Cette fois-ci, pour la rédaction du mois, nous sommes plusieurs à publier simultanément, en tenant compte des fuseaux horaires, un billet sur « les rencontres par Internet ». À six heures du matin, heure de Montréal, ou midi, heure de Paris, les billets de d'
Aurélie (Norvège), d'
Hépao (France), d'
Hervé (France durant 15 jours encore, bientôt au Québec), de
Miss Lulu, de Grandbled (Canada), de
Laurent (Italie), d'
Olivier de Montréal (Québec) et de moi-même, de Montréal (Québec). Il y a quelques semaines, j'ai accepté d'y contribuer et, quelques heures avant l'heure de tombée, je me demande pourquoi j'ai accepté de me soumettre à cette pression, sachant que je serais très occupé... Il me manque de temps pour mettre un peu de créativité dans ce jeu, mais ce n'est pas le temps d'abandonner ; il faut respecter la parole donnée.

Il fut un temps où les ordinateurs ressemblaient à cela ; il n'était donc pas question d'en avoir un dans le coin de son salon ou de sa chambre à coucher.


Puis, dans les années 1980, les ordinateurs personnels prirent moins de place et commencèrent à se répandre dans les foyers. Je n'eus mon premier ordinateur qu'en 1990, que j'avais acheté d'un ami qui l'avait eu de son employeur ; le texte s'affichait alors en vert sur écran noir. L'année suivante, un autre ami me vendit un modèle plus récent. En 1992, j'achetai un ordinateur tout neuf, avec écran couleur. Je me sentais tout à fait moderne d'avoir chez moi un ordinateur qui me permettait de mettre au propre mes notes de lecture et de rédiger divers documents personnels ou administratifs.

Je ne me souviens pas exactement du moment où j'ai commencé à utiliser Internet, au travail surtout, mais je me souviens qu'au début de l'année 2000, quand j'entendais des clients ou des collègues de travail parler de « clavardage », je me disais que certaines personnes avaient vraiment du temps à perdre, à discuter de banalités avec des étrangers en utilisant Internet.

Le 5 août 2000, je m'abonnai au service Internet à la maison. Dès que le technicien qui venait de terminer l'installation quitta la maison en me disant que je pouvais naviguer librement, je fis un test en envoyant un courriel à un ami. Puis je me mis à chercher n'importe quoi en entrant des mots clés dans la fenêtre de divers moteurs de recherche. Je ne cherchais rien de précis, trop heureux de voir qu'un seul mot clé pouvait générer des dizaines, des centaines, des milliers de sites différents.
Je m'attardais sur certains sites en essayant d'aller plus loin, de voir quel genre d'information je pourrais trouver. C'est alors que je tombai sur un salon de clavardage ; il fallait s'inscrire et choisir un pseudonyme pour y avoir accès. Je cherchai un pseudonyme qui aurait quelque chose à voir avec la Grèce. Je rejetai les noms des divinités car je trouvais cela trop prétentieux ; je pensai à Socrate, mais je n'osai pas non plus. Je choisis Alcibiade, mais je décidai de l'abréger ; mon pseudo date de ce premier jour où j'eus accès à Internet chez moi.
J'essayai donc d'entrer dans ce salon de clavardage, sans savoir comment cela fonctionnait. Quelqu'un, dont le pseudo était PierreB, me salua, m'expliqua ce que je devais faire et je me mêlai à la conversation de ces Européens, pour la plupart. J'étais séduit par cette technologie qui me permettait de dialoguer en direct avec des gens qui se trouvaient en France, en Belgique, en Suisse, mais aussi en Espagne, en Italie, en Russie, en Chine, en Amérique latine...

Dès ce jour, ma vie a changé. Je vivais à Montréal, mais j'avais désormais accès à un réseau d'amis virtuels, francophones pour la plupart, qui se retrouvaient tous les jours, à toute heure, dans un salon que l'on disait de « Paris - Île-de-France ». Comme je n'avais pas physiquement traversé l'Atlantique depuis quelques années, j'avais vraiment le sentiment de renouer avec la vie française, de participer à la vie parisienne. Je passais des heures chaque soir à dialoguer avec ces amis virtuels, nombreux et dynamiques. L'origine grecque de mon pseudo était évidente pour certains, cultivés, qui étaient aussi des amis de la Grèce ; ce pseudo m'attira plusieurs amitiés, virtuelles au départ, dont je suis, six ans plus tard, encore très fier...
Quelques mois après, je remarquai que dans un autre salon de clavardage, quelqu'un était seul ; par curiosité, j'entrai et le saluai. Puisque son pseudo était celui d'un peintre français, je lui demandai immédiatement s'il était artiste ; il me répondit en précisant qu'il habitait la ville de Québec et qu'il était étudiant en graphisme. Nous avons parlé ce soir-là durant plus d'une heure. Le lendemain soir, il était encore là ; il m'attendait, comme j'étais venu en espérant qu'il y soit. Il en fut ainsi durant plus de six mois. Si nos conversations sur Internet se firent plus rares, c'est simplement parce que ce garçon déménagea à Montréal... dans l'appartement voisin du mien. J'ai abandondamment parlé de lui ; il s'agit de l'adorable garçon devenu acrobate et qui, depuis un peu plus d'un an vit à Las Vegas. Il me demandait il y a quelques jours s'il n'y aurait pas encore un appartement vacant dans mon immeuble, qu'il pourrait occuper en attendant de repartir, en Europe cette fois.

Les copains européens insistaient pour que je vienne en Europe. À l'automne 2001, je vins passer huit jours chez un copain de Liège, perdu de vue depuis ; il était venu me chercher à l'aéroport de Bruxelles, accompagné de ce PierreB qui, le premier m'avait salué dans le salon de clavardage et qui devint mon « parrain » en m'indiquant comment m'y prendre. À ma descente d'avion, PierreB était là avec François et Marcel, un autre copain ; j'allai prendre une douche, puis l'apéritif, chez PierreB, avant d'aller manger des moules et des frites dans un bon restaurant de Bruxelles dont je n'ai pas retenu le nom. PierreB est le père de ce
Thomas qui fait de si belles photos ; j'avais croisé Thomas en sortant de la salle de bain chez son père.
En quittant Liège, je vins à Paris. Je ne raconterai pas ici mon arrivée à l'hôtel où j'avais réservé une chambre, un dimanche en fin d'après-midi : il faudrait un chapitre entier pour raconter cette histoire. Je pris donc une chambre près de l'Opéra où je restai plusieurs jours, alors qu'en principe des copains qui avaient fortement insisté pour que je vienne devaient m'héberger.
Pour garder le contact avec mes cyberamis, je m'arrêtais chaque soir dans un café du boulevard de Sébastopol. Un soir, Alexandre, qui savait que je devais venir à Paris, me demanda où j'étais ; je lui répondis que j'étais dans un café, boulevard de Sébastopol. Il me demanda de sortir du café, de traverser la rue et de marcher quelques pas vers la gauche : il habitait presqu'en face ; il descendit, nous nous embrassâmes et nous allâmes prendre un verre dans un bar de la rue voisine.

Le lendemain, un autre copain avec qui j'avais très peu dialogué auparavant me demandait où je logeais ; quand je lui dis que j'étais à l'hôtel, il fut choqué que tous ces prétendus amis qui avaient insisté pour que je vienne à Paris ne se soient pas plus empressés de m'inviter chez eux. Il me dit qu'il travaillait tout près de mon hôtel, que nous pourrions nous rencontrer le lendemain pour prendre un sandwich dans un café, qu'il me remettrait les clés de son appartement où je pourrais m'installer car il partait passer quelques jours à la campagne. Je restai chez lui dix jours, rue Vieille-du-Temple.
Le samedi suivant, nous étions plus de trente habitués du salon de clavardage à nous rencontrer dans un restaurant de la rue des Lombards. Certains étaient venus de Belgique, de Suisse, de la Province ou de la banlieue parisienne... J'ai vu là, en personne, des garçons, et quelques filles, dont quelques-uns sont restés des amis que j'espère pouvoir accueiilir à Montréal un jour pas trop lointain.
Il serait trop long d'énumérer toutes mes rencontres associées à Internet ; lors de ce dernier voyage en Belgique et en France, j'ai rencontré environ 75 personnes. Et je garde effectivement un souvenir très attendri d'Élise, d'Esneux ; de PierreB et Thomas, de Frédéric, de Bruxelles ; de Didier Loupiot, de Christian, Erwan, Victor, Sandy, Frédéric, de Paris ; de Sébastien, des Yvelines ; de Yann, de Châteauroux ; de Guillaume, de Versailles, et de nombreux autres... Il y a certaines personnes que je n'ai pas encore rencontrées et avec qui je suis en communication soit par courriel, par MSN, à l'occasion par téléphone ; une rencontre en vrai ne devrait pas trop tarder. À Montréal, outre mon bel acrobate, j'ai rencontré, grâce au fameux salon de clavardage, Frédéric, Marc... Sergio est venu du Mexique passer quelques jours à Montréal, puis Philippe et Patrice, venus de Tournai, en Belgique...
Si ce salon de clavardage n'a pas disparu, il s'est pratiquement vidé de toutes ces personnes intéressantes que j'y ai connues. À l'occasion j'y retrouve deux ou trois fidèles. Pour compenser la dispersion des copains et la quasi disparition du salon de clavardage, j'ai créé ce blogue il y a un peu plus d'un an. Au cours des derniers mois, j'ai rencontré trois blogueurs que je lis ou dont je regarde les images :
Joss,
Olivier et son « grand brun »,
Jean-Marc. Je crois que d'ici quinze jours, je rencontrerai un nouvel arrivant venu du sud de la France, puis...
Nul doute que je ferai bientôt la rencontre de celui qui enchantera le reste de ma vie...
