dimanche 22 août 2010

Inquiétudes

Lundi dernier, c'était l'anniversaire d'un ami, Michel, qui habite juste au nord de Montréal (ainsi que l'anniversaire d'Erwan, l'ami français avec qui je suis allé quelques fois prendre un verre l'été dernier, alors qu'il était de passage à Montréal). J'avais tenté de joindre Michel au téléphone dimanche dernier, la veille de son anniversaire ; il n'était pas chez lui : je lui ai donc envoyé mes voeux par courrier électronique. Il les a reçus en arrivant au bureau le matin de son anniversaire, et il m'a envoyé un mot pour me remercier. (J'avais aussi envoyé un message à Erwan, qui m'a très gentiment répondu en me donnant de ses nouvelles ; on peux donc affirmer que les voeux d'anniversaire, s'ils sont envoyés par courrier électronique, parviennent aussi vite à destination en France qu'à Montréal).

Comme c'est mon anniversaire neuf jours après le sien, Michel avait décidé vendredi de m'inviter chez lui le lendemain, avec d'autres de ses amis. Vendredi après-midi, pendant que j'étais parti à la bibliothèque, Michel a laissé chez moi un message vocal. Je suis rentré tard et comme mon téléphone ne sonne pratiquement jamais, je n'ai pas vérifié si j'avais des messages.

Ce matin (dimanche), le téléphone m'a réveillé tôt. Comme le répondeur, toujours branché, se met en marche au deuxième coup de sonnerie, je n'ai pas pris la peine de me lever ; je ne veux pas laisser croire qu'on peut m'appeler tôt le matin, surtout le dimanche, pour me parler de la pluie et du beau temps. J'aime me lever tôt justement pour lire ou écrire avant que ne commence l'agitation de ceux qui ne peuvent jamais rester tranquilles ni respecter la paix d'autrui.

En me levant, j'ai pris connaissance des deux messages : celui de vendredi, (dont j'ignorais l'existence) pour m'inviter le lendemain, et celui de ce matin, beaucoup plus sérieux,; Michel se disait inquiet car il n'avait pas eu de mes nouvelles « depuis longtemps » et il aimerait que, si quelqu'un écoutait ce message, on l'appelle pour lui donner de mes nouvelles.

J'ai rappelé plus tard, après avoir pris mon petit déjeuner et lu un moment. Michel n'était plus là (il ne peut pas rester en place). L'ami qui partage la maison avec lui m'a expliqué que Michel était très inquiet. Samedi midi, ils sont venus tous les deux sonner chez moi. J'étais sorti faire des courses mais, même si j'avais été là, n'attendant personne, je n'aurais pas répondu. Ils sont repartis plus inquiets encore. En passant devant un poste de police, ils sont entrés et ont demandé si la police pouvait faire quelque chose... (Heureusement, les policiers ne sont pas venus enfoncer la porte de l'appartement !) On leur a expliqué que si j'avais été victime d'un accident ou d'un malaise, c'est la famille qui aurait été prévenue... De plus en plus inquiet, Michel voulait s'arrêter dans une église pour... allumer un cierge. Avec les amis qui l'accompagnaient, il était déjà en train de composer mon éloge funèbre.

J'écoutais tout cela et je ne savais pas ce que je devais penser. C'est rassurant de savoir que j'ai au moins un ami qui peut s'inquiéter de mon sort (il a déjà été échaudé : il y a quelques années, un ami commun est décédé à Paris et, si nous n'avions pas fait une enquête, nous n'aurions même jamais su qu'il était décédé : la famille n'a pas jugé utile de prévenir les amis). Mais c'est aussi très inquiétant d'apprendre que si l'on ne répond pas immédiatement aux messages d'un ami, on risque de voir arriver chez soi les policiers, les pompiers, les ambulanciers, le serrurier... alors que l'on voudrait simplement boire son thé en paix.



Quand Alexander, après avoir été renversé par une voiture, s'est retrouvé sur une civière à l'urgence de l'hôpital où il travaillait, il était très inquiet : il pensait bien sûr à son chat, à son chien, aux êtres qu'il aimait... J'étais l'un d'eux et, comme il était déjà amoureux, il aurait voulu que je sois là pour le rassurer, le serrer dans mes bras ou, tout au moins, lui tenir la main... Mais si quelques personnes de son entourage connaissaient mon existence et tout l'amour qu'Alexander éprouvait déjà pour moi, personne n'avait mes coordonnées. « Et si j'étais vraiment parti sur la Lune, il n'y aurait même eu personne pour te le dire... », m'a-t-il écrit deux jours plus tard. Je sens encore toute l'angoisse qu'il y avait dans ces mots. C'est vite devenu l'une de mes inquiétudes aussi : s'il arrivait quelque chose à l'un d'entre nous, comment l'autre en serait-il informé ? Quand Alexander a été obligé de s'absenter un peu plus longtemps que prévu, sans pouvoir communiquer avec moi, j'ai d'abord été inquiet puis rassuré de recevoir un message de « docteure Jane » ; nous avions désormais un ange qui assurerait la communication entre nous... De mon côté, j'ai demandé à un ami s'il voudrait bien communiquer avec Alexander s'il m'arrivait quelque chose, puis j'ai donné son nom et ses coordonnées à Alexander.

En lisant ce blogue, deux compatriotes d'Alexander ont vite reconnu le Petit Prince dont je parlais. Alistair a connu Alexander au début de leur adolescence : ils étaient pensionnaires au même collège et puisqu'ils se ressemblaient beaucoup, ils sont assez rapidement devenus amis... Depuis le jour où, « par hasard », il a découvert le blogue (moi, je crois plutôt qu'Alexander l'a guidé), Alistair m'a écrit tous les jours... jusqu'au 10 décembre dernier. Nous avons appris, après Noël, qu'Alistair avait eu un très grave accident le 12 décembre et qu'il était encore aux soins intensifs d'un hôpital de Londres. « Docteure Jane » s'est immédiatement rendue à Londres mais, puisqu'elle n'était pas de la famille officielle, on n'a rien voulu lui dire sauf... un petit détail qui a échappé au personnel médical et qui nous a bouleversés. Dès sa première rencontre avec Alistair, Jane l'avait adopté : Alistair est vraiment comme un petit frère d'Alexander ; c'est ce que j'avais perçu dans sa correspondance... Alistair fait partie de notre petite famille d'êtres chers. Il me manque. Nous avons su, début janvier, que son père est venu le chercher à l'hôpital mais nous sommes depuis sans nouvelle. Je continue de lui écrire, en espérant recevoir bientôt une réponse...

L'autre Britannique, lecteur de ce blogue, n'a pas connu Alexander personnellement ; Alexander ne savait pas qui il est mais lui sait très bien qui est Alexander : il l'a aperçu quelques fois à Londres et il le trouvait très beau, toujours très élégant avec une pointe d'excentricité. Alexandre (c'est son nom. En fait il s'appelle aussi Alexander mais pour ne pas me faire de peine, il signe « Alexandre ») est aussi très digne d'être un ami d'Alexander. C'est aussi un garçon extraordinaire et sa vie est un roman, à la fois merveilleux et tragique. Alexandre m'a écrit vers la fin du mois de juin pour me confirmer qu'il allait subir une opération qui nécessiterait ensuite au moins quelques semaines de convalescence et de réadaptation... Il n'avait pas envie de cette opération et surtout, il n'avait pas envie de se séparer durant tout ce temps de son ami Maurice, un grand chien très doux. Je savais que je n'aurais pas de ses nouvelles durant quelques semaines, car il n'aurait pas accès à Internet ; mais nous arrivons à la fin du mois d'août... Alexandre, vous me manquez. Donnez-moi vite de vos nouvelles.

Ces dernières semaines, d'autres inquiétudes sont venues d'Angleterre, dont je ne connais pas encore toutes les répercussions. L'encens et les bougies occupent tout un coin de mon salon et je demande plusieurs fois par jour que les anges veillent sur tous les membres de notre petite famille...

7 commentaires:

Dr. CaSo a dit…

Ma secrétaire a un jour déclanché le plan "panique" parce qu'elle m'avait envoyé 3 emails et essayé de me téléphoner et je n'avais pas répondu... pendant toute une journée! Ca m'a profondément énervé et je lui ai dit de ne pas se faire de soucis pendant au moins 3 jours si elle n'avait pas de mes nouvelles. Pareil avec mes parents et mes grands parents: ils savent que pas de nouvelles pendant 2 semaines ça ne veut pas dire que j'ai disparu de la planète!

Je pense qu'il est sage de décider de ces "limites" avec nos amis, si possible, pour ne pas paniquer pour rien mais aussi ne pas attendre pour rien alors que quelque chose de sérieux est arrivé. (Mais j'aurais fait comme toi, pas répondu au téléphone dimanche matin, huhuh...)

C'est donc bientôt ton anniversaire?

Alcib a dit…

Dr. CaSo : Certaines personnes, qui acceptent mal de ne pas avoir le contrôle dans toute situation, voudraient que nous ardions toujours un fil à la patte. Il faudrait qu'elles sachent toujours où nous sommes, ce que nous faisons...

Michel, l'ami dont je parle, est peut-être celui qui me téléphone le plus souvent, mais ce n'est pas toutes les semaines non plus : nous pouvons être quelques mois sans nous donner de nouvelles. Malheureusement, quand je téléphone, je risque de tomber sur l'ami qui partage la maison avec lui et là ça risque d'être long : il faut toujours qu'il me raconte tout ce qui se passe sur la planète... Si Michel avait Internet à la maison, je lui écrirais plus souvent. C'est vraiment exceptionnel que je lui écrive au bureau car les messages personnels y sont peut-être surveillés.
Je ne comprends pas sa panique car je lui avais écrit quatre jours auparavant. Alors qu'il part souvent en voyage sans me le dire ; je ne m'attends pas non plus à ce qu'il me dise tout ce qu'il fait. Si j'appelle chez lui à quelques reprises et qu'il n'y a pas de réponse, je me dis qu'il doit être en voyage.
J'ai apprécié le fait qu'il se préoccupe de savoir si j'allais bien mais je trouve qu'il en a fait un peu trop.
Personne, ni dans ma famille ni parmi les amis proches géographiquement ne vérifie régulièrement si je suis vivant.
Ce qui dérangeait Michel, c'est qu'il avait décidé vendredi après-midi de mon emploi du temps de toute ma journée de samedi et que... je n'avais pas immédiatement répondu « présent ! »

Avec mes amis britanniques, c'est différent : les communications avec eux ont été à peu près quotidiennes. Quand je suis quelques jours sans nouvelle, si je n'en connais pas la raison, je m'inquiète et ils font de même.

Alexander savait toujours ce que je faisais et c'était normal : il pensait toujours à moi comme je pense toujours à lui, quoi que je fasse. Pour lui et pour lui seul j'aurais voulu avoir un Blackberry pour pouvoir répondre immédiatement à ses messages, peu importe l'endroit où j'étais. Il avait lui-même songé à s'en procurer un... ne serait-ce que pour pouvoir me prévenir s'il pensait être en retard de cinq minutes à l'un de nos rendez-vous.
Je ne tiens pas à avoir un téléphone mobile mais j'aimerais souvent avoir accès à Internet lorsque je suis ailleurs au parc, par exemple ; je pourrais y rester plus longtemps sans avoir besoin de rentrer.

Le téléphone tôt le matin, je n'aime pas trop, surtout le dimanche.
Et j'apprécie encore moins qu'on vienne sonner à la porte sans me prévenir. Et si je ne réponds pas au téléphone, il me semble logique que je ne réponde encore moins à la porte.
Certains jours, j'aimerais bien avoir un secrétaire ;o)

Alcib a dit…

Correction : « ... voudraient que nous GARDIONS... » bien entendu.

Dr. CaSo a dit…

C'est effectivement bien pratique d'avoir internet avec soi partout... mais d'un autre côté c'est casse-pieds parce que tout le monde s'attend à ce qu'on réponde à leurs emails et messages encore plus rapidement qu'avant... et puis c'est tentant d'utiliser internet tout le temps, même quand on n'en a pas réellement besoin. Ca devient une addiction. Je te conseille d'essayer d'y résister le plus longtemps possible ;)

Alcib a dit…

Dr. CaSo : Oui, je suis bien conscient du danger. Mais je n'ai pas, moi, quelqu'un qui attend une réponse immédiate ; et si c'était le cas, je pourrais bien faire comme si je n'ai pas accès à Internet partout où je suis :o)
Il n'y a vraiment que deux ou trois personnes dont je souhaiterais pouvoir lire rapidement les messages.

Avec accès à Internet au parc, par exemple, je pourrais y travailler au lieu de rester enfermé chez moi (sans balcon - je crois que je l'ai déjà dit :o)
Mais ne t'inquiète pas : je n'ai aucune difficulté à résister.

RAnnieB a dit…

Bonsoir Alcib,

Je me suis mise récemment à la lecture rétrograde de ton blogue. Blogue que j'ai découvert grâce à tes commentaires sur celui de JPL.

Je désirais mieux comprendre ta relation avec Alexander ainsi qu'à connaître (du moins un peu) cet homme avec qui tu as vécu une grande histoire d'Amour. Ce blogue ayant été témoin de la naissance et de l'évolution de cette relation si intense.

Cette lecture me fait vivre de très belles émotions. Merci.

Je me suis arrêté ce soir à ton billet du 24 août 2008.

J'en profite donc pour te souhaiter, quelques minutes à l'avance un très joyeux anniversaire de naissance et une longue et heureuse vie.

Bise virtuelle xx

Alcib a dit…

RAnnieB : Merci de prendre la peine de lire les articles plus anciens.
Tu auras probablement remarqué qu'avant le 7 juillet 2009, j'étais plus retenu dans dans ce que j'écrivais au sujet d'Alexander. Nous aimions, moi dans les billets, et lui et moi dans les commentaires glisser des messages que nous étions probablement les deux seuls à comprendre.
J'aurais tellement de choses à dire au sujet d'Alexander, qui n'ont pas encore été dites, qui feraient voir à quel point ce garçon était encore plus merveilleux, mais je ne sais pas si je pourrai les écrire ici...

Merci pour les souhaits d'anniversaire. Depuis l'année dernière, le 25 août, c'est surtout l'anniversaire du 25 août 2008, le premier et le seul de mes anniversaires que nous avons pu célébrer ensemble.