mardi 6 décembre 2005

Le flacon bleu... (rêverie)

François avait encore un peu de temps devant lui avant de se rendre dîner chez ses amis. Il pouvait relaxer en écoutant un peu de musique... Il avait pris une douche, s'était habillé et mettait une dernière touche à sa toilette quand le téléphone sonna ; il alla répondre à son bureau. La conversation fut brève, mais agréable. Bien assis dans son fauteuil, il avait raccroché et s'était plongé dans une douce rêverie.

Distraitement, il manipulait un flacon d'eau de toilette qu'il avait dans les mains au moment où le téléphone avait sonné. Il tournait et retournait dans ses mains ce flacon, qu'il semblait regarder sans le voir. Il palpait cependant cette longue bouteille aux quatre côtés égaux, comme un socle de statue de style empire ou une obélisque tronquée, inversée, aux angles adoucis, sur laquelle on aurait posé un chapeau militaire ou l'un de ces bibis qu'affectionne particulièrement la Reine d'Angleterre... François dévissa le bouchon de plastique noir et le posa sur le bureau ; le parfum s'exhala, dégageant un arôme qu'il connaissait bien, une fine odeur de propreté, fraîche et distinguée...

François reconnaissait bien ce parfum, à base de fruits agrumes, de chèvrefeuille et de fleurs d'oranger, sur un fond boisé de cèdre, de mousse de chêne et de bois de santal. Mais en ce moment précis, plus qu'un parfum, cet arôme subtil évoquait le souvenir d'un après-midi d'octobre, à Paris.
Ce jour-là, après la toilette, il avait enfilé un jean, un léger col roulé et un blouson de daim, puis, avant de sortir, s'était généreusement aspergé de cette nouvelle eau d'Hermès, achetée la veille, avenue de l'Opéra.

Il sortit et marcha longuement, boulevard Raspail, en direction de Saint-Germain-des-Prés, sans but précis. Le soleil était magnifique, l'air était frais et sec ; il faisait bon marcher sur ces grands trottoirs jonchés des feuilles mortes des marronniers et des platanes, qui crissaient sous les pas... François se sentait bien ; libre comme l'air, il marchait lentement, en regardant l'architecture des maisons, observant les gens qu'il rencontrait, répondant d'un sourire s'il surprenait un regard curieux ou complice... Prêt à tout et n'ayant besoin de rien, il pouvait s'offrir ce luxe d'être heureux.



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La photo des feuilles d'automne est de Max Sauter
http://perso.wanadoo.fr/sauter/paris/paris.htm