samedi 28 février 2015

Chat noir et nuit blanche

Il m'arrive encore très souvent de ne pas pouvoir dormir la nuit, comme du temps où j'attendais des nouvelles d'Alexander qui était hospitalisé. Son état de santé ne s'améliorait pas, mais certaines nuits étaient plus difficiles et plus inquiétantes que d'autres. Lorsque la fièvre consentait à diminuer et que d'autres symptômes se faisaient plus discrets, c'était en soi une bonne nouvelle. Je restais pratiquement toujours devant ou à côté de mon ordinateur et de mon téléphone, même la nuit. Je n'aurais pas voulu me réveiller un matin et me rendre compte que l'on avait tenté en vain de me joindre ; au moment d'aller dormir, puisqu'il le fallait bien, je conservais l'ordinateur ouvert à côté de moi. Épuisé, je finissais à un moment donné par tomber de sommeil, et je me réveillais souvent en sursaut pour vérifier si j'avais reçu des messages... C'était il y a cinq ans...
Ces derniers mois, au moment d'aller dormir, je sens la même anxiété s'installer lentement en moi, comme si je revivais ces semaines, ces mois d'inquiétude au sujet d'Alexander. Je dois parfois rallumer la lampe, essayer de m'intéresser à quelque chose qui ne soit pas « contaminé » par l'inquiétude, mais ça ne fonctionne pas toujours, comme si le lit lui-même était trop associé à l'inquiétude, à l'anxiété, à l'angoisse, et cela depuis mon enfance. D'ailleurs, quand Alexander était malade, et longtemps après son départ, je dormais par terre dans le couloir, entre ma chambre et le salon ; j'avais ainsi l'impression, en me couchant par terre au lieu de m'installer dans un lit confortable, de tromper la peur de mourir.
Quand je réussis à me laisser tomber dans les bras de Morphée, je dors généralement quelques heures, au moins ; je n'ai plus besoin de rester en alerte : aucune nouvelle, bonne ou mauvaise, ne risque de m'arriver au cours de la nuit. On m'appelle rarement le jour, sauf pour affaires, et on ne m'écrit plus la nuit... À quatre heures et demie ce matin, n'ayant pas fermé l'œil de la nuit, je me suis relevé et je suis revenu au salon avec l'intention de m'occuper plutôt que de m'énerver en essayant de trouver un sommeil qui ne vient pas. Je suis pourtant fatigué...

Je suis allé lire le plus récent billet de Dr CaSo qui, devant bientôt partir en Europe, s'inquiète de devoir laisser son chat noir, sa Câlinette, en pension chez une amie durant tout un mois. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Alexander, pourtant malade, qui ne voulait pas aller à l'hôpital pour quelques jours en laissant derrière lui son Siamois malade aussi. Fidèle à lui-même, Alexander songeait d'abord à son engagement envers les autres avant de penser à sa santé ; ayant promis que, le jour venu, il serait là pour faire ses adieux à son Harry, il ne voulait surtout pas que Harry parte sans être là pour l'accompagner... J'ai laissé chez Dr CaSo un commentaire rappelant cette fidélité d'Alexander à ses engagements, à ses promesses, aux êtres qu'il aimait... Mais la situation n'est pas la même : Dr CaSo est en santé, tout comme sa Câlinette. Cela n'empêche pas que les séparations, même brèves, peuvent êtres déchirantes.

2 commentaires:

Dr. CaSo a dit…

Les gens qui aiment réellement les animaux se font souvent plus de soucis pour eux que pour les humains, je crois. Cela peut paraître égoïste, vu de l'extérieur, mais je crois que c'est en partie dû au fait qu'avec les humains, on peut expliquer ce qui se passe, mais on ne peut pas complètement expliquer aux animaux ce qui se passe. Je suis sûre que Harry, comme Calinette, savait que son "aimé" ne l'avait pas abandonné, mais il devait aussi comprendre/ressentir l'angoisse et la tristesse et la douleur d'Alexander sans pouvoir l'expliquer ni rien y faire. C'est sûrtout ça qui nous fait de la peine et du souci, on aimerait tellement pouvoir "simplement expliquer" :)

Alcib a dit…

Dr CaSo : Je crois que tu as raison mais je dirais les choses autrement. Les gens qui aiment vraiment les animaux se font, d'abord surtout, du souci pour les animaux qui partagent leur vie. Si j'avais une famille, des enfants, il est fort probable que j'accorderais plus d'importance aux enfants qu'aux animaux.
Alexander n'avait pas d'enfants. Son chat et son chien étaient vraiment sa famille immédiate, les êtres dont il se sentait responsable, et, pour lui, le mot « responsable » prenait vraiment tout son sens.
Cela ne l'empêchait pas de s'inquiéter des personnes qu'il aimait, ni des autres animaux, car il savait à quel point les autres, humains et animaux, peuvent apporter de joie dans une journée, dans une vie, et à quel point ils peuvent aussi être vulnérables par moment.
Et moi, j'avais adopté le chat et le chien d'Alexander, puisqu'Alexander les aimait, qu'il m'aimait et que je l'aimais, que je l'aime. Ensemble, avec quelques autres personnes et animaux, nous formions une petite famille unie, pleine d'amour à partager.
Alexander parlait énormément à son chat et à son chien. Pour le chat, c'était peut-être moins nécessaire car, comme le disait Jane : « Je ne sais pas ce qu'ils se disent en silence, ces deux-là, mais il suffit d'un regard et ils se comprennent. »
Quant à Alexander Bull, il était plus exigeant ; il savait depuis longtemps qu'Alexander ferait tout pour lui, qu'il ne l'abandonnerait jamais, mais il avait besoin de leurs petites conversations. D'ailleurs, Alexander lui disait tout ce qu'il faisait. En partant travailler le matin, il disait notamment qu'il devait partir « gagner les croquettes » pour Harry et Alexander Bull.
La nuit, il lui lisait de la poésie. Quand il recevait un courriel de moi, il le racontait à Alexander Bull...
Quand il devait repartir sur son étoile, Alexander disait à Jane : « Alcib comprendra, mais Alexander Bull ne pourra pas comprendre... » (comprendre pourquoi Alexander n'est plus là).

Les animaux ont des émotions et ils connaissent l'angoisse... Je crois que c'est aussi ce qu'il y a de très touchant, de douloureux même parfois quand on y pense... On voudrait pouvoir les rassurer. Mais quand on est éloigné, c'est plus difficile à faire.

Mais je crois qu'il faut leur parler. Comme les bébés, les animaux ne comprennent pas toujours les mots, mais ils sentent très bien ce qui se passe si ont leur dit quelque chose d'important...

Pour Câlinette, je crois qu'il faut lui parler, lui expliquer que tu dois t'absenter, sans te laisser gagner par l'inquiétude, par l'angoisse, car c'est ce qu'elle risque de retenir. Parle-lui, comme tu le fais sans doute, avec confiance ; en entendant que tu reviendras, elle sera rassurée...