lundi 12 mai 2008

Est-ce vraiment un sacrifice ?

On ne se rend peut-être pas compte à quel point l'avènement d'internet a révolutionné nos vies. Il m'arrive assez souvent d'y songer. Quand je pense que durant plus de huit ans, je n'ai pas eu de téléviseur chez moi et, lorsque j'ai décidé d'en acheter un pour suivre un peu plus l'actualité culturelle (l'émission Apostrophes, notamment), j'ai acheté un petit téléviseur noir et blanc. Pendant plus de vingt ans, je n'aurai écouté chez moi que de la musique classique, sur disques ou à la radio.

La modernité est entrée dans ma vie le 5 août 2000 par le biais d'Internet. Je l'ai raconté déjà dans un billet, le jour même où j'ai été connecté, je suis tombé par hasard sur un réseau au sein duquel je me suis fait de nombreux amis dont certains sont restés. La plupart d'entre eux étaient loin de chez moi, en Europe, aux États-Unis, en Amérique du Sud, etc. Puis il y a eu un garçon de Québec qui, je l'ai raconté aussi, est venu poursuivre ses études à Montréal et s'est installé dans l'appartement voisin du mien ; son appartement était sa chambre alors que le mien était pratiquement devenu notre espace commun puisqu'il y était comme chez lui (et j'étais loin de m'en plaindre). Son départ a laissé un vide immense quand, après cinq ans, sa carrière professionnelle débutante l'a conduit au Danemark, puis à Las Vegas et ailleurs... Par l'intermédiaire de ce blogue, j'aurai fait la connaissance de quelques personnes que j'ai rencontrées dans la vie ; il y en a encore quelques-unes, pas si nombreuses, qui vivent à Montréal et que j'aimerais bien rencontrer.

Ces derniers mois, pour diverses raisons dont je parlerai peut-être un jour, je me suis réfugié sur mes terres intérieures. J'ai toutefois rencontré, il y a quelques semaines, un charmant garçon venu de Paris passer une semaine à Montréal ; j'ai fait la connaissance de Nicolas, beaucoup plus sympathique et intéressant que l'idée que j'avais pu m'en faire à la lecture des notes assez laconiques de son blogue. Nicolas aime plutôt les filles, mais je ne suis pas sectaire ; s'il le veut bien, je le reverrai avec grand plaisir, à Montréal ou à Paris...

En plus de la connaissance, virtuelle ou réelle, de plusieurs personnes que je n'aurais jamais connues sans Internet, cette technologie m'a permis de découvrir beaucoup de musique que je ne connaissais pas et de réentendre des airs connus auxquels je n'avais pas accès. J'ai passé quelques nuits à écouter de la musique pendant que quelqu'un d'autre, de l'autre côté de l'Atlantique, écoutait exactement la même chose au même moment. Élise se souviendra certainement des chaudes larmes que nous avons versées certains soirs ; quand je l'ai vue, chez elle près de Liège, il ne restait de ces complicités que des étoiles dans ses yeux, sur ses lèvres que le sourire, dans son cœur que la joie de nous retrouver. J'ai aimé beaucoup de musique qu'écoutait mon jeune voisin. Il en est souvent pour moi, avec la musique ou bien d'autres choses, comme les blés pour le Renard du Petit Prince ; ça ne me dit rien jusqu'au jour où quelqu'un que j'aime les aime. Dès lors, je me laisse très facilement apprivoiser...

Samedi et dimanche, je me suis senti un peu comme un célibataire d'occasion, sentiment que je n'avais pas éprouvé depuis si longtemps. Vous savez, ce sentiment qu'éprouve le jeune marié, par exemple, quand sa femme est absente pour un jour ou deux : il sent sa présence partout dans la maison, mais il est laissé à lui-même, libre et responsable de la gestion de son temps, de ses activités. Ce n'est pas désagréable, juste un peu déroutant. Ne sautez pas tout de suite aux conclusions ; les mots ont encore un sens et je ne suis pas ce jeune marié (si je me marie un jour, je vous en parlerai). Je voulais simplement en venir au fait que, samedi et dimanche, je me suis mis à écouter Elton John comme je ne l'avais écouté auparavant. Il y a du bon à rester décalé dans le temps : je peux me permettre de découvrir et d'aimer des musiques que la plupart des gens ont déjà oublié depuis longtemps.

J'ai donc écouté un grand nombre de chansons d'Elton John, en fichiers mp3 ou en vidéos sur YouTube ou Dailymotion. Deux d'entre elles (« Sacrifice » et « Nikita ») m'ont particulièrement attiré, au point de les écouter en boucle pendant très longtemps, samedi soir, et de recommencer le dimanche après-midi... Pourquoi ces deux-là en particulier ? Je ne sais pas exactement. Pour la mélodie, sûrement ; pour les arrangements musicaux, pour la voix d'Elton John que j'aime beaucoup, que je trouve émouvante (qui d'entre-vous n'a pas pleuré en le voyant à la télévision chanter « Candle in the Wind », devenue pour l'occasion « Goodbye England's Rose », à l'enterrement de la princesse Diana ? On peut revoir ce moment en vidéo sur Dailymotion). J'accorde ici plus d'importance à la mélodie et à l'interprétation qu'aux paroles elles-mêmes. Il y a dans ces deux chansons, il me semble, le sentiment d'une absence, l'appel touchant d'un bonheur espéré, l'imploration d'un absolu à venir. Quelle qu'en soit la forme, la chanson n'est-elle pas toujours une façon de prier ?

Dans ces vidéos, on perd beaucoup de la qualité sonore, il me semble. Chez moi, en écoutant les fichiers mp3, j'aime monter le volume ; les hauts-parleurs branchés sur mon ordinateur sont de très bonne qualité. La perruche ne s'en plaint pas : elle a elle-même abondamment chanté et dansé sur ces deux airs.



8 commentaires:

V à l'Ouest a dit…

Oui, internet est une sacrée ouverture sur le monde, sous bien des aspects. Je lui dois une fière chandelle. Et à propos de chandelle, celle dans le vent ne m'a pas fait pleurer.

Anonyme a dit…

Ne payons nous pas cette évolution par une moindre attention portée à l'humble réalité qui nous entoure ? Ne recherchons nous pas sur la Toile, systématiquement, ce qui nous ressemble, au détriment de ce qui s'oppose à nous, et pourrait nous faire évoluer ? Ne privilégions nous pas l'extraordinaire, en lieu et place du réel ? Internet n'est pas criticable en soi, bien sûr. Mais c'est aussi une machine à fabriquer de la cécité. Un fil tendu entre les êtres - et qui, par conséquent - fait aussi de fort convenables croche-pieds.
Ta perruche a fort bon goût.

Unknown a dit…

Je n'ai jamais rencontré personne rencontré sur internet. C'est plus un moyen de garder contact avec des gens à l'autre bout du monde dont je n'aurai plus de nouvelles sinon.

Un de ces jours, quand je serai sorti de mon marasme et que je serai parlable, peut-être qu'on se rencontrera! ;)

Alcib a dit…

V à l'Ouest : sans Internet, on ne serait même pas en train d'être d'accord sur ce point ;o)

Delest : Je suis sensible aussi à cette façon de voir les choses. Ne pourrait-on toutefois pas dire la même chose d'autres types de technologie et même d'autres lieux de fraternisation ?
Quand ma perruche a su quel grand amateur de poésie lui faisait le compliment, elle ne se tenait plus de joie.

Erwan : Il te reste donc des choses à expérimenter.
Tu es sûrement aussi parlable que je le suis. Aussi bien battre le fer pendant qu'il est chaud ;o)

Anonyme a dit…

J'ai beaucoup aimé ton texte sur la musique et les émotions que l'on peut ressentir. En ce qui me concerne, j'observe que les mêmes morceaux ont des effets très différents sur moi, selon le moment et l'état d'esprit dans lequel je me trouve.
J'aime de nombreux styles de musique. "Peer Gynt" de Grieg m'émeut beaucoup mais je crois que ce qui m'a le plus touché dans ma vie, c'est le chant choral [durant plus de 10 ans].
Laisser passer la vibration dans le corps avec tout son souffle et se laisser imprégner des harmonies qui nous entourent, surtout à 4 voix mixtes... des frissons sur la peau... la fébrilité musculaire... la sensation de puissance et de vie que ça donne... les frissons me reviennent en l'écrivant. Je rends grâce à la vie d'avoir pu profiter de cette expérience.
Comme d'habitude Alcib, tu m'emmènes dans ma vie intérieure avec tes messages. Merci

Danaée a dit…

Cher Alcib, moi aussi, j'ai trouvé sur la Toile bien des avantages (mon Amoureux et mon boulot actuel, notamment!) J'ai également rencontré certains blogueurs (euses) avec qui j'avais des affinités. Je trouve que le virtuel n'est qu'un outil de plus pour alimenter la vie réelle. Et j'espère que nous aurons un jour l'occasion de nous croiser de l'autre côté de l'écran...

Je ne peux pas dire que je sois une fan d'Elton John, cependant. Mais écouter tes vidéos m'a replongée dans ma "folle" jeunesse de la fin des années 80. Soupir... Ô temps, suspend ton vol, comme dirait l'autre...

Amicales salutations!

Nicole a dit…

Ah....quel joli billet. On sent vos émotions et l'amour que vous avez pour la musique. On arrive à ''effleurer'' l'émotion. J'aime vos petites ''confidences''. Oui, j'aime bien lorsque vous laissez votre côté cartésien de côté et que vous laissez place à vos émotions. J'ai vu Elton au Colisée de Québec,il y a quelques années. C'est un pianiste exceptionnel et un grand compositeur, mélodiste, chanteur...

Anonyme a dit…

Je connais déjà ces 2 morceaux de musique mais pas les clips. Super les 2 séquences. J'ai passé un bon moment sur ton blog, mais sans ta présence, même virtuelle. :-(