mardi 5 décembre 2017

Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit...


Et ce jour, c'est aujourd'hui : au réveil, ce matin, j'apprends que Jean d'Ormesson est parti... dans mon sommeil.



Né le 16 juin 1925, Jean d'Ormesson est mort à son domicile, d'une crise cardiaque, au cours de la nuit de lundi à mardi, 5 décembre 2017, à l'âge de 92 ans. Nous avions tellement l'habitude de le voir partout que nous avions fini par le croire vraiment immortel. Mais, à 92 ans, il n'était pas si vieux : d'autres écrivains français sont morts à un âge plus avancé encore (Julien Green, à près de 99 ans, par exemple) ; mes parents (qui n'étaient pas écrivains) sont tous deux morts à 94 ans, à quelques années d'intervalle.


Né avec une cuillère d'argent dans la bouche, il aura mis pas mal de temps à savoir ce qu'il voulait faire de sa vie... Il a failli devenir professeur dans un collège de jeunes filles aux États-Unis, mais... il est tombé gravement malade. Rentré en France, il est entré à l'UNESCO puis... il en est devenu le directeur. Il a fait du journalisme, est devenu directeur du journal Le Figaro et, dans ses moments libres, il a... écrit des livres.


Il fut, à 48 ans, le plus jeune membre de l'Académie française. Il n'en fut pas forcément le plus « sage », le plus discret des Immortels. C'est lui qui a, notamment, livré le combat pour faire entrer à l'Académie la première femme ; Marguerite Yourcenar y fut admise le 22 janvier 1981 mais, après son discours de réception, elle n'y a jamais remis les pieds.


On a beaucoup vu et entendu Jean d'Ormesson. Comme son grand maître Chateaubriand, dont il est devenu l'un des spécialistes, il a sans doute « cherché la gloire pour se faire aimer ». Cultivé, merveilleux conteur, on aimait l'inviter à la radio, à la télévision pour parler de tout et de rien. Il fut certainement un excellent ambassadeur de l'« esprit français », du moins de celui que l'on aime mettre de l'avant, celui de la conversation claire, brillante, élégante...


On aimait un peu se moquer de lui, de son omniprésence médiatique. Mais s'il alimentait volontiers, par ses fausses confidences et sa fausse modestie, la conversation ou les discussions à son sujet, il était le premier à en rire.


Je n'ai pas tout lu de Jean d'Ormesson (il a beaucoup écrit), mais j'aime à l'occasion prendre l'un de ses livres et m'y plonger ; je sais que je ne m'ennuierai pas... Toutefois, celui de ses livres que j'ai lu et relu, que j'aime relire un peu comme les Mémoires d'outre-tombe, c'est son roman Au plaisir de Dieu, dans lequel il raconte l'histoire d'une famille (la sienne) de la noblesse française et l'évolution des mentalité et des mœurs sur plusieurs générations. C'est le premier que j'aie lu  des livres de Jean d'Ormesson, dont j'avais aimé la série télévisée tiré de ce roman, sorte de « Downton Abbey » française avant l'heure.


« De génération en génération, nous nous étions méfiés des questions. Et de tout temps, de tout cœur, aux questions sans réponses, nous avions préféré les réponses sans question. » Jean d'Ormesson, Au plaisir de Dieu


Comme Voltaire qui disait avoir choisi le bonheur car c'est meilleur pour la santé, Jean d'Ormesson appartient à la catégorie des écrivains du bonheur. Il a choisi d'être résolument heureux. Agnostique, il disait ne pas savoir si Dieu existe, ajoutant : « Je crois en Dieu car j'espère qu'il existe. » Lorsqu'il apparaîtra devant Lui, Dieu lui accordera peut-être le privilège d'écrire un dernier livre pour nous raconter sa vie au Paradis... à moins qu'il persuade l'écrivain que nous, pauvres mortels, ne méritons pas un tel livre, fût-il celui d'un Immortel.

1 commentaire:

Alcib a dit…

Jean d'Ormesson est mort hier. Lui qui disait ne pas vouloir mourir sous le quinquennat de François Hollande, car il était terrifié à l’idée que le président Hollande puisse lui rendre hommage, il n’est sûrement pas très heureux en ce moment car Johnny Halliday a eu la mauvaise idée de mourir aujourd’hui, lendemain de la mort de Jean d’Ormesson : toute l’attention des Français sera maintenant tournée vers la mort et les obsèques du chanteur ; la popularité de l’Académicien ne pourra pas concurrencer celle du chanteur mythique des années yé-yé que, personnellement, je n’aime pas mais que les Français vénèrent.