu'il est invité à la télévision française, je vous invite à regarder cette vidéo de René Lévesque, qui a dû être enregistrée entre 1980 et 1981.

René Lévesque répliquait ici à l'un des nombreux épouvantails que les défenseurs de l'unité canadienne ont toujours invoqué pour convaincre les Québécois de renoncer à la souveraineté : « Si vous votez pour la souveraineté, vous allez perdre votre passeport » (que le premier ministre actuel du Québec continue de prononcer passepart, comme si c'était plus chic de parler de part que de port) ; ou « Si vous votez pour la souveraineté du Québec, vous ne recevrez plus votre pension de vieillesse » (le gouvernement canadien administre ce programme de pensions, mais ce sont les citoyens qui le financent) : ce devait être en mai 1980, mais le même genre d'arguments idiots continuent d'être invoqués en 2007 ; voilà.

Et pour finir en musique, sur un ton pas forcément plus réjouissant mais sur un air plus entraînant, voici une chanson que le groupe Les Cowboys fringants a enregistrée en hommage à cet ancien premier ministre du Québec, décédé le 1er novembre 1987. Le tutoiement, ici, n'est pas du tout irrespectueux, pas plus que le surnom de Ti-Poil que l'on donnait affectueusement à l'homme politique qui a plus fait pour les Québécois en une décennie que des successions entières de premiers ministres. C'est ici.