mercredi 18 novembre 2009

Ah ! comme la neige a neigé !

Ah ! comme la neige a neigé !
Ma vitre est un jardin de givre.




Alexander avait découvert l'existence d'Émile Nelligan sur le blogue de Béo, un jour où elle affichait ses lectures du moment.

Immédiatement, il avait commandé tout ce qu'il ait pu trouver de la poésie du poète québécois. Depuis son enfance, Alexander dévorait la poésie (ce qui était tout à fait naturel : il était lui-même la poésie). Il avait tout lu en une nuit et il m'avait envoyé plusieurs poèmes, ceux qu'il préférait. N'ayant pas trouvé dans son riche choix de poèmes celui du « Vaisseau d'or », je lui avais demandé s'il avait oublié ou rejeté celui-là. Non, ce poème n'était pas publié dans les recueils qu'il avait commandés. Il a cherché encore et il a commandé aussitôt d'autres poèmes de Nelligan.

Il aimait cette poésie et je peux comprendre aussi qu'il était très fier de découvrir un grand poète qui était plus près de moi puisqu'il avait grandi et vécu à Montréal. J'avais mentionné à Alexander que je passais assez régulièrement devant une maison de la rue Laval où le poète a vécu plusieurs années avec sa famille, et que je lui en enverrais des photos dès que je le pourrais. Dans ses dernières paroles, Alexander avait fait allusion à mes promenades quotidiennes, aux nombreuses photos que je prenais afin de pouvoir les lui envoyer. Puis il a parlé des images de la maison d'Émile Nelligan... C'est en parlant de ces images qu'il a prononcé ses derniers mots avant de fermer les yeux et de sombrer dans le silence : « ... Je demanderai à Alcib ».

C'est aujourd'hui l'anniversaire du décès d'Émile Nelligan, disparu le 18 novembre 1941. Alexander voudrait que je souligne aussi cette date.

Parmi les poèmes qu'il préférait, assez nombreux, Alexander avait choisi celui-ci :

Vieux piano

L'âme ne frémit plus chez ce vieil instrument ;
Son couvercle baissé lui donne un aspect sombre ;
Relégué du salon, il sommeille dans l'ombre
Ce misanthrope aigri de son isolement.

Je me souviens encor des nocturnes sans nombre
Que me jouait ma mère, et je songe, en pleurant,
À ces soirs d'autrefois - passés dans la pénombre,
Quand Liszt se disait triste et Beethoven mourant.

Ô vieux piano d'ébène, image de ma vie,
Comme toi du bonheur ma pauvre âme est ravie,
Il te manque une artiste, il me faut L'Idéal ;

Et pourtant là tu dors, ma seule joie au monde,
Qui donc fera renaître, ô détresse profonde,
De ton clavier funèbre un concert triomphal ?



Ajout (20 novembre 2009) : En commentaire, Lux évoque un souvenir de jeunesse, de sa première jeunesse, en faisant allusion à ce poème de Claude Léveillé mis en musique par l'auteur-compsiteur-interprète Claude Léveillé qui, soit dit en passant, fut l'un des compositeurs d'Édith Piaf. Pour répondre à sa question, voici, sur YouTube, « Soir d'hiver », poème d'Émile Nelligan, interprété par Claude Léveillé sur sa propre musique.

17 commentaires:

Chroniqueur a dit…

« Je demanderai à Alcib »: voilà une bien belle réponse que ce billet.

Alcib a dit…

RPL : Je te remercie de ces mots... En rentrant à la maison, un peu plus tôt, je pensais, en cherchant les étoiles dans la nuit, à tous les mots d'Alexander qui me manquent tellement, et je me regrettais de ne pas pouvoir répondre directement à certains d'entre eux...

LUX a dit…

Mon cher Alcib, tu me rappelles un très beau souvenir de ma jeunesse.

Quand je faisais partie d'une chorale, il y a... un siècle, on a eu le privilège de chanter pendant plusieurs années, le poème:
« Ah ! comme la neige a neigé ! Ma vitre est un jardin de givre. Ah ! comme la neige a neigé ! Qu'est-ce que le spasme de vivre pour la douleur que j'ai, que j'ai?...». La musique fut composée par l'excellent pianiste québécois Claude Léveillé. J'ai malheureusement oublié le titre du poème. Est-ce possible que ce soit: «Jardin d'hiver»?

Imagine cette beauté chantée par un choeur de quatre voix mixtes [soprano-alto-ténor-basse]... Frissons garantis et chair de poule !

Alcib a dit…

Lux : Merci infiniment de partager avec nous ce touchant souvenir et, surtout, de nous rappeler que ce poème a été en effet mis en musique par Claude Léveillé. On peut l'entendre sur YouTube (j'ai ajouté le lien au bas de l'article), avec de belles images de neige. Je regrette de ne pas avoir fait entendre à Alexander cette interprétation par Claude Léveillé ; je crois qu'il en aurait été très ému... Mais il doit l'écouter de là-haut.

Je regrette aussi de ne pas pouvoir entendre votre interprétation de ce poème, mais je peux imaginer assez bien ce que cela pouvait être. Émouvant expérience, j'en suis sûr. Et frissons pas causés uniquement par le froid auquel fait penser la neige...

Beo a dit…

Je sais pas mais je trouve cette version de Léveillé un peu traînante..... j'aimerais bien entendre la version chorale à 4 voix, je trouve aussi dommage de n'avoir pas eu l'occasion de la chanter du temps de ma jeunesse-lointaine itou-, d'alto.

Et je réitère mon étonnement au fait que Nelligan soit méconnu en Angleterre...

Alcib a dit…

Béo : Léveillé, c'est plutôt nostalgique, pour le moins ; sa musique n'est pas écrite en mode majeur.
Il faudra que nous demandions à Lux de nous recréer son ensemble choral et de nous faire entendre cette version qui m'intrigue aussi.

Très jeune, il avait été question que je participe a unechorale, mais... il n'y en avait pas chez moi, sauf les deux ou trois personnes qui chantaient à l'église... Mais j'aurais été très fier de chanter avec eux. Cela fait partie des choses à côté desquelles je serai passé parce que personne ne s'est donné la peine de mener à terme une idée...

Je ne sais pas si Nelligan est inconnu en Angleterre (après tout, il est d'origine irlandaise). Alexander en a découvert l'existence quand tu avais affiché son nom dans ta liste de lectures.

Alcib a dit…

Ce que je trouve merveilleux, moi, mais ça ne m'étonne pas d'Alexander, c'est qu'il se soit emmpressé de dévorer la poésie de Nelligan, de lire tout ce qu'il a trouvé.

Alisandra a dit…

"L'âme ne frémit plus chez ce vieil instrument ;
Son couvercle baissé lui donne un aspect sombre ;
Relégué du salon, il sommeille dans l'ombre
Ce misanthrope aigri de son isolement.

Je me souviens encor des nocturnes sans nombre
Que me jouait ma mère, et je songe, en pleurant,
À ces soirs d'autrefois - passés dans la pénombre,
Quand Liszt se disait triste et Beethoven mourant.

Ô vieux piano d'ébène, image de ma vie,
Comme toi du bonheur ma pauvre âme est ravie,
Il te manque une artiste, il me faut L'Idéal ;

Et pourtant là tu dors, ma seule joie au monde,
Qui donc fera renaître, ô détresse profonde,
De ton clavier funèbre un concert triomphal ?


Je me suis émue quand j'ai lu cette poésie..

Alcib a dit…

Au-delà des nuages... : Tu as bien raison d'être émue... Et ton émotion me confirme que tu as une belle sensibilité et que tu comprends très bien le français car la poésie n'est pas toujours facile à comprendre.
Ce poème est en effet très émouvant, mais le fait qu'Alexander l'ait choisi, lui qui jouait si bien du piano, aussi, ajoute encore à mon émotion.
Alexander jouait très bien du piano mais puisque son appartement était situé au dernier étage d'un immeuble du centre de Londres et que sans doute l'ascenseur n'était pas assez grand pour monter le piano, son piano était resté à la maison familiale habitée par son frère.
Il avait un autre piano chez sa grand-mère, à la campagne, et, l'année dernière à peu près à cette date, il avait joué du piano pour divertir sa grand-mère et ses invités durant une panne d'électricité.

Alisandra a dit…

Excuse-moi!
Mais j'ai une demande pour toi!
"Qui est Alexander?"
J'ai vu qu'il est "présent" dans tout ce que tu écris...

Alcib a dit…

Au-delà des nuages... : Tu auras peut-être déjà trouvé la réponse à ta question.
Alexander était un garçon merveilleux, vraiment exceptionnel. Il était mon amoureux depuis le 10 avril 2008... Il est décédé le 7 juillet 2009, à 27 ans. Voilà quelques éléments de réponse. Mais pour dire vraiment qui est Alexander, il me faudrait écrire au moins trois livres.

Alisandra a dit…

Je regrette qu'Alexander n'est plus parmi nous..

Alisandra a dit…

J'aime aussi la poésie..Maintenant J'ai fini d'écrire une poésie sur le temps..
Si tu voulais me dire ton opinion sur ma poésie je serais très heureuse..
C'est un petit "cadeau" pour une personne spéciale..
L’histoire de notre vie:
On est né
On a vu
On a senti
On a pleuré
On a connu
On s’est accoutumé
On a écouté
On a appris
On a réussi
On a reçu
On a eu
On a été heureux
On a remercié
On a souri
On s’est joué
On a dessiné
On a chanté
On a peint
On a lié d’amitiés
On a continué
Le temps s’est changé
On vit
On se hâte
On lit
On écrit
On efface
On promet
On fait
On a des droits
On a des obligations
On pense
On rêve
On s’imagine
On crée
On transforme
On se demande
On répond
On veut
On peut
On désire
On aime
On s’émeut
On offre
On caresse
On a de la confiance
On apprécie
On transmet
On voyage
On se retourne
On communique
On décide
On sauve
On essaye
On attire
On tient
On garde
On va
On rencontre
On vient
On pénétre
On arrive
On raconte
On plaît
On touche
On continue
Le temps est différent...
On commence
On croit
On parcourt
On cherche
On donne
On sacrifie
On manque
On attend
On s’inquiéte
On oublie
On fait des différences
On ment
On déçoit
On est ingrat
On cache
On critique
On se moque
On est indifférent
On se vante
On gâche
On appele
On confond
On a tort
On détruit
On a peur
On hésite
On se refuge dans ses sentiments intérieurs
On part
On besoin
On prie
On soupire
On reste seul
On comprend
On découvre
On m’énerve
On est triste
On est blessé
On sait
On regrette
On hait
On juge
On se querelle
On se sépare
On perd
On me venge
On finit
On souffre
On ne rêve plus!!
On est „malade”
On continue
Le temps passe...
On vivrai
On lutterai
On aura une famille
On sera heureux
On se souviendra
On taira
On souffra
On continuera
On tombera malade
On sera seul
On ..
„On écrit l’histoire..Dans la mémoire..Mais on n’écrit pas la fin..”

Alcib a dit…

Au-delà des nuages... : C'est un très beau poème et la personne « spéciale » qui le recevra devra être heureuse, privilégiée de recevoir un si joli cadeau.
Tu as en effet résumé en quelques mots le parcours de toute une vie, toutes ses dimensions...
En effet, on n'écrit pas la fin car on ne la connaît pas avant que ce soit terminé ; et quand l'histoire est terminée, on n'est pas là pour en écrire la fin soi-même.
Quelqu'un d'autre écrira la fin pour nous, mais ce ne sera pas vraiment la fin car nous ferons désormais partie de l'histoire de ceux qui continueront d'écrire...

Alisandra a dit…

J'ai lu encore une fois ..ce poème..et j'ai vu que j'ai quelques fautes..
Oui...tu as raison..Je suis dans la période quand "Le temps s’est changé"..
J'espère qu'elle sera heureuse..elle est très spéciale..

Alcib a dit…

Au-delà des nuages... : J'espère aussi pour toi qu'elle sera heureuse. Si tu le veux, elle devrait l'être.

Je me souviens que j'ai oublié de répondre à l'une de tes questions : « vous » ou « tu » ?
Sur les blogues, le « tu » est plus simple et plus fréquent.

Alisandra a dit…

Oui..mais je ne sais pas..même si je la connais depuis deux ans ,je ne peux dire qu'il y a une relation "parfaite"parce que il y a une différence entre nous..Je crois qu'elle est une personne divine..elle m'aide beaucoup..nous parlons presque toujours..mais je ne sais pas qu'elle pense de moi..