
Jusqu'à la fin de mes études secondaires, j'ai été un bon élève, la plupart du temps, même, un élève modèle. Souvent premier de classe, je n'avais pas besoin de travailler fort et d'étudier beaucoup pour avoir de bonnes notes. Cela m'a parfois nuit par la suite car je n'avais pas appris une bonne méthode de travail intellectuel, pas appris à étudier sérieusement.

À la fin des études secondaires, j'avais entrepris des études en pédagogie ; je voulais devenir enseignant, comme un certain nombre de membres de ma famille. Compte tenu de mes origines, de mon milieu, l'enseignement me semblait la seule avenue possible. À seize ans, toutefois, je ne me sentais pas assez bien préparé, psychologiquement, à entreprendre des études universitaires ; je ne me sentais assez mûr. J'ai donc décidé de m'inscrire à l'université de la vie.
Pendant cinq ans, j'ai fait autre chose : j'ai occupé divers emplois, étudié le chant, un peu de piano, un peu d'art dramatique et de danse ; puis j'ai vécu la vie d'artiste à Paris, en France. Au retour à Montréal, je me suis rendu compte que je ne connaissais rien : je me suis plongé dans les livres et j'ai décidé de m'inscrire à l'université. Toutefois, mon parcours universitaire a été assez décousu ; j'ai changé de discipline à quelques reprises. Il m'a fallu plusieurs années avant de terminer un programme complet.

Mes études ont fini par me servir. Depuis plusieurs années, j'ai occupé des emplois, j'ai exercé des fonctions et assumé des responsabilités en lien avec mes études. Je ne me sens pourtant pas un « universitaire », un intellectuel ni un théoricien.

Je suis toujours un peu incrédule quand on m'invite dans les universités pour aller parler de ma profession aux étudiants ; j'ai tendance à me demander : « Pourquoi moi ? » Je ne dois pourtant pas être si mauvais car, depuis quelques années, on m'invite à quelques reprises chaque année, dans différentes universités, à venir parler sous les toits de ces vénérables institutions. Ces jours-ci, par exemple, je dois rencontrer quatre classes d'étudiants...

Vendredi dernier, j'ai reçu une lettre qui m'a encore une fois agréablement surpris. La direction d'un programme universitaire me demande de faire partie du conseil chargé d'assurer la qualité universitaire de ce programme et sa capacité à répondre aux besoins des étudiants et du milieu professionnel. Puisque je me considère toujours comme un (ancien) étudiant marginal, au parcours erratique, je suis toujours étonné que l'on me demande de venir rencontrer les étudiants et d'évaluer, avec de très respectables professeurs et autres professionnels, le contenu le contenu de leur programme.