dimanche 31 décembre 2017

Pour dire adieu ?

Ayant mal dormi la nuit dernière, et fatigué d’avoir fait un peu de ménage dans l’appartement – la seule idée de ménage m’épuise avant même de commencer –, je suis allé, après le déjeuner, faire une sieste dans un lit dont les draps venaient d’être changés… Juste au moment où j’allais m’éveiller, environ quarante-cinq minutes plus tard, j’ai oublié tout le reste, mais je me souviens vaguement de la fin d’un rêve : j’étais accompagné de quelques personnes – j’ignore qui étaient ces personnes et où nous étions –, mais il y avait là une personne qui avait connu Alexander. Et je me suis dit que cette personne pouvait certainement communiquer avec Alexander et lui demander s’il voulait bien reprendre contact avec moi… Puis, je me suis dit : mais Alexander est mort ! Cette personne ne pourra pas, plus que moi, communiquer avec Alexander ! Et, en pensant à Alexander, dans ce rêve, je me tenais devant un gros meuble de rangement à tiroirs dont je ne voyais ni le début ni la fin, d’un jaune vif – les tiroirs devaient n’avoir que douze ou treize centimètres de hauteur –, sauf que le tiroir du haut, à la hauteur de mes yeux, était entrouvert et j’avais l’impression que c’était là qu’était Alexander… Et je me suis réveillé avec un étrange sentiment et une forme d’angoisse, me disant : mais c’est pour toujours ! Il ne reviendra pas ! Alexander est mort à jamais !

Était-ce ma façon de dire adieu à 2017 ?
Que faisait là ce meuble de rangement ? Voulait-il me rappeler qu'il y a une place pour chaque chose et que chaque chose devrait être à sa place ?
Il y a sans doute un lien entre le ménage et le rangement que je faisais depuis la veille, et ce meuble de rangement ; il y a sans doute aussi un lien à faire avec l'idée que ranger son espace de vie c'est aussi une façon de mettre de l'ordre dans sa vie.
Je pourrais me demander ce qu'Alexander venait faire dans ce rêve, associé au rangement ; mais il n'y a rien d'étonnant car Alexander a changé ma vie à jamais et, quoi que je fasse, sa présence se fait sentir, ne serait-ce que dans la façon dont je pense qu'il ferait les choses.

Je ne ferai pas de bilan de l'année qui se termine mais s'il y a une chose que j'ai bien l'intention de changer, en 2018, c'est de consacrer moins de mon temps et de mes énergies à m'occuper du confort des autres, pour prendre un peu soin de moi et me concentrer sur ce qui compte vraiment pour moi... C'est ce que j'ai essayé de faire ces derniers jours, pendant que tout le reste est au ralenti, et, ma foi, je ne serais pas malheureux de ne plus participer à toute cette agitation qui ne m'apporte rien de bon ; Rupert et moi pouvons être heureux sans toute l'agitation du monde extérieur.

Je vous souhaite une bonne année 2018, sous le signe de la santé et de la réalisation de vos rêves les plus chers.

mardi 5 décembre 2017

Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit...


Et ce jour, c'est aujourd'hui : au réveil, ce matin, j'apprends que Jean d'Ormesson est parti... dans mon sommeil.



Né le 16 juin 1925, Jean d'Ormesson est mort à son domicile, d'une crise cardiaque, au cours de la nuit de lundi à mardi, 5 décembre 2017, à l'âge de 92 ans. Nous avions tellement l'habitude de le voir partout que nous avions fini par le croire vraiment immortel. Mais, à 92 ans, il n'était pas si vieux : d'autres écrivains français sont morts à un âge plus avancé encore (Julien Green, à près de 99 ans, par exemple) ; mes parents (qui n'étaient pas écrivains) sont tous deux morts à 94 ans, à quelques années d'intervalle.


Né avec une cuillère d'argent dans la bouche, il aura mis pas mal de temps à savoir ce qu'il voulait faire de sa vie... Il a failli devenir professeur dans un collège de jeunes filles aux États-Unis, mais... il est tombé gravement malade. Rentré en France, il est entré à l'UNESCO puis... il en est devenu le directeur. Il a fait du journalisme, est devenu directeur du journal Le Figaro et, dans ses moments libres, il a... écrit des livres.


Il fut, à 48 ans, le plus jeune membre de l'Académie française. Il n'en fut pas forcément le plus « sage », le plus discret des Immortels. C'est lui qui a, notamment, livré le combat pour faire entrer à l'Académie la première femme ; Marguerite Yourcenar y fut admise le 22 janvier 1981 mais, après son discours de réception, elle n'y a jamais remis les pieds.


On a beaucoup vu et entendu Jean d'Ormesson. Comme son grand maître Chateaubriand, dont il est devenu l'un des spécialistes, il a sans doute « cherché la gloire pour se faire aimer ». Cultivé, merveilleux conteur, on aimait l'inviter à la radio, à la télévision pour parler de tout et de rien. Il fut certainement un excellent ambassadeur de l'« esprit français », du moins de celui que l'on aime mettre de l'avant, celui de la conversation claire, brillante, élégante...


On aimait un peu se moquer de lui, de son omniprésence médiatique. Mais s'il alimentait volontiers, par ses fausses confidences et sa fausse modestie, la conversation ou les discussions à son sujet, il était le premier à en rire.


Je n'ai pas tout lu de Jean d'Ormesson (il a beaucoup écrit), mais j'aime à l'occasion prendre l'un de ses livres et m'y plonger ; je sais que je ne m'ennuierai pas... Toutefois, celui de ses livres que j'ai lu et relu, que j'aime relire un peu comme les Mémoires d'outre-tombe, c'est son roman Au plaisir de Dieu, dans lequel il raconte l'histoire d'une famille (la sienne) de la noblesse française et l'évolution des mentalité et des mœurs sur plusieurs générations. C'est le premier que j'aie lu  des livres de Jean d'Ormesson, dont j'avais aimé la série télévisée tiré de ce roman, sorte de « Downton Abbey » française avant l'heure.


« De génération en génération, nous nous étions méfiés des questions. Et de tout temps, de tout cœur, aux questions sans réponses, nous avions préféré les réponses sans question. » Jean d'Ormesson, Au plaisir de Dieu


Comme Voltaire qui disait avoir choisi le bonheur car c'est meilleur pour la santé, Jean d'Ormesson appartient à la catégorie des écrivains du bonheur. Il a choisi d'être résolument heureux. Agnostique, il disait ne pas savoir si Dieu existe, ajoutant : « Je crois en Dieu car j'espère qu'il existe. » Lorsqu'il apparaîtra devant Lui, Dieu lui accordera peut-être le privilège d'écrire un dernier livre pour nous raconter sa vie au Paradis... à moins qu'il persuade l'écrivain que nous, pauvres mortels, ne méritons pas un tel livre, fût-il celui d'un Immortel.

mercredi 22 novembre 2017

Soigner son image ?

La photo vient d'ici

« Quoi ? Pourquoi me regardez-vous comme ça ? »

lundi 13 novembre 2017

Ensemble...

... pour la paix, pour la joie ou pour le plaisir.
 

L'Assemblée, de Wang Shugang

(On peut agrandir les images en cliquant dessus)

 Wang Shugang est né à Beijing, Chine, en 1960

« Cette installation de huit sculptures disposées en cercle est révélée en 2007 au sommet du G8, à Heiligendamm, en Allemagne, parallèlement à la réunion des dirigeants des huit pays les plus industrialisés de la planète. Les rappelant à leurs responsabilités, l'œuvre de Shugang symbolise le travail collectif au service de la paix dans le monde. Shugang utilise pour toutes ses figures une couleur unique – sculptures aux couleurs all-over devenant en quelque sorte sa marque. Comme le rappelle l’artiste “la couleur rouge a des significations culturelles multiples en Chine, elle représente traditionnellement le bonheur mais elle symbolisait pendant la Révolution culturelle la terreur.” »


À l'invitation de Dr CaSo, j'ai proposé, pour sa série « photo de truc », de photographier quelque chose qui évoque la réunion, l'ensemble ; je me devais donc de trouver moi-même une photo qui rappelle ce thème. À vrai dire, je n'ai pas eu trop de mal car, il y a quelques jours encore, j'étais avec Rupert sur le campus de l'Université McGill, où ces sculptures me portent à réfléchir autant qu'elles amusent Rupert.


Chaque fois qu'il arrive sur le campus de l'Université McGill, Rupert sait exactement où il veut aller : il y a d'abord un petit parc clôturé où il peut courir après son jouet préféré et où il retrouve souvent un ami canin (« ami » n'est peut-être pas pas le mot exact pour désigner ce caniche qui ne fait que narguer Rupert avant de courir se cacher dans les bras de sa maîtresse ; disons plutôt : « compagnon de promenades », à l'occasion) ; puis il se rend à cet endroit, le long de la rue Sherbrooke, pour jouer au milieu de ses amis rouges ; ensuite, nous remontons l'avenue McTavish (rue piétonne qui traverse le campus du Nord au Sud, ou vice-versa) et nous allons attendre une amie qui travaille dans l'un des pavillons (Rupert s'assoit alors sur l'un des bancs de granit devant la porte et il attend la sortie de notre amie, et, tous les trois, nous revenons ensemble à la maison – l'amie habite la même rue que nous, quelques portes plus haut).

lundi 6 novembre 2017

Une page d'histoire...

Montréal a écrit hier soir, dimanche 5 novembre 2017, une nouvelle page d'histoire : 375 ans après sa fondation par le sieur Paul Chomedey de Maisonneuve et Jeanne Mance, Montréal a élu sa première mairesse.




Il y a seulement quelques semaines, Valérie Plante était à peu près inconnue à l'extérieur du district électoral où elle a été élue pour la première fois en 2013.


Ces dernières semaines, Valérie Plante et son équipe ont fait une campagne électorale sans faute. Elle a su inspirer confiance aux électeurs et démontrer qu'elle était « l'homme de la situation ».



L'arrogant Denis Coderre, maire de Montréal depuis quatre ans, maire « raciste » qui voulait exterminer de Montréal les pitbulls, qui s'appropriait, contre les avis de l'administration, les lieux importants de Montréal pour les offrir à ses amis promoteurs de spectacles et de divertissements, apportant à ces milliardaires du financement provenant des poches des contribuables, a connu hier soir son Waterloo. Les Montréalais lui ont préféré Valérie Plante, qui propose de faire de Montréal une ville axée sur la mobilité des piétons, des cyclistes, en favorisant les transports en commun. On verra comment elle pourra mener à bien son programme, Mais, déjà, un changement de ton et de style ne pourra que faire plaisir aux Montréalais.

mardi 17 octobre 2017

Deux dirigeants indépendantistes catalans en prison

L'Espagne s'enfonce dans la répression et l'emprisonnement de dirigeants politiques.
Les chefs des deux plus importantes associations indépendantistes catalanes, Jordi Cuixart et Jordi Sanchez, ont été inculpés de sédition et emprisonnés.
Est-ce la façon du gouvernement de droite Mariano Rajoy de négocier avec la Catalogne ? C'est un « dialogue », répétons-le puisque le gouvernement conservateur de Madrid se répète dans sa répression, digne des modèles Francesco Franco et Augusto Pinochet.

lundi 9 octobre 2017

Couleurs d'automne


Bien que, selon le calendrier, l'automne soit vraiment arrivé, à Montréal, on ne l'a pas vraiment senti encore. Les températures assez élevées ont fait en sorte que la végétation n'a pas vraiment perdu sa fraîcheur. Les arbres avaient, du moins jusqu'à aujourd'hui, conservé leurs feuilles ; mais ce lundi, la pluie a dû en secouer plusieurs, à qui les vents ont soufflé à l'oreille ce qui les attend.

18 novembre 2016

Si je vous parle de l'automne, ce n'est pas que je sois déjà dans cette ambiance : je n'ai pas eu le temps de m'y préparer et la météo ne m'a pas encore rappelé que je ferais bien de commencer à faire des provisions pour l'hiver, de rêver au coin du feu (si l'on a la chance d'en avoir un), ou bien de se plonger dans un bon livre sous le faisceau de l'abat-jour, la théière à portée de main...

 18 novembre 2016

Mais, sur son blogue, Dr CaSo a invité ses lecteurs et lectrices à participer à la « photo de truc » ; et le thème choisi est en rapport avec l'automne. Sans trop chercher, et puisque l'automne n'était pas encore au rendez-vous, j'ai vite choisi d'envoyer une photo de Rupert, prise au parc Jeanne-Mance, le jour de son premier anniversaire. J'ai déjà publié cette photo, l'automne dernier, mais il me semblait que, parmi les centaines de photos de Rupert que j'ai réussi à capter, elle illustre mieux l'automne, d'autant plus que Rupert est né un 20 octobre (il aura deux ans bientôt).

20 octobre 2016

J'aurai probablement l'occasion de vous reparler bientôt de Rupert et, si j'ai le temps de rêver un peu, j'aimerais aussi évoquer l'automne, qui restera toujours, je crois, ma saison préférée.

lundi 2 octobre 2017

Démocratie selon l'Espagne


Cette femme catalane voulait exercer son droit de vote !


Caricature, journal Le Devoir, Montréal, 2 octobre 2017

Mais le chef du gouvernement conservateur espagnol, Mariano Rajoy, disciple des dictateurs Franco (Espagne) et Pinochet (Chili) a voulu, avec une rare violence, l'en empêcher.

Honte au gouvernement espagnol !
Honte aux gouvernements dits démocratiques qui refusent de dénoncer la violence du pouvoir espagnol et le refus de laisser les Catalans voter démocratiquement !

Vive la Catalogne... libre !


dimanche 1 octobre 2017

Jo sóc Català (je suis Catalan)

Le Québécois que je suis ne pouvait pas rester indifférent à ce qui se passe en Catalogne. Comme un très grand nombre de mes concitoyens, je surveillais ces derniers jours, ces dernières heures, les nouvelles en provenance de Barcelone, de la Catalogne.

Le gouvernement espagnol a tout fait, ces dernières semaines, et tout particulièrement ces derniers jours, pour empêcher les Catalans de se prononcer démocratiquement sur le statut politique de la Catalogne. Quel bel exemple de démocratie donne l'Espagne ! Et quel bel exemple donnent les pays européens, de même que le gouvernement du Québec et celui du Canada, qui refusent de condamner la brutalité avec laquelle le gouvernement espagnol a tenté d'empêcher les Catalans de voter démocratiquement ! Près de 850 personnes ont été blessées par les actes de brutalité des forces de polices espagnoles dignes des plus beaux jours de la dictature de Franco.

Et pourtant, selon le président catalan Carles Puigdemont, plus de deux millions de personnes - sur les 7,5 millions de Catalans - ont trouvé le moyen d'aller voter, malgré la brutalité des forces de police espagnole.

Toujours selon le président Carles Puigdemont, 42,3 % des Catalans sont allés voter, ce qu'il considère un taux tout à fait acceptable, puisque tel avait été le pourcentage de la participation pour l'adoption de la constitution européenne.


Nouvelle réjouissante pour le Québécois que je suis : 90 % des Catalans qui ont voté se sont prononcés à 90 % pour que la Catalogne devienne un « État indépendant sous forme de République ».

Nouvelle affligeante : la brutalité avec laquelle le gouvernement espagnol a tenté d'empêcher les Catalans de voter. Honte à l'Espagne ! Honte à tous les les pays qui se disent démocratiques et qui refusent pourtant de dénoncer la brutalité du gouvernement espagnol.

Un regret : quel dommage que les Québécois n'aient pas la dignité et fierté des Catalans !

Aujourd'hui, plus que jamais, je peux dire : Jo sóc Català

dimanche 24 septembre 2017

Les mots pour le dire

Il fut un temps où je lisais assez régulièrement des livres de psychologie. Durant quelques années, les livres de Françoise Dolto, entre autres n'étaient jamais très loin de ma table de travail. Parmi les idées que j'ai retenues de ces lectures, c'est que « tout est langage », que les mots ont le pouvoir, sinon de guérir. du moins de mettre du baume sur des plaies qui, autrement, resteraient vives... Puisqu'elle était psychanalyste pour enfants, elle disait notamment qu'il faut expliquer aux enfants, et même aux bébés naissants, les problèmes, les drames, dont ils sont victimes ou témoins. Je crois aussi que les bébés, même s'ils ne comprennent pas encore les mots précis, comprennent le sens de ce que leur mère, leur père, ou quelqu'autre adulte significatif de leur entourage veut leur communiquer.

Il m'est arrivé plusieurs fois d'essayer de faire comprendre à Rupert quelque chose qu'il n'est pas si facile d'expliquer à un chien. Je ne me souviens plus exactement de situations très précises où j'ai eu à le faire, mais ce soir, j'ai eu l'occasion d'en vivre une nouvelle.

Rupert est malade depuis à peu près vingt-quatre heures. La nuit dernière (de samedi à dimanche), il est venu me réveiller quatre fois parce qu'il avait un urgent besoin de sortir. Je ne sais pas s'il existe de nombreux chiens comme lui mais, lorsqu'il doit me réveiller la nuit, Rupert est assez adorable. Il dort dans le salon, et ma chambre est à l'autre bout de l'appartement ; entre les deux, il y a la cuisine et un couloir...

Je l'entends parfois marcher dans l'appartement, soit parce qu'il a soif et qu'il va boire à la cuisine, soit que son lit est trop chaud et qu'il cherche un coin de fraîcheur pour y dormir un moment. J'ai l'impression aussi qu'il lui arrive de venir voir dans ma chambre pour vérifier si je suis bien là et, parfois, pour dormir plus près de moi, à l'entrée de la chambre où il dort un moment sur un petit lit qu'une voisine lui a confectionné. Habituellement, tout cela se fait sans bruit, même si je l'entends car j'ai le sommeil assez léger.

Or, la nuit dernière, comme il lui est arrivé déjà à quelques reprises, il est venu plusieurs fois dans ma chambre et, comme je faisais semblant de dormir, il repartait dormir au salon ou dans l'entrée, au bas de l'escalier. Puis, après avoir dormi un moment, je ne sais combien de temps, il revenait ; je n'avais pas regardé l'heure et je m'étais moi-même rendormi. Puis, à un moment donné, il émettait un très petit son, à peine audible, mais je savais qu'il avait enfin décidé qu'il devait me réveiller, le plus doucement possible. Je le regardais et lui demandais ce qui n'allait pas (il m'est arrivé à quelques reprises auparavant de lui dire qu'il était temps de dormir ; il repartait et quelques secondes plus tard je l'entendais ronfler). Pour l'aider à mieux se faire comprendre, je lui suggère des réponses possibles ; la nuit dernière, par exemple, je lui ai demandé s'il voulait aller dehors. Sa réponse était évidente : avec un petit air coupable de devoir me réveiller, il se retournait et se dirigeait vers la sortie : je savais alors que c'était urgent, car il avait longtemps repoussé le moment de me réveiller. Je me suis habillé en vitesse et je suis sorti avec lui. Ce petit jeu s'est répété à plusieurs reprises au cours de la nuit... et d'une bonne partie de la journée.

J'aurais voulu passer à la clinique vétérinaire pour lui prendre de la nourriture humide spécialement adaptée aux problèmes gastriques, mais il faisait une chaleur d'enfer ; puis, en vérifiant sur Internet, je me suis rendu compte que les deux ou trois cliniques les plus près étaient fermées (alors que l'une d'entre elles reste habituellement ouverte le dimanche).

Il n'avait absolument rien mangé de la journée et, plus inquiétant encore, surtout avec cette chaleur infernale, il n'avait pratiquement pas bu. En fin d'après-midi, comme il dormait près de la porte d'entrée, je suis allé lui porter un grand bol d'eau fraîche ; à mon grand soulagement, il s'est réveillé et il a bu. Puis il est venu me rejoindre à la cuisine. J'avais fait cuire du riz : je lui en ai servi une bonne portion, parsemée de quelques flocons de thon en boîte, bien rincé pour en enlever le sel. Il a mangé.

Normalement, après chaque repas, deux fois par jour, je lui donne deux ou trois petites gâteries différentes : foie de veau, de boeuf ou poisson déshydraté, petits biscuits aux herbes pour rafraîchir l'haleine, etc. Or, comme il était malade, je ne voulais pas lui donner quoi que ce soit qui irriterait davantage son intestin. Alors, je lui ai expliqué, comme des parents intelligents le feraient à leur enfant digne de leurs gènes, que, puisqu'il était malade, je ne pouvais pas lui donner de gâteries qui risquaient de le rendre plus malade encore, mais que si tout allait bien, je lui en donnerais « demain ». La tête inclinée d'un côté, il me regardait dans les yeux comme si je lui racontais quelque chose de vraiment intéressant. Il a semblé comprendre ou, du moins, me faire confiance ; il n'a pas insisté. Je lui ai proposé d'aller dehors, et il a joyeusement accepté l'invitation.

jeudi 31 août 2017

Il y a 20 ans, lady Di...

... disparaissait dans un accident de voiture à Paris.

Je n'oublierai jamais ce jour-là, et ceux qui suivirent.

Je n'oublierai jamais non plus à quel point Alexander l'aimait.

Je lui avais rendu hommage le 31 août 2008, et, plus brièvement, à quelques reprises par la suite.

samedi 26 août 2017

Journée du chien

Même si c'est, pratiquement, chaque jour sa fête, Rupert ne comprendrait pas que je ne souligne pas, en ce 26 août, cette journée du chien.
Je n'ai pas besoin de redire quelle place Rupert tient dans mon cœur, dans mon espace, dans ma vie. Il est pour moi un merveilleux compagnon, mais il est aussi l'ami de presque tout le monde dans notre rue, dans le quartier, jusque sur le campus de l'université McGill.
Je dis « presque tout le monde », car, où que l'on aille, il y a toujours un certain nombre d'imbéciles qui, dès qu'ils voient un chien, d'aussi loin qu'ils peuvent, traversent la rue ou marchent dans la rue jusqu'à ce que le chien soit dépassé et reviennent ensuite sur le trottoir.
Mais il y a des mères, des parents intelligents et soucieux de bien éduquer leurs enfants, qui font des détours avec leur bébé, leurs enfants, pour venir voir Rupert et permettre aux tout-petits d'approcher un chien qui est, parfois ou la plupart du temps, plus gros qu'eux et cependant tout doux et tendre avec eux. C'est tout au moins le cas de Rupert : il ne reste jamais indifférent lorsqu'il entend ou voit venir un bébé ou un enfant.
Aujourd'hui, sur le campus de l'université McGill, il a joué abondamment avec une famille composée des parents et de plusieurs enfants venus de Chicago pour accompagner l'une des adolescentes qui commence sa première année d'études universitaires à McGill. Ils avaient avec eux leur Golden retriever de dix ans qui explorait le campus à sa façon. Étonnamment pour une famille de Chicago, à l'exception du père moins à l'aise, ils parlaient tous un excellent français.

Dans un registre moins heureux, la Ville de Montréal, à la façon du maire Denis Coderre qui a souvent l'air, l'attitude, le discours et le comportement d'un chien enragé, s'apprête à faire euthanasier ou à « expatrier » plus de cinq cents (500 !!!) chiens que l'on prétend de la race des pittbulls parce que leurs propriétaires, pour une raison ou pour une autre que la Ville refuse même de préciser à chacun des propriétaires de ces chiens, n'ont pas réussi à obtenir le permis spécial requis par la municipalité pour garder ce type de chien. N'ayons pas peur des mots : en ce qui concerne les chiens, notre maire et son administration sont carrément racistes !

jeudi 3 août 2017

Rupert Brooke aurait...

... 130 ans aujourd'hui, 3 août 2017.

 
Rupert (à droite), 11 ans, et son frère Alfred, 8 ans

Rupert Brooke est né le 3 août 1887, dans la ville de Rugby (d'où viendrait le sport qui porte ce nom), dans le Warwickshire, en Angleterre. Son père, William, était maître d'école à la Rugby School, l'une des plus prestigieuses « public schools » d'Angleterre où Rupert fit la plus grande partie de ses études. Rappelons que, paradoxalement, en Angleterre, les « public schools » sont des institutions privées où l'élite se doit d'envoyer ses rejetons. L'éducation à la Rugby School prépare les jeunes esprits pour l'entrée dans les plus grandes universités (Oxford, Cambridge, ...), et met aussi beaucoup l'accent sur la pratique des sports.  Parmi les écrivains originaires de la ville de Rugby, citons Lewis Carroll (1832-1898) et Salman Rushdie (1947-)






Grâce à une bourse d'études, il poursuivit  ses études au King's College de Cambridge. Pendant ses études, il se joignit à des groupe d'écrivains, de poètes, d'amateurs de théâtre... Il vécut dans une maison qu'il a rendue célèbre par sa poésie, Old Vicarage, à Grandchester, où il fait toujours bon aller prendre le thé l'après-midi (« And is there honey still for tea ? » - Rupert Brooke).


Bien qu'il ait souvent dit et écrit que son adresse permanente serait toujours à Cambridge, c'est dans la mer Égée qu'il est décédé, le 23 avril 1915, jour de la Saint-Georges, fête nationale de l'Angleterre, à la suite d'une septicémie causée par l'infection d'une piqûre de moustique. Membre de la Royal Navy, il s'était embarqué pour une expédition militaire, mais il mourut à 27 ans (comme Alexander), deux jours avant le débarquement des Dardanelles. Puisqu'il est mort sur un navire-hôpital (français) sur lequel il avait été transféré, son corps aurait dû être jeté à la mer mais, grâce à l'intervention de Churchill à qui il avait été présenté, et bien qu'il ait si bien écrit son amour pour son pays et pour le Cambridshire en particulier, sa dépouille repose plutôt sur l'île de Skyros (ou Scyros), en Grèce.

lundi 26 juin 2017

Campus McGill

À l'occasion du 375e anniversaire de Montréal, le Musée des beaux-arts de Montréal a organisé, avec l'université McGill, une exposition de sculptures sur le campus de l'université, le long de la rue Sherbrooke.

Quand il a découvert cette série de personnages, Rupert a été fasciné et s'est très longuement amusé à aller voir chacun d'eux, à en faire le tour, à courir de l'un à l'autre, à les regarder dans les yeux, comme s'il s'agissait de vraies personnes (ce sont sans doute des moines, tibétains ou autres - je n'ai pas trouvé de plaque indiquant le nom de l'artiste, le titre de l'oeuvre, ...)

dimanche 11 juin 2017

Rule Britania*

Quand il a su que j'étais d'abord et surtout « Québécois », et non pas « Canadien » (sinon par la force politique, surtout pas de cœur ni d'esprit), Alexander a immédiatement posé sur son sac à doc le drapeau du Québec. De même que, peu de temps après notre première conversation, il est allé jouer au polo dans le comté de sa grande famille ; pour cette occasion, il avait accroché à la bride de son cheval un ruban bleu et un ruban blanc, « les couleurs de [son] cœur ».

Si je n'avais pas connu Alexander et son amour pour son chien, je n'aurais fort probablement pas de chien, pas de bulldog. Puisque Rupert est un bulldog anglais (et que je suis parfois agacé d'entendre les gens dire n'importe quoi qui insulte Rupert au sujet de sa race), je voulais depuis longtemps lui acheter une médaille qui permette de l'identifier, de l'associer davantage à ses origines. Je n'avais pas l'occasion de le faire. Or, il y a quelques jours, j'ai décidé de prendre le bus et d'aller lui acheter une médaille qui me fait plaisir, qui aurait beaucoup plu à Alexander, et qui suscite parfois des conversations avec les gens que l'on rencontre. À l'endos de ce drapeau britannique en forme d'os, j'ai fait graver le nom de mon compagnon et son numéro de téléphone ; j'avais l'intention de faire graver aussi son adresse de courrier électronique, mais je ne l'ai pas fait car l'espace disponible étant limité, il aurait fallu opter pour des caractères plus petits. Si nous partageons le même numéro de téléphone, Rupert a cependant sa propre adresse de courrier électronique (que je ne dévoilerai qu'aux personnes bien intentionnées).


*Rule Britania

mercredi 31 mai 2017

Avoir peur et haïr

Je n'avais pas l'intention d'en faire un article, mais après avoir rédigé spontanément ce long commentaire en réponse à d'autres commentaires sur la confusion qui existe entre la « peur » et la « haine » lorsqu'on évoque la « phobie », je me suis dit qu'il pourrait être intéressant de connaître le point de vue de mes lecteurs (il doit bien en rester un ou deux) sur la question. Voici donc mon commentaire :

Je ne suis ni linguiste ni « logue » de quelque sorte que ce soit, mais j’ai toujours cru qu’une « phobie » était une peur maladive de quelque chose ; ce n’est pas une peur «normale », mais une peur excessive, qui n’est pas justifiée, qui n’a pas de « raison d’être ». Je ne tenterai pas de comprendre ou d’expliquer sans comprendre ce qu’est une phobie ; le sujet est beaucoup trop complexe, comme le sont les sujets qui en sont atteints…
Mais la peur vient souvent de l’ignorance ou de la méconnaissance : la peur de l’étranger, la peur des homosexuels, etc., vient de ce qu’on ne les connaît pas, qu’on ne sait pas comment ils vont agir ou réagir dans tel ou tel contexte, etc. Ils constituent des « menaces », tout au moins à notre confort intellectuel… Dans le cas des phobies, la « peur » excessive peut ressembler à de la haine (on ne veut pas se retrouver face à ce dont on a peur, donc on fait tout pour le garder à distance, même par des discours ; et pour se donner raison, on « veut faire peur aux autres en essayant de leur transmettre nos « idées » sur ces choses ou sur ces gens dont il faut se tenir éloigné).
Je crois que la « phobie », c’est la peur excessive elle-même ; la haine vient par après, construite sur la peur injustifiée. La peur vient de l’ignorance, alors que la haine est un choix qui découle de sa peur.
Quand on a quelques neurones fonctionnels, on peut vite apprendre à dépasser sa peur, des homosexuels, par exemple, et apprendre à vivre en sachant qu’il y en aura toujours autour de nous, mais sans forcément éprouver de la haine envers eux (vivre et laisser vivre).
La haine n’est pas une réaction saine, équilibrée ; pour moi, la haine est le signe d’un déséquilibre, entretenu… Toute personne qui éprouve de la haine devrait selon moi être « soignée ». (Nous avons au Québec, par exemple, un premier ministre – Couillard – qui éprouve, et s’en vante, de la haine envers les souverainistes québécois ; ce neurochirurgien qui a un temps vendu ses services au gouvernement de l’Arabie Saoudite, devrait vraiment se faire soigner pour la haine qu’il dit éprouver et qu’il exprime publiquement).
Mon chien aboie parfois devant des objets ou des situations qu’il ne connaît pas ; un colis ou un sac qui ne devrait pas être là est une « menace » potentielle, aussi longtemps qu’il n’a pas été rassuré sur sa dangerosité. Mais jamais mon chien n’entretient de « haine » envers qui ou quoi que ce soit… Alors que les humains aiment « jouer » à se faire peur (et à faire peur aux autres) en se créant toutes sortes de scénarios.
On peut craindre et combattre les fanatiques sans nécessairement les détester.
Je crois donc que la « phobie » est la crainte excessive, alors que la haine peut accompagner la phobie mais la haine n’est pas la phobie elle-même…

Pour lire les commentaires qui m'ont inspiré celui-ci, rendez-vous sur le blogue de Dr CaSo

mardi 9 mai 2017

Ils sont (désormais) timbrés !




Le 20 juillet 2005, le Canada adoptait la Loi sur le mariage civil, permettant aux individus de même sexe de se marier et de voir ainsi leurs droits reconnus de la même façon que ceux des hétérosexuels.

Le Canada était alors le quatrième pays au monde à reconnaître ce droit et le premier pays à l'extérieur de l'Europe

Postes Canada lançait aujourd'hui ce nouveau timbre pour souligner l'adoption du « mariage égal », c'est à dire le droit égal d'épouser la personne que l'on aime.

Quand donc le Québec émettra-t-il ses propres timbres ?

dimanche 7 mai 2017

Pour être heureux...

Ce qu'il faut pour être heureux

Impromptu
Fait à un souper dans une cour d'Allemagne

Il faut penser, sans quoi l’homme devient,
malgré son âme, un vrai cheval de somme.
Il faut aimer, c’est ce qui nous soutient,
sans rien aimer il est triste d’être homme.

Il faut avoir douce société,
des gens savants, instruits, sans suffisance,
et des plaisirs de grande variété.
Sans quoi les jours sont plus longs qu’on ne pense.

Il faut avoir un ami, qu’en tout temps,
pour son bonheur, on écoute, on consulte,
qui puisse rendre à notre âme en tumulte.
Les maux moins vifs et les plaisirs plus grands.

Il faut, le soir, un souper délectable
où l’on soit libre, où l’on goûte à propos,
les mets exquis, les bons vins, les bons mots.
Et sans être ivre, il faut sortir de table.

Il faut, la nuit, tenir entre deux draps
le tendre objet que notre cœur adore,
le caresser, s’endormir dans ses bras.
Et le matin, recommencer encore.


* * *

Variante

Il faut, la nuit, dire tout ce qu'on sent
Au tendre objet que votre cœur adore ;
Se réveiller pour en redire autant,
Se rendormir pour y penser encore.


Voltaire, Épitres (Œuvres, vol. 13, pp. 311-312)

jeudi 4 mai 2017

J'aime, tu aimes... ils aiment

J'aime mon chien
Tu aimes mon chien
...
Ils aiment mon chien

L'année universitaire s'est terminée il y a quelques jours, et Rupert a été assez occupé à regarder tout le mouvement qu'il y avait dans le quartier.
Les étudiants venant d'ailleurs retournaient dans leur famille, pour la plupart, et remplissaient des voitures de leurs affaires personnelles pour l'été.
Un grand nombre de ceux qui ont terminé leurs études et qui repartaient pour de bon dans dans leur lieu d'origine avaient loué des camions ou des remorques attachées à leur voiture ou à celle de leurs parents venus les chercher.
Rupert était aux premières loges et ne voulait rien manquer de ce ballet de camions qui arrivent, que l'on charge de toutes sortes de meubles et d'objets encombrants, et qui s'en vont. La rue en était pleine. Il ne comprenait sûrement pas pourquoi, en deux ou trois jours, tant de gens ont besoin de déplacer tant de choses. Il est curieux et, souvent, il veut aller vérifier sur place, presque le nez dans la voiture ou le camion pour mieux sentir ce qui se passe. Mais ces jours-ci, il y avait trop d'action partout ; il n'y arrivait pas.
De temps à autre, quelque chose qu'il ne reconnaissait pas, un monstre dangereux sans doute, ou une autre menace potentielle, et il aboyait fortement ; j'avais beau lui expliquer que nous n'étions en danger ni l'un ni l'autre, il n'était pas toujours convaincu.
Plusieurs étudiants ou des gens qui les accompagnaient venaient le voir, ravis de faire sa connaissance ou un peu tristes de lui faire leurs adieux.

Il était temps que cela finisse ! Même les concierges des immeubles voisins sont épuisés par la quantité de meubles et de déchets laissés n'importe où par les étudiants déménageurs et qu'ils devaient ramasser...

Mais Rupert est un peu triste : il a perdu un bon nombre de ses admirateurs réguliers. Il en reste tout de même beaucoup et chaque jour il y en a de nouveaux. Hier soir, par exemple, deux jeunes qu'il voyait pour la première fois se sont exclamés en voyant Rupert, en disant que c'est le plus beau chien à Montréal. Je dis souvent aux gens qu'heureusement il ne souffre pas de la vanité dont sont atteints tant d'êtres humains, car il aurait la tête enflée à se faire dire si souvent qu'il est beau.

Même moi, je ne suis pas toujours conscient à quel point je suis privilégié d'avoir un compagnon qui suscite à ce point l'intérêt des gens, des sourires chez les plus discrets, des câlins et des tentatives de jeu chez d'autres... Bien des gens doivent penser que je suis riche pour avoir un si beau chien qui, sans rien faire, attire tant l'attention. Et en fait, je suis riche de ce compagnon merveilleux... Et souvent je regrette de ne pas pouvoir partager ce bonheur avec Alexander qui, avec son chien, devait vivre à peu près la même chose, sauf qu'il devait sans doute se protéger davantage contre les paparazzi et autres envahisseurs de l'intimité...

Je dis parfois que je serais millionnaire si j'avais demandé un dollar à chaque personne qui a voulu le prendre en photo... et parfois je me demande pourquoi je ne l'ai pas fait. J'ai lu quelque part, il y a très longtemps, je ne me souviens plus où exactement, cette phrase qui, si cette parcelle de ma mémoire est fidèle, disait : « Donnez-moi de l'argent, puisque j'aime ma mère. »* De la même manière, je pourrais dire : « Donnez-moi de l'argent, puisque j'aime mon chien. » Mais, au fond, il serait plus juste de dire : « Donnez-moi de l'argent, puisque vous aimez mon chien. »

* Il s'agit en fait d'un vers qu'aurait inventé Villiers de L'Isle-Adam, pastichant le texte d'une pièce de François Coppée.

lundi 6 février 2017

Le pistolet sur la tempe...

Je n'ai jamais eu d'enfant, je n'ai jamais été père, au sens où on l'entend généralement. Pourtant la question de la paternité m'a toujours intéressé, plus ou moins consciemment, plus ou moins ouvertement... Serait-ce à cause de ce questionnement, non résolu, que je n'ai jamais fait moi-même ce qu'il fallait pour mettre au monde un enfant de mon sang ? Ou serait-ce plutôt parce que je n'ai jamais participé à la mise au monde d'un enfant que je me suis toujours senti curieux, sensible et vulnérable face à la question de la paternité ? Il est fort possible que la réponse soit beaucoup plus complexe que cela, qu'elle comporte une part de chacune de ces hypothèses, ainsi que d'autres éléments qui ne me sont pas encore venus très clairement à l'esprit.

Je crois que bon nombre d'études scientifiques ont démontré que la plupart des hommes qui deviennent pères ont tendance à reproduire le modèle qu'ils ont eu : le fils reproduit le père... ou bien il se promet d'être tout à fait différent. En ce qui me concerne, sans vouloir par là critiquer mon père, mes parents, je crois que je me suis toujours efforcé, à défaut d'un modèle proche qui me convienne, d'établir avec les autres des relations qui ne correspondent pas à un type en particulier mais qui s'inventent au fur et à mesure qu'elles progressent.

Je ne me souviens plus très précisément, mais je crois avoir déjà écrit dans les pages de ce blogue que, si je n'ai jamais eu d'enfants qui portent mon nom, il m'est arrivé plusieurs fois d'éprouver, dans telle ou telle relation (pas forcément amoureuse, mais avec un fort engagement affectif), des sentiments qui peuvent s'apparenter à ceux qu'éprouve un père pour ses enfants, et même, compte tenu de ma sensibilité, des sentiments que l'on pourrait qualifier de maternels. « Être homme, c'est précisément être responsable », a écrit Saint-Exupéry. Et c'est probablement cette « responsabilité » qui me paraissait primordiale du moment que j'amorçais une relation privilégiée avec un être qui venait vers moi (généralement des êtres plus jeunes que moi, mais la différence d'âge n'était pas toujours si importante). Le besoin de protéger, donc, contre les autres, contres les intempéries, les accidents, les forces du mal, mais aussi le besoin de partager des émotions, des plaisirs, des moments de tendresse et de complicité...

Je suis tombé par hasard sur une phrase d'un roman de Michael Connelly, au sujet de la paternité : « C'est comme d'avoir un pistolet sur la tempe du matin au soir ! » Et j'ai pu ressentir comment il pouvait dire cela : il y a bien sûr dans une relation privilégiée, comme celle d'un père et de son enfant, mais pas uniquement, la conscience presque constante des plaisirs, des joies, des moments de bonheur partagé, mais aussi les craintes, les inquiétudes, la terreur que quelque chose arrive, que l'être aimé en soit atteint ou, pire, nous soit enlevé...

Quelques mois après avoir fait la connaissance d'Alexander, il m'a annoncé qu'il était reçu médecin spécialisé en médecine d'urgence puis, peu de temps après, que son état de santé et sa vie même étaient menacés. Immédiatement, je lui ai exprimé mon soutien, je l'ai assuré de ma présence, de ma confiance, de ma détermination à l'accompagner dans sa guérison... et bien au delà. Malgré tout, j'en ai perdu le sommeil : la menace était bien là, terrible, et cette seule idée avait envahi mon corps, mon sang, mes tripes, comme un venin... J'en avais toujours mal au ventre. Et s'il m'arrivait de dormir quelques minutes, j'étais vite réveillé par un sentiment d'urgence : comment pouvais-je dormir alors que la vie de celui que j'aimais plus que tout au monde était menacée ? Jour et nuit, j'avais le téléphone et l'ordinateur à mes côtés pour être sûr de ne rien manquer si un message arrivait le concernant... Le « pistolet sur la tempe » ne se laissait pas oublier !

Chaque soir, au moment d'éteindre les lampes du salon avant d'aller dormir, je regarde Rupert étiré sur pratiquement toute la longueur du canapé ou, au contraire, ramassé sur lui-même comme un petit lapin ; je l'écoute ronfler, j'admire son total abandon, sa confiance inébranlable en l'ordre des choses, et je suis ému. Mais en me rendant à ma chambre, je ne peux m'empêcher de penser que je suis responsable de ce petit être : il ne faudrait pas qu'il m'arrive quelque chose qui m'empêche de m'occuper de lui. Et, sans trop vouloir y penser, je sais bien que son espérance de vie est assez limitée et qu'un jour, si tout va bien, la vieillesse et ses maux le rattraperont aussi. Et je me demande pourquoi je me suis engagé dans cette relation qui risque de me faire souffrir un jour, mais je ne m'attarde pas trop à ce questionnement : les bonheurs partagés au jour le jour m'apportent aussitôt la réponse. Et je repense à cette citation d'Edmond Rostand qui m'a si souvent accompagné : « C'est la nuit qu'il est beau de croire à la lumière. »