dimanche 7 janvier 2007

Réchauffement...

« Noël aux buissons, Pâques aux tisons », dit le proverbe ; et ce serait, dit-on, un proverbe de pays froid.

Si les pays chauds ne semblent pas perdre leurs caractéristiques communes, il semble que l'on ait du mal, en ce moment, à reconnaître les pays que l'on dit froids. Alors que, normalement au mois de janvier, le Québec connaît des températures qui tournent autour de moins vingt degrés Celsius, il y fait souvent, ces deniers jours, plutôt dix degrés que moins vingt. Et pour les amateurs de neige, de sports d'hivers, cet hiver a bien mal commencé. Quant aux fervents de la tradition de Noël sous la neige, ils auront été bien déçus aussi ; le jour de Noël, je me rendais chez un ami à bicyclette.

Ces bouleversements climatiques sont causés par le réchauffement de la Planète, conséquence de nos inconséquences et de la pollution atmosphérique que nous continuons d'augmenter en dépit des efforts, individuels et collectifs, que font certains pour tenter de renverser ce phénomène en diminuant la quantité de gaz toxiques, par exemple. En fait, il semble que les efforts de quelques millions d'individus soient simplement annulés, rendus vains, inutiles, par le train de vie des riches dont la fortune n'a d'égal que l'égocentrisme et le cynisme. Je n'ai rien contre la richesse, bien au contraire. Mais si la richesse n'est que d'argent et de puissance, elle est bien misérable, même si elle se chauffe au soleil, où tout n'est pas toujours qu'« ordre, luxe, calme et volupté »...

Jean-Léon Gérôme (1824-1904), Socrate allant chercher Alcibiade
dans la maison d'Aspasie


Parmi les riches insolents, mort depuis longtemps, celui-là, je ne dois pas oublier Alcibiade, à qui j'ai emprunté mon pseudonyme en l'amputant des dernières lettres comme pour mieux me dissocier des aspects sombres du caractère et de la vie de cet enfant d'Athènes qui, ayant commencé sa « carrière » (celle de la vie, pour évoquer Dante) dans la beauté, la richesse et l'admiration de ses concitoyens, l'a fini en exil, assassiné par une complice de ses plaisirs les plus vils. Si j'aime l'intelligence, la liberté, voire l'insolence du jeune Alcibiade, j'ai surtout en commun avec lui, sans doute pas pour les mêmes raisons, d'être un grand admirateur de Socrate. Amoureux du grand sage, qui était sans doute assez admiratif devant la beauté et la jeunesse de ce neveu de Périclès, Alcibiade n'a jamais réussi à vraiment séduire Socrate qui a toujours résisté à ses avances, ce qui était une façon de démontrer que l'argent peut acheter bien des choses, sauf l'amour et la sagesse...

Même si récemment je me suis fait plus discret sur cet amour inconditionnel, les lecteurs attentifs de ce blogue connaissent mon amour de la France, de l'Italie, de la Grèce (j'ai évoqué plus souvent la France et la Grèce que l'Italie, mais celle-ci n'en est pas moins chère à mon coeur)... J'ai moins parlé récemment de ces trois pays que j'aime parce que, d'une part, j'ai été très occupé, au point de me perdre de vue et d'oublier un peu ce que j'aimais depuis longtemps et, d'autre part, cet amour est souvent douloureux en raison de la distance, du décalage...

Or, ce matin, j'ai reçu un message qui a réveillé en moi un volcan qui me semblait endormi. Dans un courriel qu'il m'adresse, un homme que j'imagine assez jeune, dit avoir découvert ce blogue par hasard et avoir été séduit par l'évocation de la neige ; toute sa vie, dit-il, il a rêvé de passer un Noël blanc sous la neige et il n'a jamais pu encore réaliser ce rêve...

Je suis très ému de cette confidence, de ce rêve dont me fait part Salvo. Chez lui, en Sicile, on ne peut espérer voir tomber la neige, même en décembre ; il n'est donc pas question de voir arriver non plus le Père Noël dans son traîneau tiré par ses rennes... Salvo rêve donc d'un Noël traditionnel dans un pays de neige, comme au Québec (à condition que ce pays froid tienne ses promesses et qu'il y ait de la neige à Noël). Il est important d'avoir des rêves et il faut aussi faire attention aux rêves que nous entretenons, car ils pourraient bien se réaliser : c'est ce que je souhaite à Salvo.

En ce moment, je rêve, moi, d'avoir beaucoup d'argent afin de pouvoir louer dans la région des Laurentides, au nord de Montréal, une auberge comme celle de La Sapinière, par exemple, où l'on mange très bien et, durant quelques jours où il y aurait abondamment de neige, y inviter tous mes amis, anciens et nouveaux, aussi bien ceux qui sont loins et que je n'ai encore jamais rencontrés que ceux que, bien que voisins, je ne vois pas souvent, et y organiser une vraie fête de Noël sous la neige, un peu comme celle du film Fanny et Alexandre.

Toutes les photos d'hiver sont empruntées au site de l'auberge La Sapinière qui, bien entendu, n'a aucunement commandité ce billet ; il y a un moment que je n'y ai été mais, en évoquant une auberge à la campagne où je pourrais recevoir des amis, le souvenir de très beaux et délicieux moments m'est revenu à la mémoire et... aux papilles.

Le tableau de Jean-Léon Gérôme, Socrate allant chercher Alcibiade dans la maison d'Aspasie, provient d'ici.


La suite de ce billet demain...

20 commentaires:

Brigetoun a dit…

très citadin le décor intérieur de l'auberge si la campagne est photogénique à souhait. Mais l'idée d'un groupe d'amis occupant une auberge est jolie.
Pour ce pauvre Alcibiade selon Platon il aimait Socrate surtout intellectuellement

Alcib a dit…

En effet, Brigetoun, il s'agit d'une auberge à la campagne (dans un village), et pas forcément une auberge campagnarde. Les gens d'affaires y organisent beaucoup de réunions. Cette neige fait rêver, surtout en ce moment, où la neige tombée est déjà fondue.
C'est en effet un bel endroit pour rassembler ses amis ; mais je devrai faire un choix très judicieux car je crois qu'il n'y a de place que pour 180 personnes et seulement 68 chambres.
Bien sûr que Platon met l'accent sur l'amour idéal, sur le désir des corps sublimé en amour des esprits... C'est ce que l'on appelle « l'amour platonique » : plat pour l'un, tonique pour l'autre. Je crois, d'après diverses lectures faites, dont celle de Jacqueline de Romilly, que l'on a tort de parler de « consommation » charnelle entre Socrate et Alcibiade. Mais je crois aussi l'on ne peut nier le désir de ce dernier, qui était sûrement de sa part une vaine tentative de s'assimiler ainsi son esprit et sa sagesse, à la façon dont les cannibales voulaient s'assimiler le courage de leurs prisonniers en leur dévorant le coeur.
Selon Freud, l'intérêt que l'on porte aux autres est une forme de désir sexuel plus ou moins sublimé selon les êtres et les circonstances...

Anonyme a dit…

Salut,
Ah cette neige de l'Amérique du Nord me fait rêver depuis mes confins de la Bretagne et de la Normandie où mes poiriers bourgeonnent déjà (avant des gelées fatales et inévitables qui me priveront de leurs fruits)
salut Alcib.
chaque homme.

Alcib a dit…

Merci, Chaque Homme. La neige que l'on voit sur ces images fait rêver bien des Québécois, sportifs ou commerçants dont les affaires dépendent beaucoup de la neige (stations de ski, etc.), ainsi que les touristes venus pour profiter d'une neige qui n'est pas (encore) au rendez-vous cette année.
Effectivement, ce faux printemps que nous connaissons en ce moment est dangereux pour la végétation qui n'en sera que plus surprise quand les grandes gelées arriveront.
« Poiriers » : ce seul mot me fait rêver. J'adore les poires et l'idée ne me serait jamais venue d'en avoir dans mon jardin (à supposer que j'aie un jardin) ; il aurait fallu que celui-ci soit dans un climat plus doux. Mais avec ce réchauffement, peut-être pourrons-nous avoir des poires au Québec.

Les Pitous a dit…

Je préfère, tu le sais, le Socrate arrachant Alcibiade à la Volupté
de J.B. Regnault à voir là : http://www.educnet.education.fr/musagora/citoyennete/images/socrate-alcibiade.jpg

Sinon, on est invités à La Sapinière? C'est que ça m'a l'air bien sympathique! ;-)

Alcib a dit…

Oui, G. Pitou, je connais aussi ce tableau de Regnault, mais celui de Gerome me semblait moins connu et, bien que très idéalisé (Alcibiade jeune et beau, Aspasie et non d'autres filles de petites vertu, Socrate enfin beau), méritait d'être vu au moins une fois...
Bien sûr que vous êtes invités à La Sapinière ; la date n'en sera arrêtée que lorsque nous aurons vraiment de la neige (si l'on veut organiser un Noël blanc, même en février) et que j'aurai trouvé le billet gagnant à la loterie ;o))

Beo a dit…

J'ai connu un Alcibiade... c'était un lion je crois! ;)

Anonyme a dit…

Moi aussi, ça me va La Sapinière ! Tu m'invites ? :-)))
Le cadre a l'air très sympa et avec la neige, c'est féerique. Mais, il ne faut pas qu'il fasse trop froid; je déteste les grands froids ainsi que le verglas et la pluie. En plus, étant donné que je ne suis plus au Québec, il faudra me prévenir à l'avance pour le billet d'avion, les préparatifs, etc.
Tu trouves que je suis exigeante, Alcib ? :-))))

Anonyme a dit…

Ce serait effectivement un très beau projet de se retrouver là-bas, ou d'y faire connaissance...
...en attendant, tu peux aussi lire le superbe roman d'Orhan Pamuk "Neige", un des plus beaux livres parus ces dernières années !

Anonyme a dit…

Et oui, le temps est devenu fou partout; alors j'ai quelques espoirs de réaliser mon Noel sous la neige, en Sicile et près de la mer... Quant à Alcibiade et Socrate, je ne connais pas ce livre de de Romilly que vous avez cité: pouvez vous m'indiquer les titre? Merci

Alcib a dit…

-> Beo : si c'était un lion, c'est peut-être le bon ;o)

-> Soraya : bien sûr que tu es invitée, en famille si tu veux. Tes exigeances me conviennent bien. Je pensais effectivement aux délais qu'il faudra donner pour l'achat des billets d'avion. Ça fait beaucoup de choses à coordonner : de la neige, le gros lot et... la disponibilité de tout le monde ;o)

-> Fuligineuse : Oui, ça me semble idéal comme lieu de rencontre. Et comme nous serons assez nombreux, nous pourrons réserver toute l'auberge et sa salle à manger. Nous pourrons planifier des activités, comme... une formation sur la gestion de son blogue, des périodes d'écriture supervisée ;o))
Je garde un bon souvenir de ma rencontre à Paris où un samedi soir dans un restaurant du marais nous étions plus de 30 personnes (de Suisse, de Belgique, de France, du Québec) qui avaient l'habitude de dialoguer sur Internet...
Merci pour la suggestion de lecture.

-> : Salvo, merci et bienvenue ici. Puisqu'il s'agit du premier commentaire, il faut faire un voeu ;o)
Jacqueline de Romilly a écrit de nombreux livres sur la Grèce antique ; l'un de ces livres est simplement intitulé « Alcibiade ou les dangers de l'ambition ». Tu trouveras ici d'autres titres en français : http://fr.wikipedia.org/wiki/Alcibiade
À bientôt.

Anonyme a dit…

Bonjour.
Je t'ai écrit un commentaire pour ce dernier message du 7 janvier (Réchauffement) mais je viens de m'apercevoir que je me suis trompé et je l'ai inscrit sur ton message du 31 décembre.. Alors je te le recopie ci-dessous:

***
Salut Alcib
C'est un retour en force. Les photos sont superbes et je te trouve généreux de faire découvrir ces paysages enchanteurs du Nord de Montréal. J'imagine le plaisir que doit ressentir ton lecteur sicilien Salvo. Moi aussi je lui souhaite de réaliser son rêve. Il faut rêver et il faut vivre les rêves avec fougues et énergies.
Je te souhaite une année pleine de réalisations.

Anonyme a dit…

Alcibiade,

Il y a des poiriers au Québec aussi,les québécois sont souvent les premiers surpris. Dans mon petit verger entre autres il y en a une trentaine des variétés suivantes : Beauté flamande, Clasp, Bartlett... Aussi, comme le signale Chaque Homme, il y a des bourgeons en ce moment ici comme en Bretagne, et que le gel va bientôt détruire.

La Sapinière - Val David, est un petit paradis j'en conviens. Je vous souhaite de trouver le billet gagnant afin que vous puissiez mettre votre généreuse idée à exécution. L'hiver est une saison magnifique et qui me manque terriblement. L'affreuse saison grise et humide que nous vivons au Québec présentement me fait, moi aussi, rêver d'ailleurs meilleurs... (de la Grèce, de l'Italie, ou d'un printemps en France).

Anonyme a dit…

Cher Alcib,

merci pour le voeu auquel j'ai droit (déjà exprimé) et pour l'indication bibliographique. Je connais autres titres de de Romilly, elle est bien traduite en italien et il y a des livres dans la Librairie de mon ecole (où je serais documentaliste, entre une leçon de Lucrèce et un sonnet de Dante). Ici, dans l'attente de la neige, le froid est venu: il ne s'agit pas du général Hiver, mais un simple lieutenant. Pour la neige, voir la rubrique miracles ou presque (l'année dernière il a neigé pour une heure, et peut-etre il faudra attendre des lustres pour revoir la Dame Blanche). Un ciao de la Sicile à tout le monde

Anonyme a dit…

Bonne nouvelle, la neige est arrivée dans les Laurentides, Alcib ! Tu peux donc te lancer dans tes réservations de Sapinière. J'espère - au sein du groupe des nouveaux - faire partie des invités et avoir le plaisir de te rencontrer. Peut-être as tu trouvé l'argent que tu évoquais dans ta note ? Cela dit, la plus grande des richesses est la richesse intérieure, non ?

Alcib a dit…

-> Lux, merci. Peut importe l'endroit, j'avais bien reçu le message. Mais c'est vrai que si le commentaire concerne un billet en particulier, il vaut mieux - surtout pour le bénéfice des lecteurs futures générations ;o)) - qu'il soit sous le billet en question.
La vraie générosité sera mise à l'épreuve quand j'inviterai effectivement tous mes amis dans cette auberge. Merci encore.

-> Marc, je suis ravi d'apprendre que des poiriers poussent au Québec et qu'ils donnent des fruits. J'espère que la nature va retrouver sa raison.
Je crois bien que je détient le billet gagnant ; en fait je le saurai demain ;o)
Moi qui ne suis qu'un pauvre citadin, je ne me plains pas trop du temps doux et des trottoirs secs, mais comme je sais que la plupart des gens ne sont pas contents et que la nature et l'économie ne le sont pas non plus, je n'ose exprimer trop haut ma satisfaction.

-> Salvo : Je ne suis pas étonné d'apprendre que les livres de Jacqueline de Romilly soient traduits en italien ; ce sont des classiques sur la Grèce ancienne. Elle est en bonne compagnie, chez toi, entre Lucrèce et Dante.
Quant au miracle attendu, il ne saurait tarder : la Sicile s'entend bien, me semble-t-il, avec le grand maître des miracles.

-> Denis : Je suis ravi d'apprendre que les Laurentiens soient sous la neige ; ils pourront ainsi accueillir plus joyeusement leurs invités.
Je ne sais pas encore s'il y aura quelques millions de dollars dans mon compte cette semaine. Mais ne t'inquiète pas : ton nom est déjà sur la liste des invités ; je n'attends qu'une signature de Loto-Québec pour envoyer les invitations ;o)
Je crois aussi que les richesses intérieures sont les plus précieuses, mais l'un n'empêche pas l'autre. On dit trop souvent, pour consoler les pauvres de ne pas en avoir, que « l'argent ne fait pas le bonheur », à quoi je réponds toujours que « la pauvreté non plus ne fait pas le bonheur ». Jean d'Ormesson disait, lui, que « l'argent fait le bonheur des pauvres », mais pas celui des riches. Quelqu'un d'autre - qui ? - a dit que ce n'est pas l'argent que l'on a qui nous rend malheureux, c'est celui que l'on poursuit.

Anonyme a dit…

Par respect pour les futures générations, je vais surveiller attentivement le lieu où je déposerai mes cogitations :)

Alcib a dit…

Lux, c'est surtout par respect pour tes cogitations ; il serait dommage que les futures générations ne comprennent pas de quoi tu parles ;o)

Anonyme a dit…

Hahaha. Compris et merci de vouloir me faire traverser le temps

Anonyme a dit…

Alcib, dans la citation "L'argent ne fait pas le bonheur", on oublie toujours la fin "Mais il y contribue". Et c'est tout aussi important. Certes, il est vrai que la richesse intérieure est la plus précieuse.
À bientôt !