L'ex-mairesse de la ville de Québec,
Andrée P. Boucher, décédée le 24 août dernier, n'était pas seulement connue pour le mauvais goût dans le choix de ses robes ; ses adversaires redoutaient ses coups de gueule, non pas pour leur justesse mais en raison de leur éclat exagéré, tout autant que son entêtement. Sa fille, France, présidente-directrice générale de l'OQLF, semble tenir d'elle sa tête de c... (je n'écrirai pas le mot que j'ai en tête, puisque ce billet ne parle pas du Salon de l'agriculture).
L'Office québécois de la langue française
(OQLF) est un organisme public créé en 1961, et qui s'est vu confier par l'Assemblée nationale du Québec, en 1977, la responsabilité d'appliquer et de faire respecter la Charte de la langue française.
Selon cette Charte, la mission et le rôle de l'organisme sont :
- de définir et de conduire la politique québécoise en matière d'officialisation linguistique, de terminologie ainsi que de francisation de l'Administration et des entreprises;
- de veiller à ce que le français soit la langue habituelle et normale du travail, des communications, du commerce et des affaires dans l'Administration et les entreprises;
- d'aider à définir et à élaborer les programmes de francisation prévus par la loi et en suivre l'application;
- de surveiller l'évolution de la situation linguistique au Québec et d'en faire rapport tous les cinq ans au ministre;
- d'assurer le respect de la Charte de la langue française, agissant d'office ou à la suite de la réception de plaintes;
- d'établir les programmes de recherche nécessaires à l'application de la loi et d'effectuer ou de faire effectuer les études prévues par ces programmes.
Parmi ses pouvoirs, l'Office peut :
- prendre les mesures appropriées pour assurer la promotion du français;
- assister et informer l'Administration, les entreprises, les individus et les groupes en ce qui concerne la correction et l'enrichissement de la langue française;
- recevoir leurs observations et leurs suggestions sur la qualité de la langue ainsi que sur les difficultés d'application de la présente loi, et en faire rapport au ministre.
Depuis des mois, les Québécois s'inquiètent du recul de la langue française au Québec, inquiétudes alimentées par la publication de rapports de
Statistique Canada et par les analyses parfois très fouillées faites par les universitaires et par les médias. Depuis des semaines, les médias dénoncent l'OQLF et le gouvernement qui dissimulent des
études alarmantes sur la situation du français au Québec. Durant tout ce battage médiatique, la présidente-directrice de l'Office québécois de la langue française, France Boucher, la fille de l'autre à la tête dure, se réfugiait derrière la publication imminente d'un rapport quinquennal sur la situation du français pour refuser de faire quelque commentaire que se soit, muselant aussi ses principaux collaborateurs, universitaires, chercheurs, qui ont préparé et rédigé depuis cinq ans dix-huit études, plus de mille pages.
Depuis quelques semaines, les membres du comité d'experts chargés de mener des études et de conseiller l'Office québécois de la langue française dénoncent la culture paranoïaque du silence et du secret qu'impose à ses collaborateurs, chercheurs universitaires, la pdg France Boucher. Les membres de ce comité d'experts, qui devaient participer à la rédaction et réviser le rapport à paraître aujourd'hui, se sont vu imposer des conditions inacceptables et tous les membres de ce comité de suivi ont remis leur démission.
Aujourd'hui, l'OQLF dévoilait son
rapport tant attendu. Or, ce qui a fait les manchettes, ce n'est pas le contenu du rapport parce que, contrairement à ce qui se fait normalement, les journalistes n'ont pas reçu le document avant la conférence de presse, n'ayant par conséquent pas le temps d'en prendre connaissance et de poser les questions pertinentes. Les journalistes ont exprimé leur insatisfaction au sujet de la façon de faire de la présidente-directrice générale de l'OQLF et ont posé plusieurs questions au sujet de la culture du silence, de la démission du comité d'experts, etc. Quant les journalistes ont demandé à la présidente de donner un avis, une conclusion qu'elle tirait de ce bilan des cinq dernières années, elle a refusé de le faire, renvoyant les journalistes aux 1 000 pages de des études et au 197 pages du rapport.
L'arrogance de la présidente-directrice générale ne s'est pas relâchée une seconde durant la présentation de son rapport et la période de questions qui a suivi. France Boucher, digne fille de sa mère, vient du personnel politique du gouvernement Libéral de Jean Charest, ce parti qui est élu par les puissants anglophones de Montréal, qui ne reçoit pas l'appui de vingt pour cent des francophones québécois. Ce gouvernement n'a aucune crédibilité quand il prétend vouloir assurer la promotion de la langue française puisqu'il est élu par les anglophones. France Boucher, la fille de l'autre, semble avoir été nommée à la présidence de l'OQLF pour y jouer un rôle politique, celui de donner une plus grande satisfaction aux anglophones de Montréal, cacher aux francophones les données qui pourraient les inquiéter et de faire taire les experts qui étudient l'état de la langue française au Québec.
Devant le manque de transparence de l'OQLF et l'arrogance intolérable de sa présidente, j'espère que de nombreuses voix s'élèveront au cours des prochaines semaines pour réclamer la démission immédiate de France Boucher. Toutefois, quand on sait que la ministre de la Culture et des Communications, dont relève l'OQLF, qui a quitté l'an dernier un poste de journaliste à Radio-Canada où elle déprimait pour accepter l'invitation du chef Libéral, est aussi à l'aise en politique et surtout dans tout ce qui relève de la culture, qu'un poisson rouge serait à l'aise dans la cage de ma perruche, on peut tout de suite en conclure que nous aurons droit à la langue de bois, aux messages pré-enregistrés. Celle qui n'était pas une très bonne journaliste à Radio-Canada n'a pas acquis de compétences supplémentaires en devenant ministre; pour défendre au Québec la langue et la culture, il faut un peu plus que d'être une personne gentille et souriante qui ne fait que répéter mot à mot les petites phrases apprises par coeur que lui ont rédigées ses conseillers.