mercredi 9 mars 2011

Les amis de Barcelone


Je crois que ce qu'il y avait de plus plus douloureux, de plus intolérable pour Alexander, dans l'idée qu'il pourrait devoir « partir sur la Lune » ou retourner sur son étoile, c'était de devoir laisser derrière lui son ami Alexander Bull. Lorsqu'il était allé le chercher chez l'éleveur, il avait promis à son nouvel ami qu'il serait toujours là pour s'occuper de lui, pour le soigner, pour le rendre heureux. Une promesse était pour lui un engagement sacré, j'ai eu plusieurs fois l'occasion de le vérifier. S'il devait partir, il ne pourrait pas respecter son engagement envers Alexander Bull et cela lui était insupportable. « Je ne peux plus le regarder dans les yeux », me disait-il parfois. Bien sûr, j'essayais de le rassurer, de le déculpabiliser, mais je sentais si bien ce qu'il pouvait ressentir... Après le départ d'Alexander, j'espérais qu'Alexander Bull aille vivre chez Docteur Jane, qu'il connaissait très bien et qui l'aimait déjà depuis son arrivée chez Alexander. Il vit maintenant à la campagne où il a vraiment tout pour être heureux, avec des chevaux, des chats, d'autres chiens qui, plus grands que lui, l'impressionnent tout de même un peu...

Il y a quelques jours, Alexander Bull était à Barcelone. Comme il est très sociable et généreux, toujours prêt à offrir ou à partager ses jouets, il se fait facilement de nouveaux amis. Il a sympathisé avec Gus, un bulldog de son âge, et ils sont devenus inséparables. Gus vivait en France, chez une dame récemment décédée du cancer ; son fils qui vit à Barcelone s'est chargé du chien. Voyant qu'Alexander Bull et Gus s'entendaient si bien, le jeune Français a proposé à Docteur Jane de ramener Gus en Angleterre où il serait sûrement plus heureux, avec son nouvel ami, et surtout dans un climat plus agréable pour lui. Les bulldogs ne supportent pas la chaleur ; l'été de Barcelone pourrait leur être fatal. Une fois tous les papiers en ordre, Gus a pu rentrer en Angleterre et, depuis quelques jours, il y découvre la superbe campagne avec son ami Alexander Bull.



Alexander non plus n'aimait pas la chaleur ; je ne crois pas qu'il aurait été heureux en Espagne. Je sais qu'il est allé déjà à Madrid pour y poursuivre des recherches pour la rédaction de son livre sur Héphaistion, mais je ne crois pas qu'il soit déjà allé à Barcelone. Il aurait pourtant eu au moins une bonne raison d'y aller : celle d'aller y entendre son ami Freddie, mais il n'était alors qu'un petit enfant (il n'avait que cinq ans en 1987), ou pour aller y célébrer après coup la rencontre inoubliable de Freddie et de Montserrat Caballé.

4 commentaires:

RAnnieB a dit…

Ils sont rares, voir même exceptionnels, ces gens qui tiennent toujours leurs promesses. Tant celles faites aux autres qu'à eux mêmes.

Je recherche généralement leur compagnie. J'admire sans borne ceux qui en font un point d'honneur.

Cela a toujours été un objectif à atteindre pour moi. J'ai plus de difficulté avec les promesses que je me fais à moi-même que celle que je fais aux autres. Il y a, et aura toujours, du travail à faire :).

Alcib a dit…

RAnnieB : Je crois aussi que ces êtres sont rares, et même exceptionnels, comme tu le dis.
Alexander se faisait un point d'honneur de respecter ses engagements. Il avait reçu une excellente éducation qui, je l'imagine, lui avait enseigné comment il fallait être irréprochable et exemplaire en tout. Ça ne devait pas être facile tous les jours de vivre selon ces exigences.
Mais, au-delà de l'éducation reçue, il avait pour les autres, pour les gens qu'il aimait surtout, le souci de ne pas les blesser ou leur faire de peine, de ne pas les décevoir ; et cela même dans les choses simples car, croyait-il, si on se laisse aller dans les petites choses, il est facile de se laisser aller dans les grandes.
Comme plusieurs d'entre nous, il avait peut-être un peu de mal parfois à accorder autant d'importance à ses engagements envers-lui-même qu'à ceux qu'il prenait envers les autres. En associant quelqu'un qu'il aimait à ses engagements envers lui-même il lui était plus facile de les respecter.

Afin de me rappeler l'importance de penser aussi à moi, j'ai depuis un bon moment, imprimée devant moi, et insérée en signature dans mes courriels, cette citation d'André Gide : « La parole qu'on se donne à soi-même ne devrait pas être moins sacrée que celle que l'on donne aux autres. »

dieudeschats a dit…

Je suis heureuse pour Alexander Bull qu'il ait trouvé un bon compagnon de jeux en l'un de ses congénères, et je remercie Docteur Jane d'avoir offert gîte et couvert à Gus !

Alcib a dit…

dieudeschats : Merci. Moi aussi, je suis heureux pour Alexander et pour son ami Gus. Ce dernier a reçu mieux que gîte et couvert : il a maintenant une nouvelle famille, beaucoup d'espace pour jouer, des animaux avec qui il pourra socialiser, sans compter un nouvel ami et compagnon de jeu. Alexander et Gus ne se quittent plus ; ils veulent même dormir ensemble ;o)